Que Feodora ait accepté de l'accompagner pour la dernière journée du MILF est plutôt étonnant. Qu'en plus elle ait bien voulu amener Mikhail l'est d'autant plus: Piotr a dû contenir au fond de lui l'intense sentiment de satisfaction qui lui a étranglé la gorge lors qu'ils sont arrivés tous les trois au festival, en famille comme ils ne le font jamais. Il est bien facile d'ignorer la distance naturelle instaurée par Feodora, et tout aussi facile d'à la place se focaliser sur son fils adoptif qui, entre deux oeillades prudentes en direction de sa mère, garde ses yeux bleus grand ouvert, pour observer tout ce qui se passe autour d'eux.
Piotr est déjà venu tous les jours de la semaine, businessman véreux habitué à baigner dans les évènements mondains à la recherche de la moindre opportunité, et se comporte comme un guide enthousiaste et sûr de lui, les menant de stand en stand, offrant à chaque fois d'acheter pour Mikhail tout ce qui lui tombe dans l'oeil - et se faisant généralement rabrouer par sa femme, d'un regard ou d'une phrase venimeuse.

Une sortie en famille habituelle et appréciable, donc, qui friserait presque le normal.

"There is something I'd like you to see." Sa main vole près du bas du dos de Feodora pour la guider - sans pour autant la toucher, il n'a pas envie d'y perdre les doigts - alors qu'il les emmène au fond de l'exposition. Il a déjà acheté des billets, et en tant que sang-purs ils peuvent aisément couper la file pour ne pas avoir à attendre, et ils pénètrent ensemble dans l'une des attractions phares de l'évènèment: une reconstitution historique de Hogwarts, l'école sorcière britannique, au dix-neuvième siècle.
Piotr pousse un petit sifflement appréciateur (et très bruyant) lorsqu'il pénètre dans la Grande Salle, ignorant les regards courroucés qu'un couple leur jette, leur flegme britannique apparemment courroucé par sa présence ostentatoire. "It's no Koldovstoretz," admet-il, ses yeux se perdant un instant dans le faux firmament qui s'étend au-dessus de leurs têtes. "But you have to admit that it's pretty impressive, dorogaya." Il glisse un regard en direction de Feodora, pour tester la température (glaciale, comme toujours - le surnom, ironique de manière générale, d'autant plus à son adresse, n'aide en rien). "Little Misha is going to school soon, and it looks like we're staying here. It's about time we consider our options, as Koldovstoretz is quite far." Piotr ne serait pas allé au MILF si ce n'était pas pour faire affaires, même avec sa femme.

Pourquoi pas – c'était ce qui avait filtré de l'épaisse couche de glace, lorsque Piotr lui avait proposé de se rendre au festival. Feodora avait senti les premières miettes de l'ennui se glisser sous sa peau, au bout de longs mois à répéter un quotidien moins satisfaisant que ce qu'elle aurait pu croire, avec, notamment, l'unité tronquée des Dolohov (Dadushka et son oncle lui manquaient terriblement, un trou dans son cœur mort dont elle sentait la lourdeur sans pouvoir l'embrasser pleinement), et la présence de Piotr, depuis déjà de longues semaines, qui se révélait, elle, être moins pesante que l'absence des siens.
Au contraire : ce mari qu'elle haïssait lui rappelait la maison, une sensation de familiarité déroutante, dans ce déracinement programmé.

Ils s'étaient donc mêlés à la foule, et Feodora avait laissé à Pïotr les contacts avec son fils, les mains tendues et les regards émerveillés envers ce qui se déroulait à ses yeux d'enfant – ne franchissant jamais ses lèvres que timidement, et après un coup d'oeil à sa mère, comme pour lui demander la permission. "There is something I'd like you to see." Il y eut une vague imperceptible dans les sourcils de Feodora, les prémices d'une curiosité qui ne se formait jamais vraiment, chez elle ; elle se déroba à la proximité de la main de Piotr, dans son dos, en refermant ses doigts fins sur son bras pour l'en éloigner, coupant court aux effleurements subtils dont il pouvait faire preuve.

Les yeux de Feodora grimpèrent jusqu'au plafond magique, tandis que le sifflement de Piotr se perdait dans l'immensité de la Grande Salle. "It's no Koldovstoretz, but you have to admit that it's pretty impressive, dorogaya." Le regard de Feodora retomba le long des bougies flottantes, sur les murs décorés des blasons de ces fameuses maisons dont elle avait pu entendre parler – elle cilla légèrement, en constatant l'éclat du serpent argenté qui se lovait sous son regard, oblitérant radicalement le surnom médiocre, horripilant, que Piotr se bornait à utiliser avec elle. "Little Misha is going to school soon, and it looks like we're staying here. It's about time we consider our options, as Koldovstoretz is quite far." Il y eut un bref silence, et Feodora reporta, enfin, son regard sur son époux. "There are no options to consider", commença-t-elle de sa voix égale et lointaine, "Misha is going to Durmstrang." Comme elle, comme ses cousins et cousines, comme ses oncles, ses tantes, ses parents et leurs parents avant eux ; Koldovstoretz n'était pas digne de la pureté de leur sang, et ne formait qu'à des principes d'égalité loin des réalités de leur monde, désormais.

Et elle détourna le regard, pour revenir au serpent – égale, lointaine, éteinte. Comme d'ordinaire.

Un léger silence s'installe, durant lequel Piotr dévore sa femme du regard, arquant les sourcils à son adresse quand elle daigne enfin poser ses yeux clairs sur lui. "There are no options to consider." L'impression de parler à un mur n'est pas nouvelle, la voix détachée de sa femme non plus, et Piotr tait déjà la vague d'irritation qu'il sent monter en lui et se coincer dans son estomac. "Misha is going to Durmstrang." Piotr soupire lourdement, dramatiquement, alors que déjà elle se détourne, la conversation avortée avant même d'avoir commencé. Il étudie son profil comme si il ne le connaissait pas par coeur. Il pourrait dessiner le visage de sa femme les yeux fermés, lui semble-t-il parfois, tant il s'est abîmé dans sa contemplation sans jamais se lasser et sans la moindre honte. "Little Misha needs useful tools for his future," répond-t-il d'une voix douce. "He doesn't need your pride to get in the way of his success."

Piotr sait que Feodora ne lui donnera jamais la moindre influence sur toute décision prise à propos de la vie et de l'avenir de Misha - malgré leur mariage, elle ne l'a jamais laissé véritablement l'adopter et ne l'a jamais inclus dans sa vie, à la grande tristesse de Piotr. Il aime bien le gamin, et baisse les yeux sur lui. Mikhail est toujours en train d'observer la reconstitution d'Hogwarts autour d'eux, curieux mais n'osant pas s'éloigner de Feodora, mais malgré ses yeux bleus tournés vers le ciel, Piotr peut voir qu'il tend l'oreille. "What do you want, Misha?" Ça, au moins, aura le mérite de faire réagir sa femme. "Do you want to study in an obsolete, frighteningly cold manor among peers who will try to backstab you at every turn?" demande-t-il, en se faisant la réflexion que de toutes façons, ça ne le changerait pas trop de la résidence Dolohov. "Or do you want to learn the intricacies of magic and find out what it's like to yield real power, and make friends for life that will help you become who you're meant to be?" C'est, après tout, grâce à Koldovstoretz que Piotr s'est construit l'homme qu'il est devenu aujourd'hui.

Mikhail, bien entendu, ne répond pas et préfère lever les yeux vers sa mère comme si elle allait changer d'avis dans sa réponse, et Piotr en fait de même, souriant largement, ses yeux clairs plantés sur elle. "Don't tell your mother I said so, Misha," chuchote-t-il exaggérément fort. "But soon we will have to run very fast and very far, and Durmstrang will be where your mother's enemies will try and find us first." La question éclot dans les yeux clairs de Mikhail qui reviennent sur lui, et Piotr ajoute, d'un air conciliant: "and you know what your mother's enemies do to little boys like you." Les yeux de Mikhail s'agrandissent, et reviennent aussitôt sur sa mère, avec un vent de panique; le sourire de Piotr, quant à lui, n'a jamais été aussi brillant.

Il y eut un long soupir, bruyant, "Little Misha needs useful tools for his future. He doesn't need your pride to get in the way of his success." Les yeux glacés de Feodora revinrent se braquer sur Piotr : ce n'était pas tant la mention de cette fierté qui n'existait que par brefs éclats chez elle, des morceaux épars qui peinaient à constituer un ego assez grand pour entraver la vie de son fils, ou même pour s'y intéresser, non – Little Misha. Ce fut comme si elle avait senti, dans sa voix, que le regard de Piotr allait virer sur son fils.

Ses sourcils se froncèrent imperceptiblement, lorsque son pressentiment se réalisa sous son regard ; un froncement différent du début d'interrogation, qu'elle avait pu avoir quelques minutes plus tôt. Cette fois, c'était les prémices d'une contrariété qui ne se manifestait que rarement, chez elle – les prémices d'une alerte titillant son instinct de prédatrice, veillant sur les siens, dont Piotr s'approchait désormais à pas de loups, empiétant sur son territoire. "What do you want, Misha?" Feodora sentit ses doigts la démanger ; pour attirer Misha à elle et l'éloigner du souffle toxique de son époux, ou pour sortir sa baguette et mettre un terme à l'existence de ce dernier, elle l'ignorerait jusqu'à l'instant où elle ferait l'un ou l'autre. "Do you want to study in an obsolete, frighteningly cold manor among peers who will try to backstab you at every turn?Or do you want to learn the intricacies of magic and find out what it's like to yield real power, and make friends for life that will help you become who you're meant to be?" Elle haïssait Piotr avec une passion sans égale, déclenchant une vague de froid brûlante le long de ses entrailles, tandis que les insultes pénétraient douloureusement la première couche de glace autour d'elle.

Elle aurait dû le tuer, se rendit-elle compte alors que le faisceau de son regard revenait à elle, elle aurait dû, pour mettre fin à ces émotions pour lesquelles elle n'avait pas la place, trop humaines, trop présentes, qui, à terme, la rendraient malade. "Don't tell your mother I said so, Misha." Elle allait le tuer, répéta-t-elle en sentant la morsure lui donner la nausée. "But soon we will have to run very fast and very far, and Durmstrang will be where your mother's enemies will try and find us first. And you know what your mother's enemies do to little boys like you." "It seems your pride has blinded you, husband. You can't even tell what is a friend, and what is an enemy anymore, what's soon, and what's far either." Ses doigts vinrent trouver l'épaule de Misha, sa chaleur envoyant immanquablement de légères décharges électriques dans sa paume ; et au lieu de la fuir, comme elle le faisait si souvent, elle s'en empara en l'attirant vers elle, sa paume glissant sur la clavicule de l'enfant, en baissant les yeux sur ce dernier, sa voix adoucie de façon inquiétante. "You don't want to be a greedy little man, like him, don't you? Look, he's all alone now, with no real family." Elle jeta un bref coup d'oeil dans la direction de Piotr, sans le regarder vraiment, et se pencha légèrement vers Misha, ses longs cheveux blonds coulant comme un rideau pour les isoler ce faisant. "Soon you won't be a boy anymore, and you will be able to kill them before they kill you." Elle esquissa un léger sourire, berçant l'enfant des doux contes familiaux qu'on lui racontait depuis l'enfance : le meurtre, la fin de l'enfance, l'avenir qui s'anonçait à lui. "You're a Dolohov, and you're my son. And I'll be there, too."

"It seems your pride has blinded you, husband. You can't even tell what is a friend, and what is an enemy anymore, what's soon, and what's far either." Piotr arque les sourcils, et ne réprime pas le large sourire victorieux qui vient orner son visage en voyant sa femme céder et lui adresser la parole. Il observe, avec une plaisir tout aussi évident, Feodora attraper l'épaule de son fils, l'attirer vers elle. Se rendre compte qu'il l'atteint et sait la faire réagir, et toujours avec cette lueur mauvaise et dangereuse dans le regard, le remplit d'un plaisir vertigineux et d'une excitation sourde. Ce n'est pas tout le monde, qui peut s'arroger le privilège de pouvoir ainsi réveiller de tels sentiments et de telles réactions chez Feodora Dolohov.

Si ils font mine de parler à Mikhail, bien entendu, le couple s'adresse l'un à l'autre de la manière retorse et cruelle qui leur est propre. "You don't want to be a greedy little man, like him, don't you? Look, he's all alone now, with no real family." Le sourire de Piotr se crispe très légèrement, et une ombre passe sur son visage alors qu'il baisse un peu la tête pour les darder, agacé d'être ainsi piqué à vif. "Soon you won't be a boy anymore, and you will be able to kill them before they kill you. You're a Dolohov, and you're my son. And I'll be there, too." Le rire qui s'échappe de la gorge de Piotr attire quelques regards de la part des autres badauds visitant l'exposition, et a aussi le mérite de lui accorder l'attention de Mikhail. "And tell me, Misha, who will be there for you when her Master calls and your mother comes running like the bitch dog she is to his service?" Ses lèvres s'ourlent alors qu'il sourit, révèle ses dents blanches.

Il hausse les épaules, puis enfonce ses mains dans les poches de son pantalon, ignorant le regard de Feodora pour se focaliser sur son fils. "You can be a mama's boy forever, son, and that's fine." Le surnom fait toujours mouche, avec lui, et Piotr l'utilise avec parcimonie, détournant son regard de celui, attentif, du gamin, pour balayer la pièce. "Not everyone is strong enough to become their own person. Some people, sadly, live in the shadow of others their whole lives, whether they want it or not. You can ask your mother about that, she would know." Ses yeux passet sur Feodora sans s'arrêter, et son sourire rétrécit légèrement, presque complice, avant de brusquement se redresser en claquant des mains. "Now, who wants to look for some Hogwarts ghosts? I hear one has most of his head cut off - isn't that exciting?"

Le rire de Piotr vint désagréablement picoter ses synapses, et les yeux icerberg de Feodora remontèrent jusqu'à l'origine de cette hilarité sans joie, annonciatrice d'un conflit qu'il prenait un malin plaisir à entretenir. C'était toujours la même chose, lorsque Piotr n'obtenait pas ce qu'il souhaitait : il cherchait à planter ses crocs dans sa chair lisse et froide, à l'affût du moindre morceau à arracher, lacérer, tout pour faire prendre conscience à Feodora de son encombrante présence, et de ses plus encombrants désirs. Un homme capricieux, à l'éducation légère, constatait-elle avec la distance qui lui était propre ; et les Dolohov s'accordaient tous dans cette opinion de Piotr, qui était bien piètre à leurs yeux élitistes. "And tell me, Misha, who will be there for you when her Master calls and your mother comes running like the bitch dog she is to his service?" Un fourmillement glacial crépita à la surface de la peau de la duelliste. "Don't you dare", prévint-elle de sa voix trop posée, qui retomba sans prendre la peine de lister ce à quoi Piotr ne devait pas toucher : le Lord, l'avis de Misha sur sa mère, elle-même.

Elle n'aimait pas ce vers quoi il se dirigeait, en entraînant Misha avec lui – Misha était son fils, sa famille, l'esprit qu'elle se devait de forger, avec les siens, pour en faire le digne héritier des Dolohov. "You can be a mama's boy forever, son, and that's fine." Il y eut un pincement désagréable au coin de ses lèvres, et ses yeux étaient désormais fichés dans ceux, fuyants, de Piotr. "Not everyone is strong enough to become their own person. Some people, sadly, live in the shadow of others their whole lives, whether they want it or not. You can ask your mother about that, she would know." Il la regarda sans s'attarder, et avec ce sourire en coin qui lui était insupportable, se détourna pour enchaîner d'un ton jovial qui fut aux oreilles de la Dolohova plus dissonant, plus déclencheur que tous les cris du monde : "Now, who wants to look for some Hogwarts ghosts? I hear one has most of his head cut off - isn't that exciting?" "We'd rather see your head cut off neat", lâcha-t-elle avec une intonation à faire refroidir la banquise, et d'un geste souple et rapide, ses doigts de sa main libre encore sur l'épaule de son fils, Feodora sortit sa baguette de son étui et lança un fulgurant : "Flagellus Fulmen."

Le fouet translucide éclata sur Piotr avec une précision de chirumage ; une décharge autrement plus modérée que ce qu'elle avait pu lui lancer, par le passé, semblable aux crépitements si désagréables sous sa peau qu'avait insufflé de ses dents blanches son tendre époux.

"We'd rather see your head cut off neat." Piotr n'a pas le temps de se retourner pour expliquer à sa femme que ce n'est vraisemblablement pas quelque chose qu'elle devrait dire devant son fils, que le sortilège fuse en suivant: "Flagellus Fulmen."

Il est habitué à ce coup de fouet magique, un incontournable à la maison au moindre désaccord de la part de Feodora. En plus d'un désir certain de voir l'autre mourir, les deux époux ont aussi pris l'habitude de régler le moindre conflit à la baguette, généralement en faveur de Feodora; même si Piotr n'est pas en reste et que de longues années de pratique l'ont amené à un niveau de magie extraordinaire, il ne peut que pâlir face au talent de sa femme, peaufiné par des années de compétition et de victoires. Si bien qu'il a fini par prendre des mesures hautement nécessaires face aux coups de sang de sa femme (une expression inexacte; les appeler comme ça serait dénaturer sa nature glaciale - peu importe) et que désormais, le moindre de ses vêtements est cousu de sortilèges protecteurs, doublé de tissus magiques amortissants, brodé de runes discrètes.

Mais malgré ça, le fouet s'abat entre ses épaules avec violence et lui coupe le souffle, le déséquilibrant légèrement alors qu'il était en train de se retourner. À la base de sa nuque, Piotr sent une brûlure désagréable exploser, remontant le long de sa colonne jusqu'à son crâne et s'y fichant cruellement. Si bien que quand il achève son mouvement pour tourner les talons vers sa femme et son fils, tout sourire a quitté son visage et ses yeux clairs, normalement constamment plissés d'un rire ou pétillants au moins d'une lueur amusée, dardent Feodora d'une lueur dangereuse, qu'elle seule sait allumer dans son regard.

Inutile de parler dans ces moments-là; la baguette de Piotr apparaît dans sa main et il l'agite immédiatement en direction de sa femme. "Avada Kedavra," siffle-t-il sans hésiter, l'éclair émeraude rompant le clair-obscur de l'exposition en filant en direction de Feodora. Le sortilège est facile dévié, et vient se ficher dans l'une des grands portraits ornant un mur de la reconstitution magique d'Hogwarts; la figure peinte pousse une exclamation de surprise puis de douleur lorsque le cadre se décroche et tombe parterre dans un bruit sourd. Il pare un sort qu'elle lance, à grand mal, se redresse en sentant ses yeux le brûler comme si ils allaient se mettre à luire des flammes de son mépris pour elle - ah, si seulement il la méprisait... "Avada Kedavra," enchaîne Piotr sans attendre, même en sentant déjà sa baguette se mettre à protester, l'énergie qu'il met dans chaque sort étant bien trop grande et intense pour un petit duel sans échauffement. Le bruit du tableau et la couleur bien connue de l'Impardonnable attirent l'attention, et on se précipite déjà dans leur direction en dégainant des baguettes et en essayant de les héler; mais Piotr ne regarde que Feodora, qui n'a eu aucun mal à se défaire de son deuxième sortilège. "Haven't I shown you before what I do with hysterical girls like you, dorogaya?" demande-t-il d'une voix glaciale, ses yeux cruels posés sur elle, la dévisageant d'un air méfiant, sa baguette vibrant toujours dans sa paume. "This will be another piece of evidence for your medical records."

Enfin on les approche, et le masque revient se glisser sur son visage comme une seconde peau: il y est tellement habitué qu'il y croit lui-même parfois, s'y perd avec grand plaisir. Un sourire vient éclairer son visage et il baisse sa baguette, devinant que Feodora ne sera peut-être pas inconsciente au point d'essayer de l'étriper devant un membre de la sécurité du festival. "I sincerely apologise, sir, this is a misunderstanding and I'm embarrassed that you had to witness this little fight me and my wife just had," commence-t-il avant même qu'on ait pu lui dire quoique ce soit, enchaînant en s'approchant d'un air innocent, sa voix devenant mielleuse et aussi chaleureuse que les flammes des enfers. "...is this an Oyster Perpetual on your wrist? Well colour me impressed, I wasn't expecting to find a man of good taste here in this fine day..."

Les sorts fusèrent avec une rapidité et une précision remarquables ; des qualités que Feodora avait remarquées dès leur premier duel, à l'arrière de cette soirée, décor inoubliable de leur première rencontre. Les lueurs vertes allèrent ricocher sur les murs, déclenchant des exclamations craintives parmi les sorciers présents – mais Feodora n'avait d'yeux que pour Piotr, et sentit sa baguette vibrer entre ses doigts lorsqu'ils se retrouvèrent face à face.

Elle aurait pu, déjà, le tuer tant de fois – et pourtant Piotr respirait encore, aussi bruyamment et désagréablement que jamais, laissant une marque chaude et poisseuse à même sa chair froide. "Haven't I shown you before what I do with hysterical girls like you, dorogaya?" La piqûre désagréable du souvenir se mêla à la sensation confuse de ces semaines passées au fin fond de l'Autriche ; sans aucun doute le pire des séjours où l'avait envoyé Piotr, qui avait laissé en Feodora, sous des couches d'une enveloppe vide, une marque glaciale, une pointe de malaise remuant légèrement ses émotions stagnantes. "This will be another piece of evidence for your medical records." Et Feodora s'apprêtait à armer de nouveau son bras, quelques secondes avant un sort qu'elle aurait autrement plus douloureusement calibré que les premiers, lorsqu'un sorcier paré du badge de la sécurité, sourcils froncés, s'approcha de la scène.

Feodora abaissa sa baguette, et remit une mèche de cheveux à sa place, du bout de ses doigts stables, solides, témoignant d'un grand calme qui n'était pas tout à fait authentique. "I sincerely apologise, sir, this is a misunderstanding and I'm embarrassed that you had to witness this little fight me and my wife just had." La Russe rangea sa baguette dans son étui, rabattit prestement sa cape, et approcha de l'officier de sa démarche droite – raide, et calculée. "...is this an Oyster Perpetual on your wrist? Well colour me impressed, I wasn't expecting to find a man of good taste here in this fine day..." "Please don't mind my husband, he has never learned how to behave properly," commenta-t-elle en gardant son regard impassible sur le sorcier de la sécurité ; si Feodora n'était pas une grande bavarde, et préférait généralement laisser parler les membres de sa famille pour elle, certaines situations d'urgence la poussaient à prendre la parole d'elle-même – certaines situations où, en quelques mots, Piotr pouvait faire basculer les faits à son avantage. "I'm sorry we caused some trouble." Ses traits restaient figés, contrastant dans leur absence d'émotion avec cette rédemption à moitié sincère. "I was leaving anyway", conclut-elle en coulant un regard à son mari, esquissant, cette fois, un sourire froid, mécanique, glacé par l'onde iceberg de ses yeux clairs.

Le sorcier s'en fut après un dernier avertissement – ils étaient de Sang-Pur, et Feodora avait la marque, comme le souligna habilement son mari babilleur. "I'll leave you two to it." Son regard coula sur Misha, qui s'était rapproché d'eux, et sans un regard pour Piotr, elle se détourna des deux sorciers avec le détachement glacial qui lui était propre.