Elle éteint la douche qui s’est étirée pendant trop longtemps. La vapeur enveloppe l’énorme salle de bain des maîtres. D’un mouvement fluide de baguette, elle la fait disparaitre et tout devient clair devant elle. Elle enfile une robe de chambre blanche très douce et sèche ses cheveux avec un sort basique. Aussitôt, ses longs cheveux ébène se lissent et se mettent en place autour de son visage. Elle ouvre doucement la porte et avant de sortir complètement, elle vérifie qu’il n’y a personne, c’est-à-dire Caesar, n’est dans les parages. Ce qui n’est qu’une formalité puisqu’il passe rarement la journée au manoir. Il part en matinée pour ne revenir qu’au diner et souvent lorsqu’elle est déjà au lit. Ça facilite grandement les choses, elle qui essaie de l’éviter le plus possible. Elle se dirige vers son énorme penderie et c’est sans surprise qu’elle aperçoit des vêtements amples et choisis avec soin par Dubu, leur elfe de maison, qui a bien rapidement découvert le secret de sa maitresse. Avant de s’habiller, Irene détache son peignoir qui tombe à ses pieds manucurés de rouge vif. Elle se regarde dans l’énorme miroir sur pieds aux gravures coréennes. Elle en a pris l’habitude tous les matins pour observer les changements sur son corps. À près de deux mois, ils ne sont pas très visuels, pas encore, même si elle, elle sent qu’elle change. Déjà son teint est plus lumineux et la fatigue arrive un peu plus vite. Elle a des nausées, mais elles ne l’importunent pas. Elle qui a une certaine habitude et une relation de plusieurs années avec les toilettes. Elle enfile tout de même des vêtements plus larges et légers afin que le changement de style ne soit pas trop drastique et qu’on lui pose des questions. Elle se doute que dans quelques semaines, peu importe ce qu’elle portera, on va vite remarquer son ventre plus arrondie, mais elle veut le cacher le plus longtemps possible. Parce que son mari n’est toujours pas au courant. Parce qu’elle a bien du mal encore à se faire à l’idée. Parce qu’elle ne comprend pas trop ce qui lui arrive. Parce qu’elle ne sait pas comment réagir. Personne ne sait. Sauf Dubu. Elle est allée confirmer ses soupçons à St-Mungo, mais n’a pas donné suite. Elle n’a lu aucun livre, ne s’est renseignée sur rien. Elle se ferme un peu les yeux. Elle n’est pas prête. C’est trop tôt. Elle ne connait même pas la couleur préférée de son mari, comment peut-elle avoir un enfant avec lui? Pourtant, elle sait au fond d’elle qu’il est désiré et que c’est un merveilleux miracle. Elle laisse passer un long soupir entre ses lèvres, le cœur serré par l’émotion. Elle enfile ses habits sans s’attarder. Elle a chaud tout d’un coup. Elle doit sortir prendre l’air. S’aérer l’esprit. Comme si ça venait de lui éclater en plein visage soudainement. Comme si elle en prenait finalement conscience.

L’air humide la frappe de plein fouet, mais ça lui fait du bien. Elle transplane jusqu’à Londres sans avoir d’idées précises où se diriger. Elle doit juste se changer les idées. Elle essaie de se remémorer les endroits que Malachi lui a démontré lors de leur rencontre. Repenser au jeune homme à un effet apaisant sur elle. Il a été sa première rencontre, autre que familiale ou provenant du travail, à Londres. Elle a aussitôt été conquise par son charme et il a tout de suite su la mettre à l’aise, malgré qu’elle soit une inconnue. Elle marche ainsi sans réfléchir pendant une bonne heure. Lorsqu’elle se retrouve coincée dans un amas de personne, elle porte machinalement une main protectrice à son ventre. Plus en paix avec cette présence qu’elle l’était le matin même. Puis, un élancement soudain qui l’empêche de faire un pas de plus. Un mal qui laisse échapper un cri de douleur muet. Elle doit prendre appuie sur un bâtiment en se tenant le ventre. Elle est incapable de bouger. L’ironie de la journée. Aussitôt accepté, aussitôt en danger?

 La confiance. La confiance est quelque chose de fragile. Quand on a accordé sa confiance à quelqu'un, on éprouve un sentiment de grande liberté. Mais quand on trahit la confiance de quelqu'un, elle peut être définitivement perdue. Seulement voilà, on ne sait jamais à qui on peut faire confiance... Nos proches peuvent nous trahir... Et de parfaits inconnus peuvent nous venir en aide. Beaucoup de personnes décident de ne faire confiance qu'à eux même. C'est sûrement la façon la plus simple de ne pas se brûler les doigts...De ne pas trop souffrir, ni d'entendre l'appel à l'aide que soulève son coeur à chaque battement. La solitude est sûrement la meilleure chose pour elle à ce jour. Du moins, elle essaie de s'en convaincre. Elle a beau aimer les Nightwings, après le sermon qu'elle s'est pris par Hannah, elle a besoin d'air pour réfléchir. Comme à son habitude d'ailleurs. Roxy n'a jamais été femme à rester en place. Elle préfère de loin partir à l'aventure à toute heure du jour ou de la nuit. En temps normal elle aurait d'ailleurs foncé se préparer pour la Owlies de ce soir, mais elle n'ira pas. Non. Elle n'a de toute évidence pas la tête à ça.

L'écran de son téléphone s'allume d'ailleurs pour la énième fois. Deux messages de Roman; trois de June; six appels manqués de Sky. Ils s'inquiète de toute évidence. Elle se sent d'ailleurs égoïste, eux qui ont tant à penser avec la situation de Bash, voilà qu'elle s'y met à son tour. Ses dents viennent meurtrirent sa lèvre inférieure, tandis qu'elle remonte ses cheveux en un chignon qui se veut assez libre. Quelques méches de cheveux retombent le long de son visage fin alors qu'elle soupire. Elle prend son téléphone et appuies sur la touche rappel. Elle a besoin d'entendre la voix de son plus vieil ami. Où est-ce que tu es ? dit-il en tentant de se faire entendre par dessus la musique. Elle soupire. Chérie ramène ton jolie fessier ici de suite... Arrête de fuir Roxy. la musique se calme. S'étouffe. S'éteins. J'ai besoin de temps... répond elle simplement. Tout ça pour une simple dispute avec Bash ? Arrête Roxy je te connais t'es bien au dessus de ça... Je te rappel qu'on est tes amis nous aussi. Viens. Elle soupire à nouveau et passe une main sur son front. Sky a toujours réussi à faire d'elle ce qu'il voulait. Elle aime bien trop ce mec trop sûr de lui. Elle pince ses lippes sur le point de craquer. Tu fais chier Sky... Je vais voir. Peut-être que je passerais. On verra... dit-elle en imaginant sa gueule d'amour. Elle est prête à parier qu'un air vainqueur étire actuellement ses traits. Je t'aime aussi petite furie à tout de suite ! fini-t-il avant de raccrocher trop sûr de lui.

A présent elle grogne. Pourquoi l'a-t-elle appelée au juste ? Pire erreur, elle en est consciente. Elle jette un oeil sur son porte manteau. Une petite heure ? Non. La thaïlandaise se lève mollement. Se dirige vers son entrée et attrape sa veste en cuir au passage. Elle va prendre l'air et prendra sa décision plus tard. Elle ferme les yeux et en un instant, transplane pour rejoindre le Londres sorcier. Sa langue passe doucement sur ses lippes alors qu'une brise d'été caresse son minois. D'un pas lent elle se fond dans la masse de sorciers. Ses pensées vacillent sans but. Elle aime ce genre de moment où elle lâche prise, autrement qu'avec de l'alcool au fond du gosier. Ses muscles se détendent alors un à un au fil de ses pas, quand soudain... Quelque chose, ou plutôt quelqu'un attise son regard. Une femme aux traits déformés par la douleur. Elle semble belle, de bonne famille, douce mais sûre d'elle. Sa main sur le ventre elle semble lutter contre un mal alors que personne ne lui porte attention. Personne sauf Roxy évidemment. Elle a beau avoir son caractère, Roxy est quand même femme à avoir le coeur sur la main. D'un pas décidé et jouant des coudes pour se faire une place, la belle se dirige vers la belle asiatique. Elle pince les lèvres et pose une main dans son dos avant de se pencher vers elle en la recouvrant d'un geste protecteur. Respirez mademoiselle... Doucement... Est-ce que vous pouvez marcher ? commence-t-elle d'une voix qui se veut douce. Pas de pitié, seulement de la bienveillance. Je m'appelle Roxy, je vais vous sortir de là... dit-elle en essayant de faire au mieux. L'hopital ? A-t-elle besoin d'y aller ? Dans quoi est-ce que tu te fourre Roxy ?

Une bonne journée d’un nouveau départ s’annonçait. Irene aurait pensé qu’une fois qu’elle aurait accepté sa condition et qu’elle serait en paix avec sa situation, que tout irait bien. Elle venait même d’avoir l’idée de se rendre dans une librairie afin de se prendre quelques lectures pour en savoir plus. Elle affichait même un sourire serein et elle se demandait comment elle allait annoncer la nouvelle à Caesar. Ça la rendait nerveuse, mais en même temps, il avait le droit de savoir. De toute façon, bientôt, il sera difficile et délicat de le cacher. Mais voilà que tout bascule en une fraction de seconde.

La douleur est indescriptible. C’est comme si une énorme crampe lui barrait tout le bas du corps. Comme si son ventre voulait se déchirer de l’intérieur. Elle n’arrive plus à marcher ou même à se redresser. Elle est cambrée en deux et prend appuie sur un mur. Une main est posée sur son ventre comme si ça pouvait la protéger du mal soudain qui l’a ronge. Elle souffre. Des larmes roulent sur ses joues et une grimace déforme ses traits doux. Elle essaie d’appeler à l’aide, mais elle n’arrive pas à ouvrir la bouche sans qu’une lamentation n’en sorte. Elle les implore de ses yeux sombres, mais aucun ne semble s’en soucier. Elle est invisible. Personne ne fait attention à elle. Elle est entourée de sorciers et pourtant, pas un seul ne semble vouloir déroger à son chemin pour lui venir en aide, pas un seul ne tourne le regard vers elle. Sa souffrance est invisible à leurs yeux. Elle regrette alors sa Corée natale, les gens y sont beaucoup moins individualistes. Elle en vient même à regretter les Park qui avaient toujours un œil sur elle. Elle aurait été prise rapidement en charge, au moins. Ça lui donne envie de vomir de penser à eux dans cette situation si précaire. Elle déglutit se demandant qu’elles sont ses options. Elle ne sait pas exactement où elle se trouve ne connaissant pas encore très bien les quartiers. La panique s’insinue en elle. Si quelque chose doit arriver à son bébé, elle ne veut pas que ce soit en pleine rue, seule et au milieu de tous ses idiots qui se fichent d’elle. Elle n’a même pas la force de transplaner chez elle, à Potter’s End. Au moins, elle aurait eu un peu d’aide de son elfe ou même de sa voisine Saracita.

Irene s’imagine déjà le pire lorsqu’une main délicate se pose dans son dos. Elle lève difficilement la tête pour croiser le regard d’une jeune femme d’environ son âge qui lui demande de respirer doucement. Elle secoue négativement la tête. Non elle ne peut pas marcher, elle a même du mal à se mettre droite. Elle ressent un étirement violent dans le bas ventre et elle n’ose pas bouger de peur d’empirer les choses. Elle s’appuie sur la femme. Elle tremble de tous ses membres. " Je-je pense que c’est mon bébé. Ça ne va pas… Il y a quelque chose." Elle a de la difficulté à parler. Entre les pleurs de panique et la douleur qui la submerge. Elle implore la belle qui se prénomme Roxy de ses yeux affolés. Elle aurait aimé que la première fois qu’elle dit tout haut qu’elle est enceinte soit dans une toute autre situation, mais elle ne doit pas le cacher. " Aidez-moi, je vous en prie." Son ton est cassé, peut-être même un peu mélodramatique, mais la femme doit comprendre l’urgence de la situation.

La vie peut être dure, belle et compliquée, mais on est en droit d'espérer qu'elle sera longue. Alors, vous verrez qu'elle est imprévisible, que des périodes noires se produisent mais s'apaisent _ parfois avec beaucoup de soutien _ et que les tunnels s'élargissent, ce qui permet au soleil de revenir. Si vous êtes dans l'obscurité, vous aurez peut-être l'impression que vous n'en sortirez jamais. Que vous tâtonnerez. Seul. Mais ce n'est pas vrai. Il existe des gens susceptibles de vous permettre de retrouver la lumière. Des gens qui vous tendrons la main à un moment opportun. Des gens comme Roxy qui dans des moments pareil seront prêt à tout pour aider son prochain.

Au fond ce n’est pas une de ses femmes imbues de sa personne la jolie Roxy. Il est vrai qu’elle a son caractère. Oui. Il est aussi vrai qu’elle impressionne de par son franc parlé et par son caractère décalé. Elle n’est pas de ceux qui essaie de vous mettre à l’aise mais jamais au grand jamais elle ne fermera les yeux sur une injustice. Son côté sage et compréhensif elle le cache au monde, il n’y a que ses amis les plus proches qui peuvent se vanter de connaitre Roxy à ce point. Ces moments ne sont pas les plus réguliers dans la trame de vie de la jeune thaïlandaise. Non, elle est piquante l’ancienne rouge et or. Elle apporte du pep’s dans les vies moroses et elle aime ça ! Plus que tout. Quitte à passer pour l’insolente de service. Oui. Roxy est un feu d’artifice à elle seule et le problème c’est qu’elle est prête à exploser à tout moment mais… Pas ce soir. Ce soir il faut qu’elle garde son calme. Il faut que la bombe se désamorce pour pouvoir gérer celle qui s’apprête à littéralement éclatée sous ses yeux. Inspire. Expire. Car aujourd’hui elle s’apprête à vivre un événement qui bouleversera sa vie.

Sa main glisse doucement dans le dos de la jeune femme. Elle se veut rassurante et ferme à la fois. La poursuiveuse se sermonne mentalement car dans ce genre de situation il ne faut pas angoisser la victime. Victime de quoi ? Si bien cette jeune femme a seulement des menstruations douloureuses. Qu’est-ce qu’elle en sait la petite thaïlandaise hein ? Quoiqu’il en soit elle ne peut pas ignorer ses supplications comme le font la plupart des sorciers qui les entourent. Elle serre les dents et peste contre ces ignorants. La société d’aujourd’hui l’indigne au plus haut point ? Quand est-ce que la population sorcière a perdu son humanité ? Elle n’a pas à chercher loin pour le savoir… Non. A dire vrai elle sait quand est-ce que tout cela à commencer mais préfère ne pas y penser. La vie telle qu’elle la connaissait avant n’a plus le même gout et c’est pour cela qu’elle aime autant s’échapper dans le monde de la nuit. Un gout amer sur le bout de la langue la fait jurer intérieurement alors qu’elle se présente auprès de la jeune femme aux traits tirés. La douleur se ressent sur chaque ligne de son visage et le palpitant de Roxy en prend un coup.

Votre bébé ?... chuchote-t-elle comme sila femme venait de lui annoncer le plus grand secret de l’univers. Eh merde… Elle n’a plus vraiment le choix à présent elles doivent rejoindre Ste Mangouste et vite ! La brunette n’imaginait pas l’urgence de la situation, non. Elle aimerait que Roman soit présent, le petit génie qu’il est aurait trouvé une solution en deux temps trois mouvements. Roxy n’est pas une flèche, du moins c’est ce qu’elle pense et les situations d’urgence ne sont pas son fort. Le tout est de garder son calme et de ne surtout pas paniquer. Faire le vide dans sa tête et de penser seulement à cette femme qui a besoin de son aide. Ne vous en fait pas, je vous conduirai à Sainte Mangouste même si je dois vous porter sur mon dos. dit-elle avec conviction. Si il y a bien une chose que l’on ne peut pas enlever à Roxy c’est sa détermination sans faille. Si elle a une idée en tête elle fera tout pour mener son objectif à bien.

Une fois mise à l’abris de la population descendante dans la rue, la belle scrute l’horizon. Sainte Mangouste n’est pas loin mais le plus simple serait de transplaner. Hors dans son état la petite femme aux cheveux de jais ne peut pas se le permettre. Le mieux serait pour Roxy de la ménager ou d’appeler des secours… Elle secoue la tête. Peut-être pourrait-elle utiliser un balai ?… Trop dangereux, elle ne sait pas si la future mère tiendra. Lorsqu’un nouveau râle de douleur remonte le long de sa gorge la belle ne réfléchit plus.Je vais vous porter… Tant pis pas le choix. Il faut vous ménager… Je pense que j’ai vécu pire lors de mes entrainements. Vous avez confiance ? dit-elle avec douceur. On a pas le choix il faut vous ménager… Je vous promets que nous serons vite à l’hôpital.

Irene a toujours été seule. Même constamment entourée des Park et de dizaine d’employés, elle l’a toujours été. Dans sa prison dorée, elle n’a jamais pu faire confiance à qui que ce soit dans cette famille. Aucun membre n’était de son côté ou prêt à l’aider. Tous des vautours prêts à cafter le moindre de ses faits et gestes à la matriarche du clan. Peu importe ce qu’elle faisait ou disait, c’était su. C’était puni. C’était humilié. Il n’y avait que son parrain à qui elle pouvait se confier légèrement. Il était gentil avec elle et avait du respect pour sa famille déchue, mais il était aussi très opportuniste et il pouvait jouer dans le dos. C’était tout de même le moins pire de tous. La belle n’a toujours pu compter que sur elle. Même dans ce nouveau pays. Elle aurait été idiote de croire que ça changerait complètement ici. Elle doit se rendre à l’évidence que c’est partout la même histoire et que les autres n’en ont que pour leur petite personne. Alors que son corps est plié en deux de douleur et que sa tête est penchée vers l’avant, elle peut voir les visages soucieux, indifférents ou horrifiés des passants à travers son rideau de cheveux. Elle remarque leurs regards sur elle et pourtant pas un seul ne bouge le petit doigt pour l’aide. Ils savent bien que s’ils font un geste, ils en auront pour plusieurs heures et dérogeront à leur routine.

Tous, sauf une. Une seule personne a mis ses obligations en pause pour se précipiter sur elle et lui porter secours. Irene lui en sera éternellement reconnaissante. La détermination de Roxy lui fait du bien et lui donne l’espoir que tout ne se terminera pas au milieu de cette rue. Irene s’appuie sur sa sauveuse. Elle a mal, mais elle avale sa douleur. L’orgueil l’empêche de se morfondre. Elle a assez attiré l’attention sur elle, elle ne veut pas emmerder le peuple d’avantage. Elle informe la jeune femme de son état. C’est la première fois qu’elle le mentionne à voix haute et si ça aurait dû un poids en moins sur ses épaules, c’est tout le contraire. C’est un ajout supplémentaire. Elle aurait dû être souriante, fraiche et rayonnante et non en sueurs, apeurée et tremblante. "Merci. " souffle-t-elle difficilement à Roxy, un peu à l’improviste. Elle veut qu’elle sache que le simple geste d’être venue vers elle signifie énormément. Parce que même si elle le souhaitait, Irene ne pourrait pas y faire face seule. Elle a du mal à se redresser. C’est comme si le bas de son corps est coincé et impossible à relever. Elle ne veut pas mettre trop de poids sur la jeune femme, mais elle n’a que elle sur qui se poser. Elle n’a pas l’habitude de mettre sa vie dans les mains d’inconnus, mais elle n’a pas le choix. C’est elle qui va dicter la suite, parce que la Rosier a du mal à réfléchir clairement. Elle veut juste se rendre à un endroit qui va la prendre en charge et qui va pouvoir l’observer et faire les tests nécessaires, mais elle n’a aucune idée où se trouve l’hôpital que vient de mentionner la thaïlandaise. Elle aimerait sourire à la dernière remarque de Roxy, mais elle souffre trop. Elle pense bien sûr à transplaner, mais elle ne croit pas être en mesure de le faire. Ça ne vaut pas la peine de risquer de se retrouver à des milliers de kilomètre de l’endroit souhaité ou de risquer des complications. Pourtant, l’idée que la jeune femme puisse la porter, elle n’est pas certaine que soit la meilleure. Irene voit bien que Roxy n’est pas une brindille fragile et qu’elle semble musclée et en forme, mais ça semble judicieux comme moyen de transport. "Vous…vous êtes certaine? " Ses yeux s’agrandissent, horrifiés, juste à penser qu’elle sera trimballer à travers la ville. Mais, a-t-elle le choix? "Je…vous fait confiance." dit-elle finalement. Le temps file et leurs options se font rares. Il faut qu’elle se mette en sécurité rapidement, peu importe le moyen pour y arriver.  

 Elle est habituée à subir des pressions de toutes sortes. Le Quidditch reste bien formateur lorsqu’il s’agit d’affronter la vie. On prend assurément des coups. On tombe de notre balai en plein vol et… On se relève toujours et on enfourche à nouveau son instrument. On prend de la vitesse et on fonce tête baissée vers un nouvel objectif sans prendre le temps de se lamenter et pour cela, elle aime ce sport bien plus que tout. Il lui donne le sourire. Lui apprend l’importance de se battre. La cohésion d’équipe. Et avant tout, à quel point il est primordial de faire confiance aux autres tout en ne comptant pas que sur eux pour avancer et les mener à la victoire. Cette discipline est belle et la berce depuis sa plus tendre enfance. Ses valeurs elle les portent fièrement même si elles peuvent sembler bien trop violentes pour certains. La jeune Thaïlandaise, elle, est fière de pouvoir compter dessus. Après tout ce sport reste son point d’ancrage et ce n’est pas prêt de s’arrêter. Non. Elle n’est pas prête d’abandonner sa passion, elle qui en est si fière. Ses parents, eux ; le sont peut-être moins mais elle s’en accommode. Ils ne sont pas de ce pays, ni de cette génération. Voilà tout.

Le quidditch représente beaucoup pour elle, et c’est peut-être grâce à lui qu’elle se retrouve dans cette situation aujourd’hui. Oubliée de tous, une main sur son ventre pas encore arrondie, les traits tirés par la douleur qui la ronge, Roxy n’hésite pas un seul instant à tendre la main à la coréenne dont les passants semblent fuir le regard. Ils sont de toute évidence bien trop occupés à foncer tête baissée dans une routine bien programmée. Assez en tout cas pour ne pas déroger à leurs chemins habituels. Et la voilà, qui fonce sans aucune hésitation. Aide la jeune femme à se relever pour la mettre à l’abri. Loin de ces regards mi-curieux ; mi-agacés. Elle n’a pas besoin qu’une bande d’imbéciles se penche sur son cas. Encore moins lorsqu’on voit à quel point elle pourrait rester courbée des minutes durant sans que personne ne daigne s’arrêter. La Thaïlandaise ne comprend pas comment ; alors que leurs jours sont si sombres, la bêtise sorcière peut encore subsister à ce point. Comment l’on peut laisser une femme en détresse sans même bouger le petit doigt. Signe que le monde est tombé bien bas et les paroles prononcées par Hannah quelques jours plus tôt résonnent dans la tête de Roxy.

Elle a sans doutes raison la grande Hannah, la jeune femme ne vit pas dans le même monde que la plupart des gens. Elle avance dans sa bulle en faisant abstraction de ce qui l’entoure. De la situation gouvernementale et des atrocités qui se déroulent dans le pays. C’est la jungle et le cas d’Irène ne fait que lui confirmer ce qu’elle redoutait intérieurement. Aujourd’hui c’est chacun pour sa peau ; point. Alors qu’elle tente de rassurer la future mère comme elle peut, la sincérité de ses remerciements la touche. Entre ses gémissements de douleur elle prend quand même le temps de souffler un merci. Signe d’une bonne éducation ou sincérité ? Il y a un peu des deux pour Roxy. L’apparence gracieuse de la jeune femme souffle à l’ancienne rouge et or qu’elle est incontestablement issue d’une bonne famille. Mais l’heure n’est pas à la contemplation, ni à la déduction. Ce qui est important, là de suite, c’est Irène et son bébé. Alors le cerveau de la belle fourmille, tente de trouver une solution pour rejoindre au plus vite l’hôpital. Il n’est pas loin, environ un petit kilomètre, mais pour la jeune coréenne cette distance peut être difficile à surmonter. Transplaner ? Il n’en est pas question. C’est bien trop dangereux alors Barn ne voit qu’une solution. La porter.

Elle fait donc part de son idée à son interlocuteur ce qui ne semble pas l’enchantée mais ont-elles d’autres options ? Pas vraiment. La brunette inspire profondément alors que la jeune femme lui assure avoir confiance en elle. Doucement elle passe une main sous les épaules d’Irène, puis l’autre sous ses genoux. Elle décompte mentalement : Trois. Deux. Un. Go. Et elle la soulève comme une jeune mariée. Sans grand étonnement, elle est assez légère et ça rassure un peu Roxy qui est maintenant certaine d’arriver à bon port. D’un autre côté cette scène est d’un ridicule… Elles sont toutes deux aussi petites l’une que l’autre et la force de Roxy n’est pas la première chose que l’on pourrait remarquer chez elle. Ok. D’ici 15 minutes on sera à l’hôpital. Ça semble court dit comme ça mais avec la douleur ça risque de sembler long. Agrippez-vous à moi. Je vais avoir besoin de vous Irene. Il va falloir serrer les dents. Prête ? dit-elle en plongeant son regard dans le sien. On y va ! Je vais essayer de faire au mieux pour ne pas qu’on se fasse bousculer…dit-elle en s’enfonçant à nouveau dans la foule. Elle lève le menton fièrement. Le regard rivé sur l’horizon, déterminé. On va y arriver et tout ceci ne sera plus qu’un mauvais souvenir à oublier…Du moins elle l’espère…

Ça la rend malade de mettre sa santé et de celle de son bébé entre les mains d’une pure étrangère, même si celle-ci semble avoir le cœur sur la main. Irene a juste de la difficulté à faire confiance. Il y a toujours une petite partie d’elle qui croit que les Park sont derrière toutes les personnes qu’elle croise. Peut-être que cette fille dans toute sa grande bonté a tout simplement été grassement payée pour la suivre et que ce n’est pas un hasard si c’est la seule qui a eu la gentillesse de s’arrêter pour lui venir en aide. Même à des milliers de kilomètres, la Rosier sait que sa famille d’adoption est en mesure de tout contrôler autour d’elle. Et s’il y a bien une chose qu’elle ne veut pas qu’ils puissent contrôler, c’est bien sa grossesse. Son corps. Entre deux douleurs, elle essaie de trouver un geste qui pourrait trahir les intentions réelles de Roxy, mais son visage ne reflète que de la sincérité et de l’empathie. Rien à voir avec une employée des Park. Elle s’en veut de penser à tout ça dans pareille situation. Comment auraient-ils pu le savoir? Personne ne le sait. Pas même son propre mari. Seul son beau-frère a des soupçons, mais il était tellement mal à l’aise devant sa situation qu’elle est certaine qu’il n’a rien dit. Respire Irene. Les Park ne sont pas là. C’est jeune femme est là pour toi. Et elle respire. Elle se calme. S’affoler ne sert à rien. Penser au pire non plus.  

Elle n’a qu’une chose à faire et c’est de penser à elle. C’est de se rendre à l’hôpital le plus rapidement possible afin qu’elle soit prise en charge et qu’on la rassure. Évidemment, rien ne peut être simple et le seul moyen de locomotion envisageable, ce sont les bras de celle qu’elle surnomme sa sauveuse. Elle hésite encore en anticipant déjà la traversée. Elle pense aux regards qu’on posera sur elles, aux remarques qu’on leur criera et aux rires qu’on leur adressera. Elle a l’habitude qu’on la remarque par sa classe et sa beauté, pas parce qu’elle se trouve dans une position précaire. Mais un nouveau malaise qui la plie en deux lui rappelle que tout ça n’a aucune importance, qu’elle doit arrêter de s’inquiéter de ce qu’on peut dire sur elle. Elle indique à Roxy qu’elle est prête et cette dernière n’a aucun mal à la soulever. Irene essuie une grimace et serre bien les dents. Elle retient son souffle que quinze petites minutes. Elle s’accroche du mieux qu’elle peut au cou de la thaïlandaise. Roxy est habile et agile. Elle esquive les obstacles sans grande difficulté, comme si elle se trouvait en plein match de quidditch. Seulement ce n’est pas un souaffle qu’elle a dans les mains, mais une femme souffrante qui n’a aucune idée de ce qui se passe dans son corps. Les gens, d’abord surpris, s’écartent de leur chemin. Certains lancent des commentaires, mais c’est le dernier de ses soucis. La belle se concentre sur ce qui se passe devant elle, même si chaque pas donne un coup et est une douleur supplémentaire. Elle plisse les yeux dans l’espoir d’apercevoir leur objectif qui est pourtant encore bien loin. Elle veut encourager Roxy, mais aucun son ne sort de sa bouche. Elle avale son mal en fermant les yeux en espérant qu’elles arrivent bientôt à destination. Elle focus sur sa respiration, sur l’odeur des cheveux de la jeune femme qui la transporte par la force de ses muscles d’athlète, les bruits et sons autour d’elles, sur le vent qui caresse son visage. Elle retient les larmes qui veulent émerger. Tout pour ne pas penser au malheur qui se passe en elle. "On….on ar-rive bi-bien-tôt?" Elle n’ose pas ouvrir les yeux de peur de ressentir à nouveau la douleur qu’elle a réussi à compartimenter en s’accrochant à tout le reste.

Elle garde la tête haute, reste forte et déterminée face à l’hésitation d’Irène. Elle ne connaît rien des pensées qui traversent l’esprit de la belle coréenne mais ne peut qu’imaginer le tourment que peut ressentir une future mère face à une épreuve telle que celle qu’elle traverse. Elle observe le visage de la belle, remarque chaque ride de douleur qui se creuse sur ce visage parfait. Nul doute qu’elle est forte et qu’elle vient d’une famille de haut rang. Cantonnée à une petite cage dorée qui lui impose des barrières bien trop importantes et une charge mentale, caractéristique des familles coréennes qui réclament la perfection. Alors Roxy tente de se faire rassurante, dans sa façon de se tenir droite. Dans son regard sincère et dans ses mots qui semblent protecteurs. Ses muscles se durcissent alors qu’elle se décide à avancer, prenant soin de ne pas brusquer la future mère. Roxy avance, lèvres plissées. Se concentre pour éviter au mieux les embûches causées par les passants qui leur jette des regards curieux. Après tout il n’est pas commun de voir une femme en porter une autre à bras le corps. La thaïlandaise peste alors, quelque peu énervée par cette attention qu’on leur porte à présent.

Bande d’idiots… C’est maintenant qu’ils se décident à nous porter attention, alors que deux minutes avant ils nous passaient à côté sans même un regard… dit-elle sans le moindre gène. Espérant au passage que cela fera réagir certaines personnes les entourant mais rien. La joueuse de quidditch lève donc les yeux au ciel avant de poursuivre la route. Agile, elle esquive les passants comme si elle était sur son balais en plein match et remercie Merlin de lui avoir octroyé une condition physique d’athlète. Oh bien sûr Irène est un poids plume, il n’empêche que Roxy aussi. Serrant les dents afin de se concentrer sur son objectif, elle chasse toutes pensées qui peuvent la traverser. L’heure n’est pas aux complaintes intérieures mais bien au sauvetage d’une femme à qui elle a décidé de tendre la main. Alors elle accélère le rythme, essayant de ne pas penser aux minutes qui les séparent de Saint Mangouste. Sourit à une Irene qui est visiblement plongée dans un tout autre combat. La belle déconnecte alors, quittant des yeux la coréenne. Je vous promets qu’on va y arriver…souffle-t-elle avant de tiquer sur un détail qu’elle n’avait pas remarqué jusqu’à présent.

Ses lèvres se pincent, essayant de ne pas fixer le carmin qui commence à s’épancher sur le vêtement de la belle. Elle accélère encore, encore, encore, se maudissant de faire des promesses qu’elle ne pourra peut-être pas tenir et finalement le voilà. Le bâtiment imposant qui finira le travail qu’elle a commencé, elle voudrait courir jusqu’à l’entrée et hurler à un médicomage de la prendre en charge mais elle ne veut pas l’affoler. Alors que ses yeux retournent vers la tâche qui s’agrandit un peu plus la thaïlandaise, se met un autre coup de fouet jusqu’à son arrivée dans l’hôpital. Pas le temps de se diriger vers l’accueil. Roxy n’a que faire que d’attirer l’attention sur elle. Nous avons besoin d’un médecin ! De suite ! Elle est enceinte ! son ton est autoritaire, si bien qu’une armée de personnes se dirige vers elle lui ôtant la brune des bras. Je reste là Irene ! Je vous attends ! dit-elle en lui tenant la main. Vous n’êtes pas seule, je vous promets que vous ne serez pas seule… souffle-t-elle en croisant son regard inquiet. Elle attendra le temps qu’il faudra…

Elle veut s’accrocher. Elle sait qu’elle est capable de tenir bon. Il lui reste un peu de force. Ce n’est qu’une question de quelques minutes avant qu’elles ne pénètrent dans le grand hall de l’hôpital et qu’elle soit prise en charge. Mais, Irene se sent faible tout à coup. Autour d’elle, tout s’évapore. Les sons, les voix, les bruits, tout lui semble lointain. Elle sent du liquide descendre sur ses jambes sans en connaitre la couleur ou la provenance. Ses sensations disparaissent, sauf un picotement sur le bout de ses doigts. Tout tourne. Elle a chaud. Elle frissonne. Elle a presque l’impression de voler. Elle sent sa tête lourde. Elle entend vaguement les paroles réconfortantes de Roxy. Ses yeux se ferment et elle ne résiste plus. Son cœur est néanmoins remplit d’espoir.

Lorsqu’Irene rouvre les yeux, elle est un peu perdue, étendue sur un lit ou peut-être une civière. Quelques secondes s’écoulent avant qu’elle ne comprenne ce qui se passe. Douleurs, crampes, incapable de bouger, bébé, Roxy, course, St-Mungo. Elles y sont arrivées. Roxy a réussi à l’emmener à destination. La belle ressent une vague de soulagement, avant qu’elle ne croise le regard inquiet d’une sage-femme et des infirmières qui s’affairent autour d’elle. Elle prend alors conscience de ce qu’elles disent. « …beaucoup de sang. ». « ….pas de cœur… », « …potions…chirurgie… ». Elle panique. On lui dit de se calmer, mais impossible avec ce qu’elle vient de percevoir. Elle cherche Roxy du regard. Elle est juste là et lui tient la main avec un air qui la rassure. Si sa nouvelle amie est inquiète, elle ne le démontre pas et Irene s’accroche de toutes ses forces à elle. Elle a besoin de sa sauveuse. Elle ne veut pas être seule. On lui donne une potion qui la calme aussitôt. On lui met des trucs dans les bras et on récite des formules médicales qui la perdent rapidement. Une femme se penche vers elle. "Tout ira bien, mademoiselle. Avez-vous quelqu’un à contacter?" Caesar. C’est la seule personne à avertir, mais elle a peur. Il ne sait pas. Il ne sait rien de son état. Il ne peut pas l’apprendre comme ça. Ce n’est pas comme ça que ça devait se passer. Pas dans ces circonstances. "M…mon mari. Caesar Rosier." Aussitôt, la dame ordonne d’envoyer un hibou. Irene ne peut empêcher les larmes de couler ne comprenant pas pourquoi ça la rend aussi émotive. Elle a peur de sa réaction, elle a peur qu’il la voit dans cet état, elle a peur qu’il ne vienne pas. Elle sourit à Roxy qui n’a toujours pas bougé, mais on les force à se séparer. "On doit l’emmener rapidement. Si vous n’êtes pas de la famille vous devez rester ici." La coréenne déglutit, elle panique. Ses grands yeux apeurés continuent de réclamer sa sauveuse, ses mains cherchent à s’y agripper, mais son lit s’éloigne de plus en plus. On l’emmène elle ne sait pas où. Elle ne sait pas ce qu’ils vont lui faire. Elle veut juste un visage connu pour passer au travers. Roxy lui dit qu’elle reste là et Irene se force à sourire puis elle tourne le coin et l’autre brune disparait de son champ de vision. Elle n’a même pas pu la remercier ou lui demander comment la contacter.