Rafaela n’aime pas trop jouer le jeu: elle le fait même très, très mal. Elle oublie parfois la nature de son sang, et se retrouve surprise quand elle reçoit de temps à autres des marques d’attention particulières. Cette fois, ça prend l’apparence d’une petite enveloppe rose glissée magique sous sa porte, scellée d’une élégant cercle de cire blanche. Parfumée et écrite d’une main élégante, la lettre la conjoint cordialement à joindre une bande de dindes pour déjeuner le weekend prochain: et le nom, tout en bas de la lettre, la fait frémir. Pansy Parkinson Zabini. Elle sait qui c’est, bien entendu, ayant lu pas mal de ses articles dans le Prophet. Elle n’était que quelques années au-dessus d’elle quand elles étaient à Hogwarts, et avait été préfète-en-chef: la position tant désirée de Raf. Elle la connaissait donc au moins de nom, de loin, et savait pertinemment qu’elle avait épousé Blaise Zabini il y a quelques mois seulement; sa famille n’avait pas été invitée, ce qui avait un peu agacé son père, mais ils avaient tout de même envoyé quelques cadeaux.
Zabini… Raf ne peut s’empêcher de frissonner quand elle repense à l’énigmatique homme d’affaires, charmant et terrifiant à la fois. Elle se souvient de Parkinson omme étant une jeune femme délicate, peste et franchement parfois odieuse, mais lui… Si Pansy avait la langue acérée, bien pendue et cruelle, son époux était pire, à cacher toute l’horreur dans une voix mielleuse…

Elle s’est laissée convaincre par son père d’y aller, se disant aussi que ça lui permettrait de se changer les idées. Depuis les Battues, la semaine passée, Raf ne sait pas trop ce qu’elle fait. Elle n’a pas encore tenté de contacter Elliott. Elle a peur, parce que Hawkins leur a bien dit que le sortilège protégeant l’île était terrible, et que la moindre tentative de faire fuiter les secrets de Zabini serait regrettable. Incroyablement regrettable… mortelle.
Elle n’arrive pas très bien à dormir, le soir, et elle sait que ce qu’elle a fait est horrible. Elle est fatiguée quand elle arrive dans le petit restaurant où se tiendra le déjeuner de débutantes: toutes les jeunes femmes qui y assistent, sauf Zabini bien entendu, ne sont pas encore mariées, et ont toutes un sang plus pur que pur. Raf se sent mal à l’aise dans sa robe, quelque chose qu’elle n’a plus l’habitude de porter, légèrement apprêtée quoique ce ne soit rien en comparaison à certaines autres invités. Elle se mélange à la foule sans mal malgré sa gêne manifeste, discute et rit légèrement et écoute d’un air faussement intéressé tous les gossips qu’on veut bien lui servir.
Elle aimerait bien retourner chez elle et se réfugier sous la couette…

Enfin vient le moment de s’asseoir pour manger, après avoir passé quelques minutes à attendre que Zabini les y invite. Elles prennent chacune place autour de la grande table, et Raf est soulagée de voir qu’elle est loin de la maîtresse de cérémonie - il n’y a pas d’autres mots… Leurs noms sont tous élégamment écrits sur des petits écriteaux devant leurs assiettes. “Hey,” fait-elle doucement à sa voisine, qui a l’air d’être aussi à sa place qu’elle. “Flora, is it?” Elles ont quelques années de différence mais Raf se souvient d’elle, encore une fois grâce à l’insigne de préfète qu’elle portait sur son uniforme. Elle sait aussi que sa soeur est une traîtresse, ce qui la surprend quant aux intentions de Zabini… Elle reste une Carrow. Raf se fait vaguement la réflexion qu’elles ont tous les deux des jumeaux, des traîtres… elle pense que leurs points en commun s’arrêtent plus ou moins là.
Elle prend place d’un mouvement aussi gracieux que possible (et fail sans doute misérablement) avant de se pencher un peu vers elle, se disant que même si elle n’est pas à sa place, au moins Raf a le luxe de pouvoir faire semblant mieux que, vraisemblablement, Flora qui a l’air d’être prête à se mettre debout et à s’enfuir en courant dans l’autre sens. “Is this your first lunch too?” lui murmure-t-elle du bout des lèvres, anxieuse à ce qu’on l’entende et indique à leur hôte qu’elle n’est pas aussi reconnaissante qu’elle devrait l’être pour l’invitation. “Sorry, but you look just as uncomfortable as me, and I really need some emotional support right now,” fait-elle, fidèle à elle-même, peu intéressée à l’idée de se censurer pour obéir aux normes d’une société avec laquelle elle refuse de collaborer.
Et pourtant. Raf est amèrement rappelée à ce qu’elle a fait il y a quelques jours en croisant le regard de Zabini à l’autre bout de la table, qui la regarde sans la voir. Elle se demande si elle sait à quoi s’adonne son mari, et imagine sans mal que oui. Qui pourrait penser qu’une telle cruauté se cache sous un masque d’une beauté si parfaite?

Hestia est restée longtemps perplexe devant l’invitation de Pansy Parkinson Zabini, adressée à Flora Carrow. Ce n’est pas tellement le nom, qui lui a fait bizarre : cela fait un moment maintenant qu’elle porte le nom de sa soeur comme s’il était le sien et réagit dans la demi-seconde quand on l’appelle avec celui-ci. Non, ce qui l’a interpellée, c’est qu’elle ait l’honneur de recevoir une telle invitation après ce qui est arrivé à sa famille. Elle a eu du mal à croire que Zabini l’ait ajoutée à sa liste, après que l’une des jumelles ait été déclarée traître. Hestia n’est pas bête : quand bien même les gens feignent être toujours les mêmes avec elle, il y a des murmures derrière son dos et derrière celui de son père. Ce n’est pas dans les habitudes des sorciers de sang-pur de balayer la traîtrise d’un des leurs d’un revers de main.
Le départ officiel d’Hestia Carrow a créé deux sortes de comportement chez les nobles sorciers de sang-pur : une méfiance infinie teintée de mépris, ou une compassion (feinte ou non) qui a poussé à la pitié. C’est terrible, ce qu’il vous arrive. Votre soeur jumelle, en plus de ça! Quelle horrible personne. Hestia a pris l’habitude d’ignorer les réactions négatives, et de jouer les jeunes filles tristes et trahies quand on la prend en pitié. Mais Pansy Zabini ne lui semblait pas être le genre de personne à verser dans la pitié. Elle s’attendait plutôt à être sur sa liste noire, à être exclue de toutes les petites festivités réservées aux jeunes femmes de sang-pur.
Il faut croire qu’elle s’est trompée.
Hestia s’est presque sentie soulagée. Bien sûr, le fait qu’elle soit la nièce d’Alecto et Amycus Carrow a dû pencher dans la balance… Mais elle aime à penser qu’elle a suffisamment bien joué son rôle pour qu’on l’invite parce qu’elle a su prouver qu’elle était loyale, qu’elle était dans le droit chemin malgré la traîtrise officielle de sa soeur. C’est une bonne nouvelle : c’est tout ce qu’Hestia veut. Maintenir sa position dans la société est essentiel : si elle n’y parvient pas, elle n’a plus rien à faire ici. Elle est restée pour sa soeur, parce qu’elles s’étaient fait la promesse de garder toutes leurs options ouvertes, et parce qu’elle doit continuer à glaner toutes les informations possible, juste au cas où… Alors chaque preuve qu’elle peut toujours marcher au milieu des privilégiés de la hiérarchie sorcière est une petite victoire.

Le problème majeur, maintenant, c’est faire croire qu’elle apprécie de passer tout un déjeuner entouré de jeunes filles qui réfléchissent déjà à leur mariage. Hestia n’est vraiment pas la plus grande fan de ce genre de rendez-vous. Elle s’y prêtait parfois avec enthousiasme, à l’époque, quand elle savait qu’elle allait avoir sa soeur à ses côtés toute la soirée, ou pendant tout le déjeuner. Tout était plus fun, tout était plus génial quand Flora était là. Elles pouvaient se concentrer l’une sur l’autre, montrer qu’elles s’amusaient sans faire trop d’efforts.
Mais maintenant elle est toute seule, alors c’est tout de suite plus compliqué.
Comme d’habitude, elle ne se sent pas à l’aise dans la robe qu’elle a enfilée pour l’occasion. Si ça ne tenait qu’à elle, Hestia serait venue en costume - mais les robes sont de mise pour ce genre de petite sauterie, alors elle s’est résignée. Et puis elle ne voudrait pas faire de vagues, surtout pas en volant l’attention des convives - il ne faudrait pas qu’elle se mette Zabini à dos.
Hey, Elle est plongée dans ses pensées, prête à s’asseoir à la table quand une voix fait exploser sa petite bulle. Hestia se tourne vers sa voisine, une fille dont elle ne souvient plus du nom mais qu’elle pense être plus âgée qu’elle d’un an ou deux. Flora, is it? Hestia acquiesce. Elle suit les autres et prend place à la table. Tout est très (trop) délicat, sur cette table, de la nappe à l’écriture avec laquelle leurs noms ont été notés sur le plan de table. Le plan de table ! Hestia se penche un peu en avant pour voir le nom de sa voisine. Rafaela Walsh. Ça lui dit vaguement quelque chose, mais elle a du mal à replacer, bien malgré elle. Is this your first lunch too? Hestia acquiesce de nouveau, et observe la jeune femme. Elle est vraiment très jolie. Sorry, but you look just as uncomfortable as me, and I really need some emotional support right now, La Carrow laisse enfin échapper un sourire, et même un petit rire, en entendant ces mots. I’m really trying to look comfortable, though. fait-elle avec une petite moue désespérée. Guess it’s not working. I’m very bad at this. Nouveau petit rire. Elle se penche un peu plus près de sa voisine pour s’assurer que personne d’autre ne l’entend : Isn’t this a bit… too much? Too formal? Too… Pansy? Elle hausse les sourcils et soupire. Anyway, I could use the emotional support too. Elle tend sa main vers Rafaela. Friends? suggère-t-elle avec l’air le plus avenant possible.

Rafaela s'arrache à sa contemplation de Zabini, toujours assise en tête de table, pour tourner la tête vers Flora et surprendre un léger sourire sur ses lèvres. Elle est jolie, très jolie même, et Rafaela cligne des yeux pour s'empêcher de trop la fixer. “ I’m really trying to look comfortable, though. ” Raf rougit un peu, embarrassée en se disant qu'elle a peut-être dit quelque chose de maladroit qui l'aurait mise mal à l'aise... “ Guess it’s not working. I’m very bad at this. ” Elle rigole un peu. Raf cligne des yeux, déconcertée. Quand elle se penche dans sa direction, Rafaela devient très immobile, douloureusement consciente du souffle de Flora sur sa joue, et tend l'oreille pour l'entendre. “ Isn’t this a bit… too much? Too formal? Too… Pansy? ” Elle hoche la tête en rosissant un peu, surprise mais satisfaite d'entendre que quelqu'un d'autre partage son opinion. “ Yeah... I feel like that too, ” répond-t-elle sur le ton de la confidence. Tout est tellement exagéré de ce côté-là de la société... Rafaela est de sang-pur mais elle n'a jamais eu une existence aussi lavish que celle de Zabini. Entre les vêtements artistiquement accordés aux nappes des invitées, le doré et l'argenté un peu partout, les flûtes de crystal se remplissant automatiquement une fois le fond trop vite arrivé... Raf se demande ce que Zabini penserait en la voyant se traîner les dimanches matins hors de son lit, en culotte et vieux t-shirt, les cheveux fous partant dans tous les sens...

“ Anyway, I could use the emotional support too. ” Elle tend la main dans sa direction et Rafaela la regarde d'un air surprise. “ Friends? ” Et elle sourit. Comme à l'école des wizlings, à l'époque où il ne fallait pas plus pour devenir amis, sans avoir à juger autrui. Rafaela aimerait bien retourner à cette époque... “ Yes! Friends. ” Elle s'empare de sa main et la serre rapidement. “ Wow, your hand is so soft, ” commente-t-il à haute voix, incapable d'activer ce filtre en ce instant précis. Elle relâche ses doigts et puis se focalise de nouveau sur les autres invitées, gardant un oeil au cas où la petite réception de Zabini serait en train de commencer... non, tout le monde est en train de s'asseoir et de discuter, de se complimenter semble-t-il, de s'extasier devant une nouvelle robe, une nouvelle paire de boucles d'oreille, et le reste... Rafaela aime bien les jolies robes et les jolies paires de boucles d'oreille mais elle n'aime pas les conversations superficielles et sans sens...

“ You know, the only thing I'm scared about is that this is all just a ploy for her to offer her cousins' hands in marriage, ” marmonne-t-elle du bout des lèvres en se penchant vers l'oreille de Flora. Elle sent bon. “ None of the girls here are engaged.. ” Et pourtant Merlin sait que ça ne va pas tarder. Raf grimace légèrement à cette pensée, profondément anxieuse à l'idée d'être fiancée puis mariée à un homme. Elle en frissonne même très légèrement. “ Your parents ever told you about that? ” demande-t-elle, toujours anxieuse, offrant en demi-teinte un visage vulnérable et maladroit. Elle n'a jamais pu partager ce genre de peurs avec Elliott, bien entendu, parce que quand ils étaient encore ensemble, toutes ces obligations de pureté n'existaient pas vraiment... Sa mère, évidemment, lui a raconté comment on faisait les enfants et comment les parents s'aimaient beaucoup et comment, même dans les mariages arrangés, l'amour finissait toujours par vaincre mais... mais bon, Maman elle y comprend rien, ça fait trop longtemps qu'elle n'a pas été une gamine d'une vingtaine d'années à qui son futur n'appartient pas. “ I mean, you know, getting married, having children, all that... I always thought it was a bit. You know. Too soon... ” Elle a tellement de choses à faire avant.

Elle espère que Rafaela va dire oui, parce que si elle dit non… Hestia se sentira vraiment comme une pauvre idiote. C’était un peu niais, de lui demander d’être son amie comme ça, non ? Soudain elle remet tout en question, se demande si la jeune femme en face d’elle la trouve… un peu trop gamine, un peu trop naïve. Mais heureusement, elle finit par dire : Yes! Friends. Ouf, elle est soulagée. Elle n’est pas complètement passée pour une idiote. Rafaela serre sa main et Hestia lui sourit. Wow, your hand is so soft, Les sourcils de la Carrow se haussent, tout à coup. Elle ne s’attendait clairement pas à ce genre de remarque, et elle sent qu’elle rosit un peu, alors elle secoue la tête pour cacher ses oreilles derrière ses cheveux. Elle n’a pas le droit d’être gênée par ce genre de choses : c’est un comportement normal entre deux filles, right ? Parler de la douceur de leur peau, de leurs boucles d’oreilles, de leurs bagues… « Hum.. Thank you. I moisturize... » Oh god, elle ne pouvait pas juste prendre le compliment et c’est tout ? Non, il fallait vraiment qu’elle ajoute quelque chose d’inutile comme ça ?
Hestia regarde ce qu’il se passe autour d’elles, et se rend compte que personne n’a l’air de s’intéresser à elles. Tout le monde est déjà plongé dans des conversations animées : visiblement tout le monde se connaît bien, et ceux qui ne se connaissent pas ont déjà trouvé des choses à se dire. Ça parle de robes, de la nappe. Rien de très intéressant. You know, the only thing I'm scared about is that this is all just a ploy for her to offer her cousins' hands in marriage, fait Rafaela, près de son oreille. Hestia hausse les sourcils et regarde Pansy Zabini. None of the girls here are engaged.. précise la brune et Hestia comprend, soudain. Oh. Son visage se décompose, soudain. Elle prend conscience qu’elle est peut-être tombée dans un fichu piège tendu par miss parfaite. C’était louche, tout ça, depuis le début. Your parents ever told you about that? Hestia regarde Rafaela, pas sûre de savoir de quoi elle parle. I mean, you know, getting married, having children, all that... I always thought it was a bit. You know. Too soon... La Carrow presse le tissu de la nappe entre son index et son pouce, retient une grimace. « Can’t say I don’t agree with you. » Hestia balaie de nouveau la table du regard. « Most of the girls here seem older than us. If someone has to get married… It won’t be us, right? » Elle tourne de nouveau la tête vers Rafaela. « How old are you? » Elle n’est pas sûre de la réponse. Elle sait que la jeune femme est plus âgée qu’elle, mais elle ne sait pas à quel point. « We’re way too young to have children, right? » Elle essaie clairement de se rassurer, mais n’est pas sûre que Rafaela puisse calmer ses soudaines angoisses. « I don’t even know what I want for breakfast every morning, how can they expect me to choose someone to spend my life with? » Elle grimace, et est tentée d’attraper la coupe qui lui fait face et de commencer à boire… Mais ce ne serait pas poli. Déjà qu’elle ne doit pas être la plus bienvenue ici, il faut au moins qu’elle garde ses manières. Elle serait bien plus enthousiaste si l’objet du déjeuner était de choisir la plus jolie des filles du jour et d’en faire sa nouvelle amie. Hestia regarde toutes les filles autour de la table. Bon, au moins, la plus jolie est à côté d’elle, elle peut désormais l’assurer sans hésitation. Toutes les autres ont des airs qui lui déplaisent sur le visage, des sourires étranges, trop fabriqués. Elle peut dire sans même leur parler que la majorité des filles ici sont des pestes. Mais Rafaela, elle, elle est jolie parce qu’elle semble réelle.

Rafaela ignore ce qu'il y a de si sensuel au mot moisturize mais quand Flora le prononce, elle ne peut pas s'empêcher de rougir de plus belle — à croire qu'elle soit calibrée pour rester aussi rouge vif que possible quand elle est si bien accompagnée et entourée. Si la Carrow est un peu gênée, elle n'essaye pourtant pas de se soustraire à la conversation que lui impose Rafaela. Cette dernière espère sincèrement qu'elle ne le fait pas uniquement par politesse... « Can’t say I don’t agree with you. » Petit soupir de soulagement, peut-être, à trouver quelqu'un comme elle, surtout près d'elle, aujourd'hui. « Most of the girls here seem older than us. If someone has to get married… It won’t be us, right? » Flora semble avoir besoin d'être rassurée tout autant qu'elle, c'est déjà ça. Voire plus. « How old are you? — I'm twenty-four. ” Elle ne lui retourne pas la question, puisqu'elle se souvient qu'elle était trois années sous elle à Hogwarts. Elle a appris qu'elle était devenue préfète... à moins que ça ait été sa soeur Hestia? Rafaela doute maintenant. « We’re way too young to have children, right? » Raf s'étouffe sur sa propre salive en l'entendant. Elle imagine que, techniquement, non... mais la simple idée d'être enceinte... de porter un enfant... de lui donner naissance... elle s'en sentirait presque malade. Elle a encore tellement de choses à faire et la dernière chose qu'elle désire, c'est reproduire les mêmes erreurs que sa mère.

Et puis surtout, elle ne veut pas de mari... « I don’t even know what I want for breakfast every morning, how can they expect me to choose someone to spend my life with? » Flora grimace et Rafaela rit légèrement, embarrassée quand elle renifle un peu trop fort et que sa voisine de table lui jette un regard dégoûté, cachant sa honte derrière une main hâtivement levée vers son visage. “ Sorry. ” Et puis très vite, pour noyer le poisson: “ Me too. I mean, me neither. I mean, I feel the same... ” Elle grimace, hésite, se mord la lèvre. Quand elle ouvre la bouche pour parler de nouveau, Pansy s'éclaircit la gorge et se lève. Aussitôt, un silence presque pesant tombe sur la petite assemblée et toutes les têtes se tournent vers elle. Rafaela peut voir sur son visage combien elle apprécie leur dévotion et leur admiration... elle imagine que ce doit être intoxicant, jouissif même. Elle-même se retrouverait sûrement à balbutier, à rougir et à dire des conneries. Zabini, quant à elle, s'élance dans un discours rapide mais fleuri, les remerciant de leurs venues et expliquant rapidement qu'elles sont la génération de demain et qu'elles se doivent de construire d'ores et déjà des liens forts, bla bla bla, on ne sait pas de quoi demain sera fait, bla bla bla, elles sont une sisterhood de purebloods, okay okay okay, et bien entendu elle est là pour chacune d'entre elles donc si jamais elles ont une question par rapport au mariage ou autre, qu'elles n'hésitent pas à venir la voir...

Heureusement, la nourriture est servie après cela. Pas besoin de commander, Zabini a tout prévu. Rafaela regarde la minuscule portion de saumon fumée qui trône désormais devant elle et sait déjà qu'elle fera un arrêt au McDonald's moldu pas loin de chez elle avant de rentrer... Au moins, elle peut sans trop s'en vouloir tendre la main et attraper le verre de vin blanc pour en boire une longue gorgée.
Les conversations reprennent peu à peu et, triturant du bout de la fourchette les deux bouchées de saumon qui l'attendent, Rafaela fait la moue en se penchant vers Flora. “ I think she wants to starve us out, ” lui dit-elle d'un ton sérieux. Toujours penchée vers elle, elle observe d'un oeil curieux les assiettes des autres. Tout le monde triture, personne ne mange. Pansy n'a même pas touché à sa fourchette. “ Do you think the first one to eat will be doomed to a life of being Pansy Zabini's archnemesis? I could see it happen... ”

Me too. I mean, me neither. I mean, I feel the same... Hestia soupire légèrement. Elles doivent bien ne pas être les seules, pas vrai ? Il est impossible que toutes ces filles, autour d’elles, aspirent déjà au mariage, à construire une famille ? Elle ne doute pas que certaines ont été élevées dans l’idée que se marier est la seule manière pour elles de s’élever, de réellement devenir quelqu’un. Même aujourd’hui, beaucoup de familles de sang-pur inculquent ça à leurs filles, ce qui semble complètement absurde et bien évidemment, la met en colère bien souvent.
Elle n’a même pas encore ouvert la bouche de nouveau que sa conversation avec Rafaela est interrompue par leur hôte du jour, qui se lève pour un discours attendu. Il faut le reconnaître, elle est douée pour ça, Pansy Zabini. On dirait qu’elle est née pour ce genre de mascarades. Hestia n’est pas vraiment jalouse - elle n’aimerait certainement pas être Pansy - mais elle lui envie la confiance avec laquelle elle parle, la confiance qu’elle a en le fait que son auditoire sera de son côté. Hestia n’aurait jamais le courage d’organiser une rencontre comme celle-ci : elle ne saurait pas accueillir les gens comme il le faudrait, et elle serait mal à l’aise à l’idée que ses invités ne soient là que par obligation.
Elle écoute attentivement le discours, et se montre la plus enthousiaste possible, mais comment peut-elle sincèrement se réjouir à l’idée de construire des liens forts, de développer une sororité avec toutes ces filles quand la seule soeur dont elle ait besoin n’est pas à ses côtés ? Hestia n’a pas envie de se faire de nouvelles amies, surtout si elles sont aussi hypocrites que celles qui se trouvent autour de cette table - à l’exception de Rafaela, bien entendu. Hestia est toujours mal à l’aise également à l’idée qu’elles puissent former un tout, toutes ces filles. Quand bien même elles montrent une image plutôt homogène aujourd’hui… Elles sont toutes si différentes, n’ont pas toutes grandi dans la même culture. Parce qu’elles sont toutes sang-pures, elles devraient toutes bien s’entendre ? Quelle absurdité. Hestia est à peu près sûre qu’elle s’entendait mieux avec Cara, à l’Ordre, qu’avec toutes ces filles réunies.

Hestia essaie de ne pas se défaire de son faux sourire enthousiaste quand la nourriture est enfin servie, et que ce qui apparaît dans son assiette lui donne envie de grimacer. Elle observe le saumon fumé mais ne le touche pas, et tandis que Rafaela saisit son verre de vin, Hestia prend son verre d’eau dans les mains, snobant le verre d’alcool qu’on lui a imposé alors qu’elle ne boit plus. I think she wants to starve us out, fait Rafaela quand il semble enfin acceptable de parler de nouveau. Hestia retrouve tout à coup un sourire. Do you think the first one to eat will be doomed to a life of being Pansy Zabini's archnemesis? I could see it happen... La Carrow repose son verre et soupire. ”Definitely.” Elle tourne un peu son assiette mais ne touche toujours pas à sa fourchette. ”And it will not be me. I have no desire to be this girl’s enemy. I don’t want my life to be a nightmare” dit-elle très bas, avant de se rendre compte qu’elle y est peut-être allée un peu fort. Rafaela a l’air plutôt comme elle, mais elle aura peut-être peu apprécié cette remarque un peu extrême sur leur hôte. Elle cherche dans son regard une approbation, quelque chose pour la rassurer. Si ces mots reviennent aux oreilles de la Zabini, elle est cuite. Heureusement, Rafaela n’a pas l’air bien choquée. ”I’m so hungry… I lowkey want to cry.” admet-elle en jetant un regard toujours plus désespéré. ”Guess she’s making sure everyone will fit in a wedding dress by the end of the semester.” ajoute-t-elle avec une grimace.

”Definitely.” Raf hoche la tête, un peu désespérée par la situation - elle a faim, merde! Mais... ”And it will not be me. I have no desire to be this girl’s enemy. I don’t want my life to be a nightmare.” Tout comme Flora, elle n'a aucune envie de finir sur le tableau de chasse de la nouvelle Zabini. Elle connait bien trop le pouvoir et l'influence de son mari, elle sait aussi qu'elle en a... Raf se demande si c'est épuisant, et quels sacrifices elle a dû faire pour arriver là où elle en est aujourd'hui. Elle se dit surtout qu'elle préférerait ne pas savoir...
C'est tellement libérateur, de se retrouver assise à côté de quelqu'un qui la comprend, d'une certaine manière, ou du moins qui partage sa vision des choses sur certains sujets. Rafaela a parfois l'impression d'évoluer dans un monde où tout le monde pense et fait les mêmes choses sans même s'arrêter et discuter. Toutes les opinions sont les mêmes, les conversations similaires se répètent, les avis ne divergent jamais. Plusieurs fois, Raf s'est fait la réflexion qu'elle serait bien plus heureuse avec les Avengers, avec Elliott. Sauf qu'elle n'est pas courageuse à ce point, malgré la maison dans laquelle elle s'est retrouvée à Hogwarts... et, surtout, elle a peur des conséquences que cela pourrait avoir sur ses parents.

Rafaela pince des lèvres en baissant de nouveau les yeux vers son assiette, son esprit à des centaines de kilomètres de là, avec Elliott. Son frère lui manque. Ils avaient toujours le chic pour se foutre de la gueule des autres sang-purs péteux, à Hogwarts... ”I’m so hungry… I lowkey want to cry. - Aww," sourit Rafaela légèrement en tournant de nouveau les yeux vers Flora, attendrie, inquiète aussi et désirant vérifier si elle est sérieuse. ”Guess she’s making sure everyone will fit in a wedding dress by the end of the semester.” La grimace sur le visage de Flora trouve son écho sur celui de Rafaela. "Yikes," commente-t-elle sans réfléchir, l'expression pas très dignifiée (ni très sorcière) lui échappant sans y penser. Elle oublie parfois que la plupart des sorciers ne sont pas habitués à la culture moldue et leurs expressions parfois surprenantes.
Elle est tellement distraite qu'elle ne s'en rend pas compte, aspirée plutôt par la vision d'une fille assise à un autre coin de la table qui s'empare de sa fourchette... et, après avoir récupéré un peu du saumon, la lève jusqu'à sa bouche.
Plusieurs filles qui ont vu la même chose se tournent d'un même mouvement vers Pansy qui foudroie la coupable du regard. Mais il n'y a plus rien à faire maintenant: tout le monde se met à manger, les couverts trouvant enfin leur utilité.

"There you go!" fait-elle d'un ton encourageant à Flora qui se plaignait d'avoir faim. Elle-même s'offre une bouchée avec entrain. "Damn, this is good," murmure-t-elle. Autant la compagnie de Pansy est désagréable, autant elle ne lèse pas sur les moyens. Ceci dit, vu son mari et sa propre famille, elle peut se le permettre dix fois... "All things come to those who wait," fait-elle d'un ton intellectuel à Flora avec un léger sourire. "I wouldn't like to be this girl although she's now my hero." Elle ignore même jusqu'à son nom... Raf cesse de la regarder pour vouer son attention à Flora. "So, uh, you work at the Ministry, right?" Ou est-ce sa soeur? Elle ne se souvient plus. "Do you like it here?" lui demande-t-elle poliment.