tw: cheating yikes, drug use, alcohol abuse

“It’s not that big of a deal, Pan, I promise. You know how Camilla can get, she’s… you know, she’s a bit antisocial, right? It’s just going to be the four of us. - Alright… but we’re still good for your birthday on Thursday, right?” Obelia sourit légèrement et prend le visage de Panuwat entre ses mains, se penchant pour l’embrasser rapidement. “Of course, Pan.” Elle essaye de mettre un peu d’entrain dans sa voix, à grand mal. L’idée de passer une soirée entière avec Pan est plutôt séduisante, mais elle sait qu’il a invité tous leurs amis, y compris Noah - et autant dire qu’elle n’a absolument aucune envie de passer une soirée entière coincée entre les deux. Elle ignore même si ce serait physiquement possible et si Noah ne finirait pas par lui sauter à la gorge. “Alright, then.” Obelia sent son coeur se serrer dans sa poitrine au sourire lumineux et heureux que Pan lui adresse. “Have fun!”

Quelques minutes plus tard, elle retourne dans la chambre qu’ils partagent avec Noah et attrape le sac qu’ils ont composé la veille avec l’aide de Dennis. Au menu: paquets de cigarettes sorcières et moldues, quatre packs de bières (un chacun), deux sachets de weed (Dennis lui a dit que c’était de la bonne celle-ci, de la strain magique made in Sheffield), assez de biscuits pour épancher la faim infinie de Cat, et les deux cadeaux pour Camilla, bien sûr, soigneusement emballés par Obelia pendant la nuit.

Obelia n’irait pas jusqu’à dire qu’elle et Camilla sont amies, ce serait franchement exagéré - tout comme elle n’est pas réellement amie avec Cat. Mais c’est presque naturellement qu’elle a demandé à Dennis de l’aider pour préparer son cadeau, et cette petite fête entre eux. Après tout, de leur groupe de fuyards de l’époque, il ne reste qu’eux. Ou plutôt, il n’y a qu’eux qui comptent.

Noah la rejoint peu après et Obelia s’en veut terriblement de la douce chaleur qui se répand dans sa poitrine quand elle le voit, le sourire sincère qui étire ses lèvres et qui fait deux fois la taille que ceux qu’elle a pu adresser à Pan durant la journée. It’s not the right time, n’arrête-t-elle pas de lui dire, I'll do it later. Tomorrow. Next week. When he’s feeling better. There’s that test coming up. I’m not ready for it today… C’est facile de s’en vouloir, mais c’est encore plus facile de se laisser complètement aller au bonheur qui la consume et fait battre son coeur à un rythme soutenu quand elle est seule avec lui, et qu’elle peut l’accueillir en le prenant dans ses bras et en pressant ses lèvres sur le coin de sa bouche, résistant à l’envie pourtant terriblement envahissante de passer la soirée avec lui dans le secret de leur chambre (elle n’aime pas le mot secret, et elle sait que Noah non plus. Mais ce n’est pas le bon moment…).

C’est pourtant le coeur léger qu’ils quittent leur chambre pour aller rejoindre Cat et Cam au lieu de rendez-vous. Après avoir été surpris par une McGo réprobatrice (et tentant vainement de garder son propre paquet de cigarettes dans son dos) derrière la serre, Obelia et Cat ont commencé à explorer un peu la forêt environnante (dans la limite des protections de l’école) à la recherche d’une enclave pour pouvoir fumer tranquillement. C’est sur une minuscule clairière dans les bois qu’ils ont au final jeté leur dévolu, utilisant la magie (surtout les Accio enthousiastes et terriblement efficaces de Cat) pour rassembler deux troncs d’arbre et les assécher, les improvisant banc de fortune.

Quand ils pénètre dans les bois, Obelia attrape les doigts de Noah. Si auparavant ce geste ne voulait rien dire, aujourd’hui il répand une nuée de papillons heureux dans sa poitrine et hisse un léger sourire sur ses lèvres, alors qu’elle se tourne pour lui jeter un regard par-dessus son épaule. “So that you don’t get lost,” précise-t-elle en le tirant à sa suite jusqu’à la petite clairière. Ils n’ont aucun mal à retrouver leurs deux amis, éclairés par un petit feu magique aux flammes chaleureuses mais inoffensives, véritable tour de force qui fait s’agrandir les yeux d’Obelia d’un air impressionné. “Nice one, Cat,” fait-elle d’un ton sincère en s’asseyant sur le tronc à côté de lui, bientôt rejointe par Noah. Ils en ont rassemblé deux l’un à côté de l’autre mais ils sont tous les quatre assis et alignés, sans se toucher mais pas trop loin non plus. Obelia fait passer son sac à dos sur ses genoux et sort le premier pack de bières, qu’elle passe à Noah, quelques boîtes de cigarettes, qu’elle passe à Cat, et un des deux sachets de weed qu’elle se penche pour donner à Cam. “That’s not your gift,” prévient-elle toutefois. “But Dennis said this was really good.” Elle n’est pas super fan de ce genre de drogues pour sa part, mais elle compte bien essayer le joyau de Dennis ce soir tout de même. “Happy birthday, Cam.” Elle lui adresse un petit sourire, maladroit mais sincère, en se redressant et se pressant contre Noah à côté d’elle, une main venant se glisser jusqu’à la sienne.

tw: drug use

”A party?” Cat avait froncé les sourcils en soufflant la fumée de sa cigarette, ses yeux noirs incrédules face à la mention d'une fête entre les lèvres d'Obelia. Une fête à la Fawkes, qui plus était – Obelia lui avait bien vite précisé que ce ne serait qu'entre eux quatre, un petit quelque chose pour souhaiter un joyeux anniversaire à Camilla. Cat avait poussé un soupir ; il n'aimait pas les fêtes, le souvenir de soirées oppressantes, dans l'appartement d'inconnus deux fois plus âgés que lui, obscur, bourdonnant d'une musique assourdissante, lui collant à l'esprit, et ne fêtait plus les anniversaires depuis longtemps. ”Alright alright, I'll come”, avait-il abdiqué, les sourcils froncés en une expression vaguement contrariée – on l'invitait rarement, et l'inconfort de sentir qu'on voulait l'inclure dans une bande d'amis se répandait insidieusement dans sa poitrine. Il n'avait jamais passé du temps avec ceux de son âge qu'à la Damocles – et de fait, jamais passé du temps avec eux de son plein gré.

Il avait fait sauter l'une des lattes du parquet situé sous son lit ; l'une des planques où il entassait précieusement les vivres qui survivaient à son appétit gargantuesque, qui déphasait encore certains de ses professeurs – et l'avait poussé, durant les premières semaines, à réclamer (racketter) la nourriture de ses plus jeunes camarades. Cat en sortit d'abord deux paquets de bonbons, considérant ses réserves en se pinçant les lèvres, avant de plonger la main pour en sortir deux autres de chips sorcières – maintenant qu'il pouvait décemment posséder quelque chose, partager ses affaires, et particulièrement le comestible, se révélait complexe, diffusant une anxiété légère dans ses veines. Paws lui en rapporterait, se rassura-t-il en glissant les paquets dans son sac, plus qu'il ne le devrait, comme d'habitude, quand il serait moins occupé, à l'Ordre, dans son crâne ; et Cat avait empoché le petit paquet emballé de papier kraft et de maladresse. Cam ne s'en formaliserait pas – du moins, il l'espérait.

Il avait attendu quelques minutes au pied du dortoir des filles, adossé au mur avec une nonchalance exagérée, les mains dans les poches, jetant des coups d'oeil peu engageants aux sorcières qui passaient devant lui (une vieille habitude devant les regards interrogateurs qu'on lui lançait en retour). Puis il se redressa en voyant Camilla, remettant en place la bandoulière de son sac, sur son épaule. ”Hey”, fit-il sobrement, avant que le silence ne retombe gauchement – ils se connaissaient peu, dans le fond, et faire la conversation  restait une capacité sociale qu'il ne possédait pas, quand bien même il avait l'impression que Camilla le comprenait, étrangement, lorsqu'elle posait sur lui ses grands yeux noirs. ”Uh, happy birthday.” Il fronça légèrement les sourcils, se demanda s'il devait la complimenter sur sa tenue (un truc qu'il avait vu, de loin, aux entrées des restaurants chics de Londres, ou à même la boutique de Hauata, lorsqu'entraient certaines clientes), et se détourna aussi sec, l'enjoignant à le suivre d'un léger hochement de tête pour lui ouvrir la voie jusqu'au bout de forêt où ils s'étaient donné rendez-vous, tous les quatre.

Ils auraient pu y aller tous ensemble – mais non, il fallait qu'Obelia les rejoigne plus tard avec Noah, le temps de récupérer ses affaires. Cat resta silencieux le temps que dura leur marche, le bruit discret des pas de Camilla lui assurant qu'elle le suivait. Dans la petite clairière qu'ils avaient rapidement aménagée, avec Obelia, Cat laissa tomber son sac, et entreprit de ramasser quelques branches d'un bois sec, à la lueur vacillante du jour qui tombait déjà, sous le couvert des arbres.

Il sentit la pression sur sa nuque, lorsqu'il sortit sa baguette, toujours sans un mot, pour la pointer en direction du petit amas de branches ; son Incendio laissait sensiblement à désirer, et il pouvait sentir les yeux de Camilla rivés sur lui. ”Incendio”, souffla-t-il avec une assurance factice, qu'il avait appris à falsifier devant le regard d'autrui ; et cette assurance explosa aussi sec lorsqu'une série d'étincelles fusèrent de sa baguette en un chuintement ridicule, à des lieues des flammes qu'il aurait voulu voir se cristalliser sous leurs yeux ébahis. ”Shit. Bloody wand.” Et tandis qu'il baissait les yeux sur sa baguette, l'unique responsable, bien évidemment, de ce fiasco, un filet de flammes embrasa soudainement le bois ; les yeux écarquillés de Cat se braquèrent sur Camilla, qu'il considéra une brève seconde. ”Cheers”, lâcha-t-il finalement, avant de s'asseoir aux côtés de la sorcière, glissant sa baguette dans son sac, avant d'en sortir, après une brève hésitation, un paquet de FizWizBiz qu'il offrit à Cam, sans un mot, encore.

Il y eut des craquements, dans les bois, et Cat redressa la nuque pour voir apparaître Obelia et Noah. ”I'm surprised you didn't get lost,” commenta-t-il en direction de la sorcière, avec qui il avait doucement pris l'habitude de se détendre, et, de fait, d'être plus bavard. “Nice one, Cat.” Doublement gênant. ”Cam's treat”, rectifia-t-il sans mentionner ses manquements magiques,. Le regard de Cat glissa sur les mains liées des deux sorciers, avant qu'il ne s'en détourne pour prendre les paquets de cigarettes qu'elle lui tendait. Des Lucky Strike et des Centaurs – des putain de cigarettes sorcières, un sésame qui tira un léger sourire à Cat. “Happy birthday, Cam.” ”Where the fuck did you get these?” demanda-t-il en montrant le paquet où gambadait un centaure à Obelia, une lueur enjouée dans les yeux ; son regard embrassa le paquet d'herbe entre les mains de Camilla, puis le visage de cette dernière, une brève seconde. ”Are you smoking just weed? We can share if you need to blend.” Et il ouvrit le paquet de cigarettes sorcières, en sortant une avant de lui en proposer, lui coulant un regard attentif, par en-dessous, avant d'offrir le paquet à Obelia et Noah.

(un)happy birthday Cam. Une feuille vierge de plus à colorer et raturer et ajouter à sa collection. Elle aime pas son anniversaire Cam. Ca n'a pas toujours été le cas, elle croit se souvenir d'une époque où l'enfant sautait dans les bras de ses parents alors qu'ils chantaient à tue-tête la traditionnelle chanson. Elle croit se souvenir, mais elle en est plus vraiment sûre. Le seul hic c'est qu'elle la reconnaît pas cette enfant. A la DHS ça allait encore, parce que même s'ils n'y avaient que ses amis pour le lui souhaiter c'était déjà beaucoup, c'était tout ce qui comptait. Et puis la fuite, et puis l'autre D. (on prononce pas son prénom) et puis ça ne signifiait plus rien du tout d'avoir un an de plus, un an de moins. C'était pas ça qui la sauverait. Ensuite, y'a eu Jax, mais Cam lui a rien dit. Rien du tout pendant longtemps. Il aurait pu partir, ça servait à rien de s'attacher. Mais tous les soirs pourtant elle se liait un peu plus à lui, tissait de ses mains un fil invisible qu'elle n'aurait aimé voir se rompre pour rien au monde. Non ça servait à rien. Elle a fini par lui dire un jour, comme ça, pour voir, pour vérifier, pour tester. C'était même avant qu'ils arrivent à l'Ordre. Il a rien dit. Peut-être ne l'avait-il pas entendu, peut-être qu'il s'en fichait, c'était pas grave, un détail. Ca lui changeait rien à elle qu'il sache ou pas.

Un anniversaire, c'est rien de plus qu'une date pour se repérer dans le brouillard. Comme un point lumineux pour souligner le temps qui passe. Le temps qui efface, le temps qui se fâche. Elle attend plus rien des autres Cam, rien. du. tout.

Pourtant, ce soir quand elle est revenue de l'Ecole pour se préparer, sur son lit l'attendait un tout petit paquet mal emballé. Elle l'a ouvert, et elle a su. Et ça signifiait toujours rien son anniversaire parce que les gens ne guérissent pas avec des cadeaux, mais c'était comme un petit point rose sur le bleu turquoise et délavé de ses émotions. Mais c'était un tout petit rien qui lui faisait beaucoup de bien. Et presque elle sourit dans ses mains, ses doigts fins caressant les lèvres immobiles. Le sourire est à l'intérieur, ne sait pas encore comment éclore. Le sourire est là, quelque part. Cam enfile un gros pull, un peu trop grand pour elle, il n'y a que dans des vêtements trop larges que la toute jeune femme a l'impression de pouvoir respirer. Ses mains disparaissent sous les manches, elle a pris des crayons et des feuilles comme toujours et descend les marches jusqu'à rejoindre l'extérieur où l'attend Cat qui s'éloigne du mur où il était adossé. Ils veulent fêter son anniversaire et elle a dit non au départ mais ils ont dit si, alors elle a dit oui. Cam le suit, reste à une distance de sécurité, c'est trois pas devant elle ou trois sur le côté, mais jamais derrière ou en retrait. "Thanks. You don't have to, you know. Birthdays are stupid." qu'elle dit de sa voix enrouée. C'est que ça pourrait être une blague après tout. On ne sait jamais, alors autant se préparer à toute éventualité. Mais il y a une étincelle au fond d'elle qui veut y croire, qui le suit sans trop se poser de questions.

Il y a bien une petite clairière et des bancs improvisés. Cat tente de faire un feu mais tout ne se passe pas comme prévu, elle le voit baisser la tête sur sa baguette - un peu renfrogné - et décide de sortir la sienne (celle que Jax lui a trouvée et qui lui répond pas toujours, qu'elle a cru devoir cacher en arrivant à l'Ordre et qu'elle garde aussi précieusement que si elle était faite en bois d'or) pour lancer à son tour l'Incendio. C'est utile dans la rue, elle connaît donc ce sort. Il la regarde les yeux écarquillés, elle cache un bout de son visage sous le col de son pull et s'installe sur le banc sans répondre.

Puis Noah et Obelia les rejoignent en se tenant par la main. Elle espère qu'ils vont pas passer la soirée à s'embrasser. Ils sont tous les quatre alignés et Cam s'éloigne un peu, sur le bord, se rapproche du coin. Son grand pull tombe sur ses mollets alors qu'elle rapproche ses jambes de son torse. C'est un peu bizarre parce que y'a rien de réglé entre eux, y'a rien de soigné, y'a cette crevasse immense qui prend tout l'espace. C'est un peu étrange parce que ça réchauffe des zones de son corps qu'elle pensait engourdies pour toujours. Obelia lui tend un paquet d'herbes, une nouvelle tache rose. Ce n'est pas son cadeau. Une autre tache. "Thanks. You didn't have to." Elle répète cette phrase encore avant d'ouvrir le paquet, de glisser son nez pour humer les notes herbacées, ferme les yeux un instant. Elle avait arrêté pendant les années avec Jax, elle en avait plus besoin pour dormir et oublier. Mais il est pas souvent là Jax, les ombres si. Elle reviennent et s'étirent, elles sont dans les petits bruits qui la font sursauter, dans les regards trop appuyés, dans ses cauchemars la nuit. Ses yeux s'ouvrent à la proposition de Cat, ses prunelles charbonneuses le fixent intensément avant que ses lippes ne lui répondent. "Sure. thanks." Cam attrape une cigarette tendue, sort une feuille, et commence à rouler, toute concentrée sur la tâche. Ce que les non fumeurs ignorent c'est que cette simple routine apporte cinquante pourcent du plaisir, l'attention, l'attente, l'excitation. Puis la première bouffée qui râcle un peu la gorge, qu'elle sent descendre à l'intérieur de son corps s'engouffrer dans ses poumons. L'étourdissement euphorique ne vient pas tout de suite surtout quand on a l'habitude de fumer comme elle y a été forcée ; mais toute la première phase est aussi importante que le reste. C'est un rituel apaisant. Au bout de trois bouffées, Cam ouvre les yeux et tend le joint à Cat, un regard interrogateur sur le visage. "We can share." En miroir. Elle n'a plus l'habitude de parler Cam, elle sait même plus comment faire en société, elle imite, elle apprend. Et pour la première fois depuis longtemps ce jour n'est pas comme tous les autres. C'est étrange, c'est bizarre, mais c'est pas désagréable pour autant.

C’était Obelia qui avait eu l’idée, Noah avait trouvé ça étrange sur le moment, puis plus tellement. A la Damocles, Noah avait toujours été conscient de la proximité de leurs anniversaires. Il y avait Camilla et Obelia quelques jours plus tard, elles faisaient partie des personnes les plus importantes de sa vie, à l’époque, et aujourd’hui encore, malgré tout. Pourtant il y avait toujours eu une sorte de distance entre elles, et maintenant entre eux tous, en réalité. Ils avaient beaucoup changé, les années pesaient lourdement sur leurs épaules, et leur vie avait été chamboulée de bien des manières, au fil du temps. Mais Obelia était Obelia, et elle était gentille et attentionnée et Noah avait accueilli l’idée de faire quelque chose, à l’ancienne, pour Camilla avec un sourire transi.

Noah l’avait rejoint dans leur chambre, après son rendez-vous avec Miss Granger (ses visions étaient toujours aussi étranges) et il n’avait pas hésité à la saluer d’un chaste baiser. C’était étrangement naturel, à quel point leur relation avait pivoté vers cette nature nouvelle, et à quel point tout semblait parfaitement à sa place, comme s’ils étaient censés être ainsi depuis toujours. Bien sûr, tout n’était pas tout rose, Obelia n’avait toujours pas rompu avec Pan et Noah avait toujours des envies de meurtre lorsqu’il le croisait au détour d’un couloir, mais il essayait de relativiser en se disant que, bientôt, tout cela changerait, qu’ils n’auraient plus à se cacher, qu’Obelia ne se sentirait plus aussi coupable (lui s’en fichait pas mal, de Pan et de ce qu’il pourrait ressentir) et que tout irait enfin pour le mieux.

Ils s’étaient dirigés vers le bois ensemble, chacun portant dans son sac de quoi se sustenter de toutes les manières possibles. Obelia lui avait pris la main lorsqu’ils s’étaient assez éloignés pour ne plus être vus, “so that you don’t get lost,” elle lui avait dit, et Noah lui avait simplement répondu d’un “of course” et d’un sourire amusé.

Une fois arrivés, Noah avait salué ses deux amis avant de s'asseoir, avant de souhaiter un joyeux anniversaire à Cam. Ils s’étaient assis rapidement au coin du feu, Noah avait sorti de son  sac les quelques sandwiches qu’il avait piqué dans les cuisines le matin même et les avait déposés sur un tronc d’arbre. Ils avaient subi la journée, mais devaient être encore mangeables. Il prit la main d’Obelia dans la sienne alors que Cat demandait où elle s’était procuré des Centaurs. “I kind of stole them, when I was on a visit with Alexis,” il répondit avant qu’elle ne puisse le faire. Noah avait pris la fâcheuse habitude de ne pas repartir les mains vides de ses visites avec la jeune femme, et il avait également pris la fâcheuse habitude de fumer, ces derniers temps. Il n’avait donc pas pu résister à l'opportunité de repartir avec un paquet d’une de ses denrées si rares à leurs yeux. ”Are you smoking just weed? We can share if you need to blend.” - “I’ll probably just steal a couple drags from her,” il répondit en lâchant la main d’Obelia pour prendre le paquet des mains de Cat, “I’m not a big fan of weed,” il expliqua rapidement. La substance rendait son esprit lent et vaseux d’une façon qui avait tendance à le mettre assez mal à l’aise. Il sortit une cigarette du paquet, tendit le reste à Obelia et alluma le cylindre à l’aide du briquet moldu qu’il gardait sur lui. “This is definitely one thing that these fuckers do better than the muggles,” il lança après avoir inspiré une première bouffée. “Anyone wants a beer?” Il demanda au groupe avant de se pencher pour ouvrir le pack qui reposait à ses pieds.

”Where the fuck did you get these? - I kind of stole them, when I was on a visit with Alexis." Obelia jette un coup d'oeil amusé à Noah, réprimant à grand mal le petit sourire tant fier que simplement heureux qu'elle lui adresse - comme à chaque fois, elle se laisse porter par le contentement naturel qu'il lui apporte, cette chaleur terriblement grisante qui s'épanouit dans sa poitrine lorsque leurs regards se croisent. "Thanks. You didn't have to." En réponse à Cam, Obelia se contente de faire un vague geste distrait de la main en se tournant vers elle. "I know." Elle hausse les épaules. Difficile de réellement définir et comprendre la relation qui les lie, toutes les deux, tous les quatre. Difficile et inutile à vrai dire, Obelia ne s'embarasse pas trop de définition avec ces gens-là - ses gens, même, ses trois compagnons d'infortune avec qui elle partage des choses auxquelles elle ne préfère même pas penser la plupart du temps.

”Are you smoking just weed? We can share if you need to blend. - Sure. thanks." Cam se met à rouler alors que Noah attrape le paquet tendu par Cat. Obelia est un peu rassurée à l'idée qu'ils mélangent, elle n'a que très moyennement envie de finir la tête à l'envers pendant toute la soirée - ils sont sensés profiter, autant qu'ils le peuvent dans leurs conditions. “I’ll probably just steal a couple drags from her. I’m not a big fan of weed.” La main d'Obelia, délaissée par Noah, vient se poser sur son genou. "I'll take care of you," minaude-t-elle à son adresse avec un sourire étincelant, attrapant une cigarette dans le paquet tendu pour la glisser entre ses lèvres, se penchant vers lui pour qu'il la lui allume. “This is definitely one thing that these fuckers do better than the muggles. - Yeah, at least it doesn't stink too much." Il y a peu de choses, pourtant, qu'elle et Noah accordent aux sorciers - et lui encore moins qu'elle. “Anyone wants a beer?” Elle hoche la tête, fait passer les cannettes aux autres. Un nuage de weed l'effleure, venant de Cat et Cam, et Obelia se surprend à sourire - un vrai sourire, allégé du poids social qu'elle ressent à la Fawkes où elle doit entretenir son image de fille énergique et presqu'insouciante, celle qui n'a jamais vécu ce qu'elle a vécu, ou alors celle qui n'y pense jamais.

Elle n'y pense jamais, et à la fois elle y pense tout le temps. Rarement consciemment, mais c'est toujours là, quelque part. Dans l'habitude de finir son assiette aussi rapidement que possible, dans les sursauts au moindre mouvement brusque, dans la méfiance naturelle envers et contre tout, contre tous surtout.
Ses yeux, qui s'étaient évadés sur la lisière des arbres, retombent sur leur feu de camp improvisé, et les visages mal éclairés de Cam, Cat et Noah. "I think we should have a toast," décide-t-elle en décapsulant sa bière, avec un grand sourire. "You don't have to say anything if you don't want to, Cam." Elle lui jette un petit regard. "But I feel like we should toast... to us. To being back together, to making it through. To being twenty-one." Elle hoche la tête, satisfaite, adresse un sourire à Cam, un clin d'oeil à Cat, et un regard tendre à Noah. "To being alive."

Cam sait pas trop comment elle se sent. N'importe qui dans sa situation devrait être heureux non ? Entourée de personnes qu'elle peut sans doute qualifier d'amis, qui ont pris du temps pour lui organiser une soirée pour son anniversaire (elle sait pas quand elle l'a fêté pour la dernière fois), qui ont pensé à elle. Mais la jeune femme est surtout mal à l'aise, elle se sent pas tellement à sa place et doit se perdre dans l'observation de la forêt qui les entoure pour retrouver de ce calme particulier qu'elle ne ressent que lorsqu'elle a l'impression de se faire minuscule petit insecte au milieu d'arbres centenaires et gigantesques.

Cam est pas heureuse. Ca fait longtemps qu'elle ne ressent plus les sensations de la joie, et que les émotions positives glissent sur sa peau comme le ferait une goutte d'eau. au moins n'a-t-elle pas pour une fois ce désagréable picottement de ses yeux secs qui la prend dès que des larmes cherchent à voir le jour sans jamais réussir à percer la barrière qui entoure son corps trop frêle, trop pâle, trop faible. Y'a quelque chose de brisé et Cam serait bien infoutue de dire si ça vient seulement d'elle ou d'autre chose.

L'herbe qui coule dans sa gorge a au moins le mérite d'atterrir rapidement dans son esprit pour remplacer le brouillard qui y subsiste par un autre tout autant anesthésiant mais bien plus cotonneux et douveteux. Elle sait que c'est une mauvaise habitude qu'elle a pris depuis qu'elle a rejoint la Fawkes ; mais c'est la seule chose qu'elle contrôle (ou presque, mais l'autre on en parle pas), et ce geste automatique de porter le joint à ses lèvres, d'en aspirer le contenu jusqu'à plus pouvoir inspirer, ça ... ça lui fait un bien fou. Ses traits d'ordinaire si gardés s'apaisent et se détendent. Les muscles de son visage se relâchent d'un coup d'un seul et on pourrait presque apercevoir l'ombre d'un sourire factice sur le visage de la sorcière. Presque. Mais pas tout à fait.

Elle les entend parler de loin, ne participe pas tellement. Après des années passées à se taire et à profiter de la compagnie silencieuse et rassurante de Jax, Cam a perdu la faculté de la conversation ; elle saurait plus par où commencer. Etrangement, personne ne lui demande rien. Et c'est assez surprenant pour être soulevé. Cam a été habituée à répondre aux demandes des autres plutôt qu'à suivre ses propres envies ; à tel point qu'elle a parfois du mal à savoir ce qu'elle souhaite réellement et encore moins à la formuler. Elle refuse cependant la bière tendue avec un petit no thanks.

"I think we should have a toast," what? no! "You don't have to say anything if you don't want to, Cam." Rassurée de voir qu'on lui demande rien, les épaules de la blonde se relâche tandis qu'elle s'enfonce un peu plus sous son énorme pull. "But I feel like we should toast... to us. To being back together, to making it through. To being twenty-one." Les mots d'Obelia résonnent en elle, "To being alive." s'accrochent à d'autres pensées plus pernicieuses qui se sont faits un nid de son esprit. Alors, elle dit pas Cam qu'elle se sent pas vivante, et qu'elle a pas l'impression d'avoir dépassé quoi que ce soit. Parce que ce qu'on dit pas aux gens c'est que c'est pas parce qu'on n'est plus avec des gens qui nous font souffrir que les démons disparaissent. Que Cam, elle a encore l'impression de devoir se battre tous les jours, contre ses cauchemars la nuit, contre ses souvenirs le jour. Et c'est pas juste. C'est franchement pas juste d'avoir son âge et d'être terrifiée à l'idée d'être touchée, d'être si jeune et de trimballer toutes ces casserolles. De pas pouvoir se détendre, se reposer et encore moins faire librement confiance.

Parce que ses mains commencent à trembler et que Cam veut pas être celle qui gâche la soirée après tout le mal que les autres se sont donnés, elle sort son calepin et les quelques crayons qu'elle a pu glâner à droite à gauche. "I'm not good with ehm toast and such, elle commence de sa voix rauque, but I'll draw this moment for you." Elle joint le geste à la parole, alternant entre coups d'oeil en direction de Noah, Obelia et Cat et coups de crayon sur la feuille blanche. Et met plein de couleurs sur la toile pour contrebalancer le gris de ses pensées. She's so far from okay and happy and grateful, but maybe one day she'll get there. En attendant, elle a ses crayons, et peut-être un peu eux aussi. C'est déjà bien plus qu'avant.