6 février 2007 Le briseur de sorts a prétexté ne pas être disponible, aujourd’hui, à une Lillian courroucée qu’il ait apparemment autre chose à faire de sa vie que d’enquêter sur Ur (même si, turns out que c’est exactement ce qu’il fait). L’excuse, banale, d’une rencontre familiale (turns out qu’il n’a pas vraiment tort, même s’il l’ignore tout à fait) où il prétend rechigner aller, où il doit pour une fois se montrer les bouclettes, pour faire bonne figure auprès de sa dynastie et de leurs sparages infinis.

Il n’en est rien. Il n’a parlé à personne de la véritable activité de sa journée, de ce qui le mène en Irlande du Nord (ça, au moins, c’est vrai), au coeur d’un mois de février humide et froid.
En vérité, il a honte, d’être ici.
Honte de se plier à ce qu’il considère être des balivernes, des fantasmes collectifs et autres mirages de l’esprit en détresse. De lui-même, jamais il n’aurait eu cette idée saugrenue, soit celle de visiter le mystérieux mystique Sans-Visage, dont la rumeur crée uniquement des remous colériques et moqueurs chez Ambros. C’est sa soeur, cet automne, qui lui a conseillé de rencontrer quelqu’un qui pourrait l’aider avec son problème. Qui pourrait peut-être vraiment l’aider, dans le sens magique du terme - et pas que des têtes savantes uniquement bonnes à intellectualiser des faits bien plus grands que ce qu’il imagine. Son regard incisif fixé sur sa main gauche, les lèvres serrées étroitement en une ligne mince de désapprobation.

Ça lui a pris plusieurs mois.
(il n’en a pas parlé à Lili)
Il a déjà envie de partir.

Le vent s’infiltre sous sa cape étroitement serrée, fait une misère de ses cheveux et alors qu’il arrive enfin au domicile indiqué, Ambros marque une pause. Pas parce qu’il apprécie particulièrement la température, mais parce que tant qu’il n’est pas entré… il est encore temps de partir. L’habitation est presque tristement simple, banale. Peut-être s’attendait-il à quelque chose d’extravagant, à la Xenophilius Lovegood ; ou, au contraire, à un trou à rats décrépi. Rien qui soit si normal, ni peu notable. Le village lui-même est paumé, mais pas non plus un repaire d’illuminés. Pas un endroit où, cynique, il a dit à sa soeur qu’il allait devoir trouver en tournant trois fois sa baguette dans le sens inverse des aiguilles d'une montre un soir de pleine lune en murmurant des imprécations.

Un endroit normal, pour une rencontre tout à fait normale, entre deux personnes absolument normales.

Enfin, il cogne le bois de ses jointures, annonçant sa venue (encore temps de tourner les talons). Plus nerveux et plein d’appréhension à l’idée de rencontrer Sans-Visage que d’entrer dans un tombeau millénaire inexploré. La porte s’ouvre et n’a même pas le temps de terminer de s’ouvrir, ou lui de voir qui l’ouvre, que se précipitent les mots : « Aries. J’ai envoyé un hibou. » Trop tard pour reculer. Maintenant, qu’on le fasse entrer. Pas envie qu’on sache qu’il est ici. Comme si le monde entier avait un oeil sur lui, prêt à exposer au jour la supercherie.