Verdandi, avec le temps, avait constitué une liste d'adresses sûres (relativement, autant que pouvaient l'être des établissements légaux sous un régime surveillant étroitement le respect des lois) : il y avait, bien sûr, les commerces côté moldu, où le pire des problèmes qu'on pouvait y rencontrer était un café à quatre livres sterling. Tout se compliquait lorsqu'on basculait du côté sorcier : les sortilèges anti-hybrides et les patrouilles de la Values Brigade était deux épineux écueils que Verdandi, en l'absence de tatouage, souhaitait sensiblement éviter de croiser. Londres constituait un véritable guêpier, et la demie-harpie n'avait d'autre choix que de se glisser au Dancing Phoenix en catimini, au même titre que tous ces hybrides qu'ils voyaient défiler sur le ring – une vie d'illégalité à laquelle elle avait été habituée dès ses treize ans, et dont elle ne pourrait jamais, quoi qu'il en soit, se dépêtrer entièrement ; c'était dans les autres villes du territoire que Verdandi avait ainsi soigneusement composé sa liste, qu'elle avait vu, au fil des années, sensiblement diminuer au fil des nouvelles lois (et de la montée discriminatoire sensible).

Rien n'était vraiment sûr, côté sorcier, à présent ; mais Verdandi avait besoin de prendre l'air, et elle n'avait su résister à l'impulsion qui l'avait poussée, dès le matin, à se tirer hors du lit douillet de Stanislav pour aller rejoindre Sonia, sur Candymaker Row. "Candy?" avait fait Sonia d'un air dubitatif quant à leur choix de destination quelques jours plus tard. "I heard they sold magic macarons over there, and I need Carrie in a good mood." "Urgh, why am I not surprised... You're lucky I'm in a good mood for tagging along all the way to bloody Edinburgh."

Il pleuvait, en cette fin de matinée, un fait que Sonia ne manqua pas de souligner, avant qu'elles ne passent du côté sorcier de la ville – l'allée était surplombée d'une protection magique invisible, sur laquelle s'écrasaient les gouttes au-dessus de leurs têtes. "There are a few shops I can't even go past, but we're fine otherwise", avait-elle commencé, avant d'entraîner Sonia dans une boutique – la première d'une longue série. Verdi passait au crible les friandises sur le comptoir avec une minutie qui lui était propre, et qui surprenait souvent, sous son apparence nonchalante et vaguement chaotique. Carrie lui avait dit de ne pas s'embarrasser de se déplacer en personne, pour ses courses – mais Carrie préférait se terrer dans son bureau, à recompter ses vinyles et ses factures. Verdandi, elle, avait besoin de respirer, hors de ce cocon douillet qui, parfois, pouvait virer à l'anxiogène.

Verdi avait finalement envoyé Sonia à la recherche des macarons dans l'une des boutiques qui lui étaient interdites, et s'était faufilée dans la boutique adjacente à l'Honeydukes original du territoire, à la devanture clinquante, où brillait en lettres d'or un « INTERDIT AUX HYBRIDES » – une biscuiterie artisanale, selon les dires de l'elfe accueillant les clients en boutique, établie depuis le dix-neuvième siècle. Et Verdandi lorgnait gentiment sur un assortiment de shortbreads, un cadeau pour Sonia et le service qu'elle lui rendait, lorsque son regard fut attirée par la silhouette massive qui se tenait au fond de la boutique.

Verdandi ignorait que l'on faisait, chez les sorciers, ce genre de modèles : grand (immense, presque deux mètres, selon le compas enfoncé dans l'oeil brillant de la demie-harpie), une carrure d'armoire magique et une mâchoire que même Lucinda aurait eu du mal à égratigner de ses uppercuts de super-vampire. Un grand dadais offert sur un plateau par le destin qui l'avait placée sur sa route – un sourire fleurit sur les lèvres de Verdandi, qui, en affectant de regarder l'impressionnant assortiment de fudge magique, se rapprocha stratégiquement de sa cible.

Elle lui jeta un coup d'oeil : il était encore mieux, de près, et Verdandi se tourna finalement vers lui (ou plutôt, leva la tête pour accrocher son regard), son sourire accroché aux lèvres. "Excuse me, would you mind grabbing me some unicorn fudge, up there ?" fit-elle en indiquant les petites licornes sucrées gambadant dans un panier qui lui était (supposément) difficilement accessible, du haut de son mètre cinquante-sept. "It's for my little sister, she won't eat anything but these." Son sourire grimpa jusque dans ses yeux, tandis qu'elle rabattait, feignant une gêne amusée, mais polie, une mèche de cheveux bouclés derrière son oreille. "I'm sorry, you must get this a lot." Et Sonia n'aurait qu'à manger des fudge en forme de licorne pour les prochaines semaines – peu importait, en dehors de cette gourmandise démesurée qu'elle avait sous les yeux.

Malachi avait toujours apprécié les sucreries, ce n'était un secret pour personne. Il était de manière générale un grand mangeur, ses assiettes étaient rendues impeccables comme si elles n'avaient pas servis et à Poudlard l'on avait beaucoup ri - un peu impressionné, un peu étonné - de voir l'adolescent enchaîner assiettes après assiettes et se resservant toujours au moins deux fois. Si Romilda ou Rafaela avaient envie de manger quelque chose entre un repas, elles n'avaient qu'à se tourner vers lui avec des yeux de biche pour la première et un sourire entendu pour la seconde et le voir ainsi sortir de ses poches des chocogrenouilles, ou tout autre paquet sucré qu'il avait entassé dans ses vêtements ce jour-là. Dans la liste des choses qu'aimait particulièrement le brun il y avait donc la lecture, les dragons, le sexe et les bonbons juste après.

Comme toute chose qu'il entreprend, l'achat de sûcrerie est fait avec une certaine nonchalance évidente et en faisant grand soin à ce qu'il met sous ses dents. Il a ses lieux de prédilection bien organisés selon ses préférences, et ses impulsions du moment et il n'a pas besoin de réfléchir à l'avance pour savoir où aller lorsque l'envie lui prend de renflouer ses placards vides. S'il ne s'occupe pas des courses quotidiennes, il en va autrement de ses petits plaisirs simples de la vie et si cela signifie faire tout le chemin jusqu'à Edimbourd dans le seul but de se réapprovisionner, ainsi soit-il. En tant que sorcier, il avait le luxe de pouvoir transplaner à sa guise et ne s'en privait que rarement.

il se promène entre les rayons, doit souvent se baisser lorsque son oeil est attiré par une nouveauté, et dans son panier l'on peut déjà trouver une bonne dizaine de boîtes en tout genre allant de simples chocoballes aux délicieuses strawcingberries qui laissaient toujours une explosion de feu d'artifice sur les papilles. Il continue sur sa lancée, bien décidé à prendre le plus de temps possible ; il n'a rien à faire après, s'ennuie déjà et veut reculer au plus loin le temps où il lui faudra trouver une nouvelle occupation. Quand soudain, une voix interrompt ses pensées - peu importantes il en convient - pour lui demander de l'aide. "Sure." Malachi se retourne un sourire placide sur les lippes en tendant à la jeune (et belle) femme le paquet demandé. "I do, but it's allright. I don't mind helping." Il se perd un instant dans la contemplation des boucles qui encadrent un si joli visage - il n'y a pas de mal à regarder ce qui est mis juste sous notre nez - avant d'ajouter un peu pensif. "If your sister likes the unicorn, you should buy her some dragon's eggs too." Puis, Malachi se retourne presque à regret vers l'étalage pour attraper une boîte au hasard et l'ajouter à son panier déjà bien rempli. Il s'attend à ce que l'inconnue s'éloigne maintenant qu'elle a obtenu ce qu'elle cherchait et s'imagine une seconde la retenir un peu plus longtemps. Mais l'idée est vite oubliée alors que le sorcier ne trouve aucune raison qui pourrait justifier d'allonger un peu plus longtemps la conversation et ne souhaitant pas passer pour un minable, le jeu n'en vaut pas la chandelle.

"Sure." Verdandi décortiqua le sourire léger qu'il afficha en lui tendant sa boîte, ses yeux bruns se posant sur elle avec un calme qui ne fit qu'attiser la curiosité de l'hybride– et la douce conviction qu'elle avait mis le doigt sur une de ces perles qu'on ne rencontrait qu'une fois tous les dix ans, au détour d'un heureux hasard. A tous les coups, il était maqué avec une sorcière bien sous tout rapport, qui allait se pendre à son bras dans les prochaines minutes. C'était un classique chez les Moldus comme chez les sorciers, que les dernières lois en vigueur n'avaient fait que renforcer de ce côté de la barrière. Casez-vous, et procréez : deux instances qui tiraient une grimace de dégoût à Verdandi, libre comme l'air, peu désireuse de se retrouver embourbée dans l'un ou dans l'autre. Que diraient Carrie et Stan, si elle venait toquer à leur porte, enceinte jusqu'aux dents ? "I do, but it's allright. I don't mind helping." "Thanks." Le regard qu'il lui accorda n'échappa pas à son œil aiguisé ; des années de séduction forcée au Tuskers lui avait appris à déceler la lueur d'intérêt chez les clients – et à la cultiver, également.

Son sourire s'étira légèrement, tandis qu'elle récupérait le butin, une lueur pétillant discrètement dans ses yeux (il ne fallait pas non plus trop en faire, quand bien même Verdandi mourrait d'envie de grimper ces quarante centimètres d'écart pour aller voir ce qui se tramait, derrière cette confiance tranquille, rassurante, presque surréelle, et cette gentillesse apparente). "If your sister likes the unicorn, you should buy her some dragon's eggs too." "Dragon's eggs," répéta-t-elle, l'image des chocolats à l'entrée ("they will turn your tongue to scales") incapable de recouvrir totalement celle du géant qui lui accorda un dernier regard, et un dernier sourire, avant de revenir aux étagères de friandises devant eux.

Verdandi mit la boîte dans son panier, détournant un instant le regard de l'imposante silhouette ; puis, après avoir entrepris de pivoter à son tour, elle s'immobilisa, pivota de nouveau vers lui, un cent quatre-vingt degrés littéral qui marquait l'hésitation sensible de l'inexpérience (Verdandi regretta un instant de ne pas avoir mis un putain de cardigan). "I'm sorry, uh, I don't usually do this, but... Are you on your own?" Ses yeux se plissèrent légèrement, au-dessus de son sourire gêné, rabattant une mèche de cheveux derrière son oreille, hésitante, incertaine – s'il n'avait personne, elle allait le bouffer. "You seem to know your candy, better than I do at least, and uh, I happen to have five sisters who begged me to bring them something..." Carrie, Yanli, Sonia, Zora, Selma – cinq sœurs d'une autre vie qui, en l'occurrence, servaient miraculeusement bien son propos, "and I can't even say what magic fudge is made of." Son mensonge fut décoré d'un rire léger, débordant de son sourire embarrassé face à cette prétendue méconnaissance en sucrerie – après des années à chercher le parfait macaron magique, Verdandi savait faire la différence entre toutes les textures, les arômes et les teintes des douceurs croisant sa route. "If you don't mind, of course." Verdandi n'avait pas besoin d'une excuse en acier de Kori, pour ce round ; lui dire à demi-mots, et avec un regard faussement réservé, qu'elle préférait sa guidance à celle des elfes de la maison, trop enthousiastes, autrement moins charmants, était parfaitement acceptable.

Malachi aurait tout le temps plus tard de regretter son inaction, de refaire dans sa tête cette simple conversation et réfléchir à ce qu'il aurait pu dire ou faire pour continuer à discuter avec la jeune femme et plus si affinités. Il y repenserait une fois ou deux, avant d'hausser une épaule métaphorique et de passer à autre chose. Des occasions pareilles, il en avait fréquemment, assez pour ne pas se morfondre - ce qui n'était de toute évidence pas dans ses habitudes - ou paniquer outre mesure face à son manque certain dans l'art subtil de la conversation.

Mais alors qu'il vient tout juste d'ajouter une nouvelle boîte à son panier et qu'il se décide à s'arrêter là pour aujourd'hui. Il a assez pour tenir un bon mois avec ces trouvailles du jour, la voix sucrée de l'inconnue perce à nouveau la musique d'ambiance qui accompagne les clients potentiels. Il se retourne de nouveau et l'écoute avec attention. "I'm on my own." Qu'il répond, le coin de ses lèvres s'étirant à peine. Peut-être n'aura-t-il pas besoin de repenser à cette rencontre manquée au final. Ce qu'il faut bien comprendre chez Kay, c'est qu'il a conscience de l'effet qu'il a sur les gens ; sa grande taille, ses muscles acquis par des heures d'entraînement (qui laissent penser qu'il pourrait se battre sans soucis et mettre K.O quelqu'un d'un coup de poing alors qu'il n'en est rien), son calme apaisant et quelque part réconfortant. Il a l'habitude maintenant d'attirer l'attention bien qu'il soit pourtant d'un naturel discret et affable. Apprécie quand tel est le cas, tant que ses parents oublient sa présence le reste du temps. Utilise souvent son imposante carrure et les bouquins qu'il trimballe avec lui quand le brun ne souhaite pas être dérangé. Souvent on le regarde, mais les personnes qui l'approchent ouvertement sont une denrée rare.

Il note donc le regard que lui envoie la jeune femme et y perçoit un intérêt comparable au sien. Toutefois, il se fait complètement prendre au jeu de l'inexpérience et de l'innocence affichée par la sorcière, bien trop habitué à l'hônneteté pour remarquer dans ses propos une quelconque mise en scène ; bien décidé à l'aider surtout si cela peut lui permettre de gagner des points ; lesquels, il l'ignore. Il passe le panier sur son autre bras en hochant de la tête. "As you wish." Phrase prononcée des centaines de fois par le Goyle et dont il pourrait en faire une catchphrase. "If your sisters like sweets with a lot of sugars I can recommend you candyflosses, it looks like cotton. If they prefer chocolates there's always the traditional chocolate frogs. And for a touch of acidity : the Lemon Ice lollypop." Malachi passe une main dans ses cheveux avec une gêne faussement affichée - il n'y a pas de honte à connaître presque tous les trésors que la boutique a à offrir - son t-shirt remonte un peu faisant découvrir un bout de sa peau bien malencontreusement. Et d'ajouter. "It's nice. what you're doing for them. they're lucky to have a sister like you." Il sourit ensuite en récupérant une des boites de sucrerie mentionnées qu'il lui tend nonchalament.

tw: objectification, lowkey yikes

"As you wish." Phrase prononcée des centaines de fois par le Goyle et dont il pourrait en faire une catchphrase. "If your sisters like sweets with a lot of sugars I can recommend you candyflosses, it looks like cotton. If they prefer chocolates there's always the traditional chocolate frogs. And for a touch of acidity : the Lemon Ice lollypop." Les sourcils de Verdandi grimpèrent sur son front à la description détaillée du catalogue du magasin, jouant sur l'embarras visible de l'inconnu ; elle dut retenir son regard de chuter sur les centimètres de peau dévoilés par le geste, et garder son apparence de fille bien éduquée.

Il n'y avait pas besoin, pour savoir qu'il était exactement son genre - immense, foutu comme ces statues en marbre immobiles aperçues côté moldu, avec, l'espérait, quelque chose d'autrement plus conséquent que les Grecs de la National Gallery entre les jambes. Si tout était aussi proportionnel, chez lui... "They love sugar, though one of them likes it sour - oh, and one of them likes strawberry-flavoured sh... stuff", se rattrapa-t-elle à temps, sa langue fourchant sur le droit chemin en retrouvant les yeux chocolat du géant. "It's nice. What you're doing for them. They're lucky to have a sister like you." Verdandi sentit une pointe de culpabilité légère presser son coeur, à la vue du sourire qu'il lui offrait, au-dessus de sa boîte de douceur ; ce n'était pas vraiment un gros mensonge, se disait-elle, pas du genre à saccager l'existence bien rangée de ce garçon adepte de sucreries. Les Warlocks étaient sa famille depuis de longues années, et elle n'avait pas d'autre choix que de mentir, encore, toujours, pour couvrir ses arrières d'hybride. Voulait-elle un tatouage de la pire couleur qui existe (le vert, cette abomination) sur la face ? Non. Voulait-elle passer sa vie dans un placard, et gâcher sa jeunesse dans la crainte alors que tant d'opportunités, aussi massives et juteuses que le sorcier sous ses yeux, ne demandaient qu'à être saisies ? Oh que non ; aussi Verdandi sourit-elle de plus belle en prenant la boîte qu'il lui tendait, avant de hausser une épaule en la déposant dans son panier, se fiant à son jugement (ou se foutant sensiblement du contenu de son panier, désormais que son objectif avait changé). "You know, we have our bad days too." La pression des doigts de Carrie sur sa gorge, le jugement silencieux de Yanli, les sifflements acerbes de Sonia, les rires dans la bouche enfumée de Zora, glaçants, d'outretombe, et les yeux plein de larmes de Nina - il y en avait à dire, chez cette fratrie recomposée et incomplète, dont l'inconnu n'avait pas besoin de connaitre les détails. C'était là l'essence de toute bonne contrefaçon : s'inspirer de faits réels et bien connus, pour mieux les transformer à sa convenance.

Ses yeux remontèrent jusqu'à lui tandis qu'elle s'appuyait légèrement au comptoir devant eux, s'appliquant à feindre un minimum d'intérêt aux friandises qu'il observait - il choisissait pour elle, après tout. "What about you? Are you shopping for anyone? Family? Girlfriend?" Ses yeux allèrent aux Chocogrenouilles en vrac devant eux, dont certaines s'étaient défigées et croassaient contre le filet de sécurité. "If you're still on your own after we're done, maybe I could buy you coffee, as a thank you." Une proposition appuyée par son sourire d'ange, et un coup d'oeil laissant vaguement transpirer son intérêt pour un tête-à-tête imminent.