Jordan avait observé la démonstration de voltige acrobatique sur balai dans un coin de la foule. Elle n'avait jamais été particulièrement fan de sports sur balai elle-même, ses expériences d'école avec le Quodpot avaient été parfois désastreuses mais elle savait apprécier le caractère impressionnant des sports aérien et la voltige faisait partie des aspects les plus intéressants. Elle avait appris à apprécier la fabrication des balais et la technologie magique qui allait avec, grâce à Thomas et cela aurait été mentir de dire qu'elle n'était pas là essentiellement pour lui.

Elle et Ezekiel avait pris part à certains évènements du Milf, notamment une conférence que son boss avait organisée pour présenter son nouveau modèle de boule cristal et la semaine avait été bien occupée par ça et les diverses masterclass qu'il avait données. Le programme avait donc été assez chargé pour la BCBC et Jordan n'avait pas pu vraiment penser à autre chose, même si elle était hyper consciente la présence de Thomas dans les environs. La KBC avait un stand depuis le début du festival et ils avaient également co-organisé les différentes démonstrations et concours de voltige. Elle l'avait croisé plusieurs fois, sans pouvoir faire plus que le saluer de loin ou lui adresser un franc sourire. Elle en avait marre cependant, elle n'avait pas pu le voir de toute la semaine et le temps se faisait long. C'était la raison pour laquelle elle avait décidé de prendre les choses en main. Cette journée avait été moins intense que les précédentes et elle avait pu s'éclipser discrètement, pour assister à la démonstration de voltige et, surtout, espérer trouver Thomas par la suite.

La présence de Thomas dans sa vie s'était faite de façon sournoise, inattendue. Ils se connaissaient depuis sept ans maintenant et il aurait été mentir de dire que Jordan ne l'avait pas trouvé attirant dès les premières fois. Pourtant leur relation était restée platonique pendant de longues années durant lesquelles ils étaient devenus amis. Elle avait appris à chérir cette relation qu'elle n'aurait jamais pensé voir changer, et être à l'aise avec ce fait. Elle avait tendance, souvent, à chercher l'approbation des hommes qui l'entouraient, surtout ceux qui appartenaient à un certain standing et cette approbation, elle l'obtenait souvent en s'offrant à eux. Elle se doutait que ça n'était pas sain, mais c'était comme ça qu'elle avait appris à survivre. Pourtant tout était différent avec Tom, il n'avait jamais entrepris quoi que ce soit avec elle, il n'avait jamais répondu à ses avances subtilement dissimulées et leur relation était devenue amicale alors qu'elle n'avait jamais vraiment pu être amie avec un homme.

Ça n'avait pas duré. Ils étaient devenus amants, quelques années plus tard et plus rien n'avait jamais été pareil. Elle l'appréciait beaucoup avant, mais l'avoir de cette façon était incroyablement addictif, et pas seulement parce que leurs étreintes étaient mindblowing. Sa présence était précieuse, dans tous les aspects de leur relation. Et ça lui faisait terriblement peur, parce que Tom était marié, qu'elle n'avait jamais vraiment eu de relation et qu'elle sentait bien que plus le temps passait, plus son coeur s'emballait à sa présence. Elle avait essayé de se raisonner, plusieurs fois, de se dire que Tom ne voulait qu'une chose d'elle et qu'il s'en irait quand il serait lassé, ou qu'elle n'avait pas de sentiments pour lui mais juste pour ce qu'il représentait. Elle savait que c'était faux. Il n'était pas comme ça et elle aurait voulu être avec lui même s'il n'avait été personne.

Elle s'était glissée en direction du stand de la KBC après la démonstration et n'avait pas tardé à poser ses yeux sur Thomas qui était en train de discuter avec quelqu'un. Elle attendit sur le côté, assez proche pour l'entendre et assez loin pour ne pas s'immiscer dans la conversation. Elle s'approcha enfin lorsque l'homme partit pour le saluer. C'était toujours un peu étrange, lorsqu'ils étaient en public, et ça l'était encore plus vu l'importance du milf et le nombre de personnes qui y participaient. "I just saw the show, pretty impressive",  elle ne put contenir le sourire qui s'empara de son visage. "I suppose everything's going well, then?" Elle demanda, plus par politesse que par réel intérêt. Elle n'attendait pas grand chose de sa réponse, et la seule présence de Tom suffisait à la combler de joie.

Le Magic Is Legendary Festival bat son plein depuis près d’une semaine maintenant et franchement, Thomas est plus enthousiaste que jamais. Le bon côté de ne pas être le CEO de la boîte familiale, c’est qu’il n’a souvent que la moitié des obligations sociales à assurer. Il ne suit Naomi que quand elle le lui demande, ou quand son expertise est requise. Le reste du temps, il profite à 100%. Manèges, nourriture, art - il est de toutes les expériences et de toutes les discussions. Il ne compte plus le nombre de personnes qui lui étaient inconnues jusqu’alors avec qui il a discuté parfois pendant des heures sur le monde, la stimagie ou les balais. Il s’est fait plein de nouveaux contacts, et de nouveaux amis. Vraiment, c’est le top. C’est la première fois qu’il se sent aussi à l’aise dans un espace public depuis qu’il est rentré du Groenland. Il y a tant à voir, tant à apprendre, tant à découvrir! Ça le ramène quelques mois en arrière, quand il était encore au milieu de tous ces esprits brillants dans la ville la plus innovante du monde. Ça lui fait du bien, cette semaine - vraiment. Ça le réconcilie un peu avec Londres, où il ne se sent pas à sa place la majorité du temps.

Aujourd’hui, il a passé sa journée entre l’espace de spectacle - où s’est préparée la démonstration de voltige sur balai pour laquelle ils ont fait venir des sportifs de haut niveau et leurs meilleurs balais - et le stand de la KBC. Il aime bien traîner avec les autres sur le stand de l’entreprise. Là, au milieu des employés venus présenter les balais et les faire essayer aux passants, il se sent comme un poisson dans l’eau. Il discute avec tout le monde, fait des petites blagues, offre des goodies à la pelle et charme le plus de gens possible avec son sourire - tout pour faire revenir les gens. Il est très bon à ça, Thomas, et c’est aussi pour ça qu’il n’est pas CEO : il aurait été incapable d’être ferme, autoritaire ou de rester à sa place.

Ils ont été nombreux à assister à la démonstration - beaucoup plus que prévu - alors forcément, tout les membres de l’équipe sont ravis. Thomas ne sera pas là pour les débriefings, la semaine prochaine, mais il est content de savoir que personne ne se fera taper sur les doigts. Ils ont réussi à bien mettre en avant l’événement et ça a payé. Une fois l’événement terminé, il est donc de retour sur le stand de la KBC et beaucoup de gens affluent - un peu trop. Il est content quand ça se calme, et est tranquillement en train de discuter avec un des membres de l’équipe de communication quand un visage familier apparaît dans sa vision périphérique. Tout de suite des ridules joyeuses apparaissent aux coins des yeux du stimage, qui se débarrasse avec élégance de son interlocuteur pour se rapprocher de la nouvelle invitée du stand, qu’il a - il faut le dire - attendu toute la semaine. "I just saw the show, pretty impressive" Elle sourit, et le visage de Thomas se fend d’un sourire aussi. Il regarde autour d’eux, essaie de ne pas se montrer trop joyeux. Il y a quelque chose d’excitant à être aux côtés de Jordan en public. "I suppose everything's going well, then?" Il hausse les épaules. I guess. But I feel like it’s about to go even better in a second. dit-il à voix basse. Miss Abernathy! Come with me, I have a few parchments for your boss. dit-il un peu plus fort avec nonchalance, avant d’entraîner Jordan au fond du stand, où une petite pièce administrative est montée derrière des rideaux. Quand il entre, il n’y a personne - parfait. Il s’assure que le rideau retombe bien derrière Jordan et passe ses mains autour de sa taille, d’un geste devenu si naturel que n’importe qui comprendrait en une seconde ce qu’il se passe entre eux. Hi. Ils ne vont pas pouvoir rester longtemps seuls ici - un employé peut entrer d’une seconde à l’autre. I was beginning to think you were avoiding me… dit-il pour la taquiner. I was about to go around the festival looking like a sad puppy... dit-il avec une petite moue.

Jordan ne pouvait contenir le sourire qui marquait son visage. Il n’y avait vraiment rien qui ne puisse la rendre plus joyeux que la présence de Thomas à ses côtés. “I guess. But I feel like it’s about to go even better in a second.” Elle dut se mordre la lèvre tant son sourire était incontrôlable. Et elle ne put retenir un léger rire lorsque Thomas éleva la voix pour leur donner une excuse de s’éclipser. Il était adorable, et malgré l’image qu’elle aurait souhaité donner, elle ne pouvait nier que sa faiblesse résidait dans les personnes à l’image de Thomas, dans les gentils et les mignons de ce monde. Jordan acquiesça le plus sérieusement possible avant de suivre Thomas dans une pièce au fond du stand. Elle espérait qu’un jour ils n’auraient plus à se cacher, et ce désir, intense et vif, lui faisait peur et était un signe que ses sentiments pour l’homme en question étaient bien plus intenses qu’elle n’aurait pu l’imaginer.

Les mains de Thomas autour d’elle la font frémir et elle ne peut se retenir de s’approcher un peu plus, laissant ses mains se glisser autour de son cou. Elle sait que c’est risqué, qu’ils ne sont pas à l’abri d’être interrompus, mais ils peuvent bien s’accorder quelques minutes de tranquillité. “I was beginning to think you were avoiding me… I was about to go around the festival looking like a sad puppy...” Elle du détourner un instant son regard de ses yeux sombres de peur de dire quelque chose de stupide. Quand elle le regarda à nouveau, elle jugea qu’elle pouvait mettre la sécurité de côté et elle releva simplement la tête pour l’embrasser profondément. “You know I wouldn’t avoid you,” elle dit après s’être détachée de lui, how could I, when you’re always on my mind? elle pensa distraitement. “I wish we had more time,” elle soupira. Avec la préparation du milf de son côté comme de celui de Thomas, ils n’avaient pas vraiment eu le temps de se voir ces derniers temps et Jordan devait se rendre à l’évidence, Thomas lui manquait. “I want you for at least a whole twenty four hours, after this is over,” elle lança sans trop réfléchir et rougit légèrement quand elle se rendit compte de ses paroles. “Anyway,” elle essaya de changer de sujet, “Are you going to the concert on saturday?” L’avant dernier jour du festival se concluait par un spectacle d’opéra, Jordan n’en avait pas grand chose à faire, mais ce serait peut-être l’occasion de voir Thomas. “Maybe we could seat next to each other or something scandalous like that?” elle plaisanta avant d’ajouter, “or, maybe we could sneak out while everyone’s busy?” avec un air tout à fait innocent.

Il sourit comme un adolescent en la regardant détourner le regard. Qu'est-ce qu'il aime ça, quand il sent que ses mots ont réussi à avoir un impact sur elle... Ah, les petits bonheurs de la vie : ils sont là. Dans les moues de Jordan, dans les sourires qu'elle n'arrive pas à retenir, dans la petite lueur dans ses yeux... Thomas s'en amuse à chaque fois. Elle finit par lui voler un baiser à son tour, et il profite du petit picotement d'excitation qui danse dans sa poitrine. Il y a plusieurs années, il tentait encore de réprimer ce qu'elle lui faisait ressentir, mais cela fait longtemps maintenant qu'il a capitulé, alors hors de question de s'empêcher de profiter du moment. “You know I wouldn’t avoid you,” Il garde une main sur sa taille même quand elle se détache un peu, trop heureux de l'avoir avec elle pour briser le contact physique entre eux. Il profitera de chaque seconde jusqu'à ce qu'ils soient interrompus ou soient obligés de retourner à leurs occupations. “I wish we had more time,” Me too. dit-il du tac-au-tac. Évidemment, il préfèrerait parader entre les stands et aller boire des cocktails avec sa Jordan plutôt qu'avec sa femme, qu'il n'imagine de toute manière pas être le genre à aimer ce genre d'événement public. Si seulement ils pouvaient s'afficher ensemble, main dans la main. Il voudrait pouvoir montrer au monde entier qu'il a la chance d'être avec elle... Thomas soupire. Il ne perd pas espoir : un jour peut-être, tout ce gouvernement se cassera la gueule et il pourra enfin divorcer. Il faut qu'il continue à espérer, parce que l'idée de passer le restant de ses jours dans un silence de plomb avec Poppy Tsai... Hmm. Ce n'est pas spécialement réjouissant.

“I want you for at least a whole twenty four hours, after this is over,” Il hausse les sourcils et lui offre un sourire en coin. Il répondra à la requête sans la moindre retenue ou hésitation, quand il pourra dégager du temps... Maintenant qu'elle l'a dit, il ne peut qu'obéir. “Anyway, are you going to the concert on saturday?” Comme beaucoup de personnalités présentes tout au long du festival, il a été invité au spectacle prévu pour la clôture du festival. “Maybe we could seat next to each other or something scandalous like that?” Il était en train de se faire la même réflexion. Parfait. “or, maybe we could sneak out while everyone’s busy?” Miss Abernathy, what is this scandalous proposition? dit-il feignant d'être choqué. You are pure evil. Il replace une mèche derrière son oreille. It's a good thing I'm just as much a sinner as you are... admet-il. Of course, we'll find a way to seat next to each other. Heureusement pour lui, sa fortune et ses liens étroits avec la BCBC pourront jouer en sa faveur.

How are you these days? demande-t-il alors, plus sérieux. Have you at least enjoyed the festival a little bit? À défaut qu'ils puissent le faire ensemble, peut-être a-t-elle eu l'occasion de le faire avec d'autres personnages... I hope Zeke is not making you work thousands of extra hours... dit-il, conscient que l'événement doit sûrement donner lieu à des journées beaucoup trop longues et peu reposantes. Il ne voit pas de cernes ou de signe de fatigue sur son visage -- elle est toujours aussi rayonnante. Mais est-ce que c'est parce qu'il ne parvient pas à être objectif, quand il s'agit de Jordan?

“Miss Abernathy, what is this scandalous proposition? You are pure evil,” Thomas lui répondit et Jordan ne put s’empêcher de rire à ses paroles et à son air faussement choqué. “I know, I know,” elle répondit simplement. Elle ne doutait pas qu’il y avait une part de vérité dans ce qu’il disait, et surtout, que bien des personnes penseraient que Thomas pourrait faire mieux qu’elle, pourrait trouver une femme qui n’aurait pas la réputation qu’elle avait et qui serait à son niveau, comme l’était Poppy, finalement. “It's a good thing I'm just as much a sinner as you are...” Thomas était tout sauf un sinner, l’adultère mis à part évidemment, mais ça ne comptait pas vraiment, lorsque son mariage avait été fabriqué de toute pièce.  “Of course, we'll find a way to seat next to each other.” — “Good,” elle lui lança un sourire sincère en replongeant son regard dans le sien.

Elle appréciait ce genre de moments, malgré le secret et le temps qui leur manquait grandement, tout instant passé avec Thomas était précieux, à tel point qu’elle n’avait même plus le temps de réfléchir à ce que tout cela voulait dire, vraiment, et à ce qu’ils allaient devenir. Ils n’en avaient jamais sérieusement parlé, mais Jordan savait que cette relation était plus importante qu’elle ne l’aurait imaginé, que Thomas avait pris une place bien plus grande qu’elle n’aurait pu le prévoir, et que ses sentiments pour lui étaient incomparables à tout ce qu’elle avait pu ressentir auparavant.

“How are you these days? Have you at least enjoyed the festival a little bit?” il lui demanda après un instant. “I hope Zeke is not making you work thousands of extra hours…”. Jordan n’avait effectivement pas compté ses heures, ces derniers jours, Zeke non plus, évidemment, et le retour à la réalité allait surement être brutal, mais le Milf avait le mérite d’être un évènement assez intéressant, ce qui rendait toute cette affaire moins fastidieuse. “It’s okay,” elle répondit avec un sourire, “it’s a lot but … at least it’s not routine, you know?” Et ça les faisait sortir des bureaux habituels, ce qui n’était pas forcément une mauvaise chose. Elle fit glisser une de ses mains le long du bras de Thomas pour finir par attraper sa main dans la sienne. “What about you, are you having fun?” elle lui demanda avant de l’embrasser à nouveau. C’était difficile de lui résister, quand il était là, si proche, et que tous ses sens étaient centrés sur lui, et elle pensa distraitement qu’elle aurait pu ne vivre qu’ainsi, dans un monde où tout ce qu’elle pouvait voir, toucher, sentir était Thomas.

“It’s okay,” répond Jordan. “it’s a lot but … at least it’s not routine, you know?” Thomas penche la tête sur le côté. Vu comme ça, oui, en effet, ce n'est pas si terrible. Il ressent un peu la même chose, à vrai dire. Ça lui fait du bien de sortir des ateliers pour autre chose que des réunions, des sessions de réflexions avec des joueurs de Quidditch ou des soirées mondaines, maintenant qu'il y réfléchit. Il est bien plus libre que Jordan, bien évidemment, donc leurs situations ne sont pas comparables, mais il ne peut qu'acquiescer devant sa remarque. L'événement lui donne d'ailleurs davantage envie de discuter avec des sorciers qui utilisent leurs balais au quotidien. Il pense de plus en plus à assister ou à multiplier les essais avant commercialisation avec des sorciers lambda. Ce serait l'occasion de rencontrer plus de monde et de se confronter un peu plus à la réalité.

Il sent la main de la Abernathy glisser jusqu'à la sienne, et il referme ses doigts autour des siens avec tendresse. “What about you, are you having fun?” Il ferme les yeux quand elle pose de nouveau ses lèvres sur les siennes. Son visage s'illumine toujours un peu plus. Right now? Yes, a lot of fun. Mais il sait que ce n'est pas ce qu'elle voulait dire, alors il reprend, plus sérieusement : Yes, I'm having fun. But I'm exhausted at the end of each day, because I speak with too many people — I'm not used to it. admet-il. Thomas n'est pas le cliché du stimage qui préfère s'enfermer dans son bureau et a du mal à être sociable, loin de là. Il est plus sociable et avenant que la majorité de ses confrères... Mais il faut le dire : il a besoin de ces moments où il est tout seul face à ses machines et ses enchantements. I won't complain when I'll have to go back to go back to my regular tasks, even if this was fun. Heureusement que les semaines comme celle-ci sont exceptionnelles. Celle-ci, et la conférence annuelle de stimagie à The Apple lui suffisent amplement. I wish I could take you to the ghost train before this is all over... But yeah. Il hausse les épaules. Il savent bien tous les deux que c'est impossible. S'asseoir à côté lors du concert, pourquoi pas, mais une petite virée dans le train fantôme ensemble ferait forcément jaser.

I'm sorry I can't take you. dit-il en la tirant vers lui et en passant ses bras autour de son cou pour la coller contre lui. Maybe one day. Il le dit souvent. Il n'a pas encore perdu espoir, Thomas, que les choses changent, et qu'il puisse divorcer un jour. Il glisse une main dans ses cheveux et ferme les yeux. Il aimerait rester là pendant des heures. Can I do anything to help you? dit-il, revenant sur le fait qu'elle travaille comme une dingue pendant que lui passe son temps à discuter et à flâner dans le festival.

“Right now? Yes, a lot of fun” Thomas lui répondit et Jordan ne put s’empêcher de lui lancer un regard faussement blasé. Elle n’arrivait toujours pas à comprendre comment il pouvait être si incroyable, dans tous les sens du terme, et dans tous les domaines, et elle était souvent obligée de se reprendre, de se contenir, pour ne pas courir le risque de dire ou faire n’importe quoi. “Yes, I'm having fun. But I'm exhausted at the end of each day, because I speak with too many people — I'm not used to it,” il reprit et Jordan ne put que presser sa main un peu plus entre la sienne, elle comprenait le sentiment, c’était épuisant, autant physiquement que moralement. “I won't complain when I'll have to go back to go back to my regular tasks, even if this was fun,” il ajouta. “Yeah, me too,” elle répondit. C’était sans doute vrai pour la plupart des gens qui travaillaient au Milf, c’était incroyablement stimulant, mais un peu too much. Et clairement le genre de rythme qui serait impossible à tenir sur une période plus longue.
“I wish I could take you to the ghost train before this is all over... But yeah” — “Yeah,” elle murmura faiblement. Ce genre de choses n’étaient pas possibles pour eux, pas maintenant en tout cas. “I'm sorry I can't take you,” elle l’était aussi, c’était indéniable, “it’s not your fault,” mais ils n’avaient juste pas ce genre de choix, parce qu’ils vivaient dans une société qui l’avait forcé à épouser une autre, une qu’il n’avait jamais aimée, et c’était avec elle qu’il se devait d’être en public, c’était ainsi. Jordan essayait de se réconforter à l’idée qu’au moins, une fois le masque tombé, c’était vers elle qu’il revenait, inlassablement, même si leur relation n’avait pas de caractère officiel, même si elle n’avait même pas vraiment le statut de mistress, elle avait son attention, et c’était déjà bien plus que ce qu’elle aurait imaginé avoir quelques années auparavant.
Elle se laissa aller contre son torse, trouva du réconfort à son odeur si familière, “maybe one day,” il lui murmura, et Jordan se laissa y croire, espérant qu’il avait raison, qu’un jour tout changerait. “Can I do anything to help you?” Il lui demanda en glissant une main dans ses cheveux et l’esprit de Jordan était vide de toute pensée cohérente. Elle en aurait presque oublié où ils étaient, ce qu’ils faisaient et le fait qu’ils n’étaient pas seuls, tous les deux, quelque part loin où personne ne pourrait les déranger. Mais ça n’était pas la réalité, la réalité était qu’ils devraient sans doute repartir, retourner à leurs activités respectives. Elle se détacha à contre-coeur, “Walk me back to the BCBC stand?” elle lui demanda, ça n’était pas grand chose, mais c’était tout ce qu’ils pouvaient avoir.

“It’s not your fault,” Cette phrase, il l’a entendue des tas de fois, et elle est aussi sortie de sa propre bouche plein de fois. Cela fait des années maintenant qu’ils ont cette conversation en long, en large et en travers. Après des baisers, de longues journées, après avoir passé la nuit ensemble, après s’être croisés dans les couloirs de la BCBC… Les I wish I could ne se comptent même plus. Thomas sait, que dans une certaine mesure, ce n’est pas sa faute : si les choses n’étaient pas ce qu’elles étaient, il aurait déjà proposé à Jordan de vivre avec lui et, probablement, de l’épouser. Mais parfois, il pense au fait qu’il pourrait être plus courageux, et lui proposer de partir de là. Ils pourraient fuir le Royaume-Uni, se cacher quelque part et oublier tout le reste. Mais c’est un rêve, une décision qui entraîne beaucoup d’incertitudes, et le risque qu’ils soient poursuivis, le risque que cela ait des répercussions sur sa famille, l’idée qu’il ne puisse plus jamais exercer… Ça lui fait peur. Il aimerait être assez fou pour tout plaquer, mais il n’en est pas là. Et au fond, il n’est pas sûr que ça conviendrait à Jordan aussi. Il sait qu’elle a travaillé dur pour arriver là où elle en est. Ce serait un acte égoïste, peut-être, de l’arracher à tout ça.
La conclusion est toujours la même :ils sont coincés dans cette situation, et ils ne peuvent faire qu’une chose : espérer que les choses changent, espérer que le vent tourne en leur faveur. Il y croit dur comme fer, Thomas, à cette vie avec Jordan. Il l’a imaginée plus qu’il n’aimerait le reconnaître.

Il se raccroche à elle, profite de l’instant sachant qu’il va finir par leur filer entre les doigts, comme tous les autres. “Walk me back to the BCBC stand?” finit par proposer Jordan après avoir rompu leur étreinte. Thomas fait la moue, mais il ne bronche pas plus que ça : ils se sont déjà absentés un peu, il ne faudrait pas attirer trop l’attention. ”Alright. Let me just steal a kiss or two before we go.” supplie-t-il presque, en se penchant de nouveau pour poser ses lèvres sur celles de la jeune femme. Ils restent encore un peu plus longtemps de prévu, parce qu’après chaque baiser, il en veut un autre, mais la réalité est là, dehors, alors ils finissent par s’étreindre une dernière fois, il la recoiffe un peu, et ils sortent l’un après l’autre de l’arrière du stand.

Dès lors, ils redeviennent Thomas Keegan et Jordan Abernathy. Il redevient l’ingénieur principal d’une entreprise multi-millionaire, et elle redevient l’assistante brillante du créateur de la BCBC. Ils ont l’habitude, ils ont joué le jeu des tas de fois. Il essaie de ne pas trop laisser son regard s’attarder sur elle, elle lui parle avec un peu plus de distance. Ils savent, au fond. Ils savent ce qu’il en est, mais ça rend toujours Thomas un peu triste quand ils doivent jouer à ce jeu. Tranquillement, ils marchent au milieu de la foule, se font remarquer des objets sur des stands, et Thomas a l’impression que le stand de la BCBC se profile vraiment un peu trop vite. Il a envie de lui proposer de jouer  à des jeux avec lui, ils ont le droit d’être amis, après tout, ils sont même un peu collègues, techniquement, non ? Mais il y a trop de monde, partout, et cela veut dire s’engager dans des files d’attentes, et il sait que Jordan n’a pas le temps pour ça. Il se promet de l’emmener dans un festival moldu un jour, quand ils seront en congés. ”I guess this is where I leave you.” dit-il quand ils arrivent devant le stand de la BCBC. ”Thanks for visiting the KBC stand.” ajoute-t-il le plus naturellement possible, mais avec une petite lueur dans les yeux qui ne trompera pas Jordan. Il est content d’avoir pu la serrer dans ses bras. ”If you need anything… you know where to find… us.” Il n’a pas dit me< au cas où. Mais elle aura très bien compris. ”Have a nice day, miss Abernathy.” Il aimerait un miracle pour qu’elle ne lui tourne pas le dos, pour qu’elle n’ait pas à retourner tout de suite au travail… Mais il est déjà résigné, parce qu’il n’y a jamais d’échappatoire.

”Alright. Let me just steal a kiss or two before we go.” Jordan n’avait pas la force de refuser, elle n’avait pas vraiment l’envie non plus. Ils restèrent encore un moment enlacés, bien à l’abri des regards par lesquels ils seraient sans doute assaillis une fois sortis. Elle ne put s’empêcher de sourire alors que Thomas passait une main salvatrice dans ses cheveux, c’était typiquement le genre de gestes qui l’avait fait succomber à ses charmes plus qu’elle n’avait jamais succombé pour qui que ce soit.

Ils sortirent peu de temps après, traversant la foule à une distance respectable, rien qui ne puisse les incriminer, rien qui ne puisse vraiment dévoiler la nature de leur relation. Ils n’étaient à présent que des collègues de travail, des amis, peut-être, aux yeux des plus enthousiastes, mais rien de plus que cela. Ils le montraient parfaitement par la distance polie qui les séparait et par leur regards résolument fixés dans la direction dans laquelle ils se dirigeaient.

Jordan ne put que profiter trop peu des remarques de Thomas sur les différents stands, la multitude d’objets créatifs qui étaient exposés un peu partout, comme ils auraient pu le faire s’ils n’avaient été que de simples visiteurs. Ca n’était pas le cas, pourtant, ils étaient tous deux là pour des raisons précises, pour le travail, et ils se devaient de redevenir des collègues pour cette occasion.

“I guess this is where I leave you,” Thomas lui dit lorsqu’ils arrivèrent au stand de la BCBC. “Thanks for visiting the KBC stand,” il ajouta et son ton la plongea dans un certain malaise. C’était toujours difficile de revenir à la réalité, d’autant plus lorsqu’ils étaient en public et qu’ils n’avaient pas le temps de se dire au revoir convenablement. “Thanks for showing me around,” elle répondit néanmoins. “If you need anything… you know where to find… us.” - “Yes,” elle répondit avec un léger sourire. Elle savait toujours où trouver Thomas, il n’avait jamais été bien loin et il semblait à présent plus proche que jamais.

“Have a nice day, miss Abernathy,” il lui dit finalement et Jordan lui lança un sourire qu’elle essaya de garder joyeux. Elle savait qu’ils se verraient bientôt, malgré tout, mais elle aurait aimé ne jamais avoir à le laisser partir. “You too, Mister Keegan,” elle finit par répondre. Elle lui lança un dernier regard avant de rentrer dans le stand.