PHAR#3 | Back again.

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studio rosier — oct. 2006

Did I ever leave you, was I ever able ? Or are we still leaning Across the old table ? Was it ever settled ? Was it ever over ? And is it still raining back in September ?

Jack a eu le poste.
C’est absurde, sans aucun sens, mais il est danseur pour les Rosier. Pour Rosier. Et son frère, aussi, mais Jack oublie trop souvent Basil pour vraiment le prendre en compte. Il a les jambes qui couinent et tremblent dès qu’il y pense. Rosier s’est même pas présenté aux sélections ? Il s’en fout ? Il est malade ? C’est à cause de lui, qu’il va pas bien ? C’est ridicule de se dire mais il avait vraiment pas l’air en forme, en quittant l’appart de Jack. Faut dire, qu’on se fait cracher et marcher dessus par le mec que tu essayes de récupérer… Merde, voilà qu’il y repense et regretterait presque.
Rosier connard, Rosier enculé, Rosier va te faire foutre.
Rosier patron, aussi.
C’était pas censé arriver, pas censé se passer comme ça. Rosier était censé se pointer à ses putains de sélections de merde ! Il était censé voir sa gueule, s’étouffer dans sa propre indignation, s’offenser de son audace, avec son stupide accent anglais de merde, et le renvoyer paître après avoir encore essayé de le récupérer. C’était juste pour lui prouver que Jack était parfaitement capable de devenir danseur sans lui.
Sauf que Jack s’est jamais dit qu’il en serait véritablement capable.
Et c’est con, quand même, vachement con de réussir pile quand on se dit que ça arrivera pas.
Merde, au final il a pas dit de connerie à Valeria.

Sauf que c’est tôt, leur merde. Genre beaucoup trop tôt. Genre dix heures du matin. Et Martin, contrairement à cet enfoiré de petit con de fils à sa maman de Rosier, il reste dormir avec Jack. Il prend toute la place, d’ailleurs, et le matin il le fait chier pour baiser avant de partir. Avant de bouffer, même. (Souvent, Jack concilie les deux pour optimiser.) Et, bon, quand on a deux taffs, et qu’un des taffs c’est de satisfaire Martin, les retards sont inévitables.
Surtout quand on a pas du tout, mais alors pas du tout envie d’être là.
C’est en retard que Jack fait son entrée dans le studio, et se prend directement une remarque de Basil qui, du haut de ses vingt-deux ans, estime que son art vaut la peine d’arriver aux aurores, et avec une demi-heure d’avance s’il vous plait. Les yeux baissés, l’air contrit, en tenue de danse de bouffon que Jo a pas intérêt à voir, l’irlandais se cache dans la foule. Il sue, il sue comme un porc mais c’est pas à cause du retard. Il fixe ses pieds alors que Basil continue de donner des instructions et d’expliquer l’important absolument capitale de leur travail. On dirait qu’ils vont sauver le monde sorcier de la ruine et de la décadence. Quand Jack sait très bien qu’il y a un des frères qui fait partie des causes de cette ruine et de cette décadence.
C’est après que Basil lui ait demandé, spécifiquement, de « relever la tête quand je vous parle » qu’il relève finalement le nez. Voit, d’abord, le Rosier avec lequel il n’a pas baisé pendant presque deux ans. Puis celui qu’il suçait encore un mois plus tard. Et il a l’air d’avoir vu un fantôme, le Rosier. Un fantôme avec la gueule de Jack, sans aucun doute.
Il est dans la merde, se dit-il sans comprendre vraiment pourquoi. Il s’en fout, de ce taff. Il veut pas rester. Il veut démissionner, même, à la gueule de ce bâtard. C’est pas comme si il était vraiment là pour devenir une gazelle pour le duo des bouffons coréens. Jack il s’en fout, il s’en bat les couilles. Alors, vraiment, y a aucune raison pour avoir aussi mal aux tripes.

Et là, finalement, il croit être libéré. Rosier va retourner dans son bureau, Basil va les guider, ils vont faire des exos, s’entraîner… quoi que soit le truc qu’ils sont censés faire.
Sauf que là, alors que tout devrait prendre fin, tout commence.
Rosier le convoque dans son bureau.
Là, définitivement, Jack a l’impression de plus avoir une goutte de sang dans son corps. Il hoche la tête, sans un mot, sans savoir d’où vient cette gêne, cette angoisse. Comme s’il avait fait une connerie, l’avait trahi, ou qu’en sait-il encore…

Quand la porte du bureau de Rosier se referme derrière lui, Jack lâche aussitôt : « T’as pas le droit de me virer, j’ai rien fait de mal ! » Comme s’il était de retour dans le bureau de Snape à justifier pourquoi il ne méritait pas trois semaines de retenues. Sauf que là, c’est Rosier. Et qu’il se justifie pour un truc qu’il n’est pas censé vouloir.
Alors même que c’est une des rares choses qui lui a jamais donné l’impression de faire sens.

Caesar est maussade, ces jours-ci. Il fait la moue, il traîne un peu dans le lit, il grogne quand Basil lui lance un oreiller à la tête pour le forcer à se lever. Il aime leur pièce, c'est génial, inspirant, motivant et tout le toutim mais... il veut juste se reposer, et se laisser aller à sa pauvre petite vie de riche sang-pur qui est très difficile quand il n'a pas le droit d'avoir tout ce qu'il veut.
Alors quand Basil le tire aux aurores jusqu'au studio, pour rencontrer les danseurs (qu'il a sélectionné tout seul, lui rappelle-t-il constamment), Caesar a juste envie de lui arracher les yeux mais à la place, il boit du thé en observant les danseurs s'étirer et discuter d'un air gêné, à mi-voix, sous les regards calculateurs des deux jumeaux.
Basil est en train de regarder ses notes, Caesar a du mal à garder les yeux ouverts, mais il parvient très vite à la même conclusion que son frère: “ il manque quelqu'un. ”
Le quelqu'un en question est en retard; un certain John, d'après la liste que Basil a à la main. Enfin quelqu'un de censé dans ce monde de fous... Caesar a envie de vomir quand il voit des danseurs se détendre, s'étirer, danser un peu pour se réchauffer, parfaitement réveillés. Quant à lui, il va se resservir une autre tasse de thé, grommelant tout du long. Une porte s'ouvre, une remarque de Basil fuse, Caesar ajoute un sucre à son thé alors que Jelabi pousse un petit piaillement qui a le mérite de lui mettre la puce à l'oreille. Mais, comme à chaque fois qu'il est bougon, Caesar ignore son animal-lié et il se retourne pour rejoindre son frère et s'arrête net en croisant le regard eu fameux John qui a eu le malheur d'être en retard.

Ça aurait été cliché que la tasse de thé tombe et explose sur le sol et pourtant, ça aurait été parfait pour faire une jolie métaphore de ce qui est en train de se passer dans sa tête en cet instant précis.
Phoebus, Logan... John... John? Il est là. Juste là, sous ses yeux. Il n'est pas venu le hanter, ou lui cracher dessus, ou le frapper. Non, il porte un justaucorps noir et des petits chaussons de danse, et il est rasé de près, et putain qu'il est b--

Basil ne remarque pas l'émoi de son frère, ni de Jelabi qui essaye de se faire aussi petit que possible en se cachant sous une table, et commence déjà le long et douloureux procédé de se faire obéir par une quinzaine de danseurs qui ne se considèrent pas assez payés pour obéir au doigt et à l'oeil de deux artistes privilégiés et un peu trop jeunes... Caesar est si choqué qu'il ne réagit pas pendant de longues secondes avant de dire, d'une voix un peu trop forte et presque légèrement stridente: “ dans mon bureau. ” Et tout le monde de le regarder, surtout Basil, qui fronce les sourcils en croisant son regard. “ Lui, ” dit-il finalement, en pointant la pute du doigt. “ Dans mon bureau. ”
Il faut monter quelques escaliers, en métal et qui grincent, pour accéder aux bureaux et studios privés des jumeaux qui surplombent la salle de répétition. Conscient du regard surpris (et suspicieux) de son frère sur lui, Caesar ne dit rien, regarde le bout de ses souliers jusqu'à ce que la porte se referme sur eux. Il est à peu près sûr que Basil va penser qu'il cherche juste à baiser l'un de leurs employés. Aha.

« T’as pas le droit de me virer, j’ai rien fait de mal ! » Même pas le temps de respirer que Pho-Lo-Jo- la pute lui coupe le souffle. Caesar brandit sa baguette, l'agite: “ Silencio! ” Et toujours cette voix stridente, paniquée, qui part dans les aigus comme pas possible quand il a peur. “ J'ai le droit! ” rétorque-t-il, la voix toujours si aiguë. Il a laissé l'autre rentrer en premier et il se tient désormais contre la porte, la main qui ne tient pas la baguette serrée autour de la poignée. Il empêche à la fois la pute de s'enfuir, mais il est aussi dans un endroit stratégique si il doit s'enfuir en courant si l'autre le menace de ses poings ou pire, de sa salive. “ Je... tu... enfin... ” Ses doigts lui feraient presque mal tant ils sont serrés autour de la poignée de la porte dans une position inconfortable. “ John? ” finit-il par presque crier. “ John? Putain de- John?! Et tu as le nerf- l'audace- le toupet de venir ici? Que-quoi-'fin-je-- ” Il en est à court de mots. Blême, frissonnant, apeuré, il a au moins la chance de désormais être bien réveillé. “ Comment oses-tu? ” finit-il ensuite par accuser. Caesar aime bien ses deux vies, et les voir ainsi entrer en collision n'est pas du tout à son goût.