Le local est petit, mais les membres ne sont pas si nombreux que cela, donc ça ne pose pas de problème et ils ont toujours des chaises en trop, au cas où. Un jour peut-être qu'ils auront droit à quelque chose de plus grand, mais au moins ils ont un lieu où se réunir et discuter et échanger et puis c'est propre et c'est dans le Londres sorcier et non moldu, ça leur donne l'impression d'avoir leur place finalement. Catherine aime bien les réunions des Mudbloods for the Lord. Une fois ou deux, c'est vrai, ils ont trouvé leur local un peu désacralisé. Une fois c'était un rat tué en plein milieu de la pièce ; on aurait pu penser à un simple accident, si en lettres rouges, au dessus du cadavre n'était pas écrit : you are all : - Des rats, donc. Une autre fois la porte avait juste été recouverte d'affiches qui, en lettres de feu, les accusaient tous d'être des traitres. C'est un peu blessant, d'être vu ainsi, surtout quand on ne cherche que le bien de tous comme le fait Catherine. Elle est un peu triste de se faire haïr, mais en même temps elle sait qu'elle-même a erré fut un temps et elle espère que tous ces gens les rejoindront un jour, pour qu'ils puissent tous avancer vers un monde meilleur. Elle ne demande rien de mieux que ça.

En tant que porte-parole de l'association, son rôle est plutôt important vu que le but principal du collectif est après tout de prêcher en faveur des politiques du Lord auprès de milieux tristement plus susceptibles de la rejeter, à savoir les gens comme elle qui sont des voleurs. Souvent c'est donc elle qui dirige un peu les meetings, surtout qu'elle est la plus ancienne membre de l'association. C'est un peu fatiguant de gérer ça en plus de son emploi chez les Gore et les quelques apparitions que lui demande le Ministère, mais c'est un grand honneur et on lui a bien fait comprendre que l'on comptait beaucoup sur elle. La dernière chose qu'elle souhaite faire c'est décevoir. Elle prend donc son rôle très à cœur, arrive en avance, essaye de ramener des petits gâteaux pour ses camarades qui bien souvent ne sont pas aussi bien lotis qu'elle qui a la chance de vivre dans un manoir (qu'elle nettoie certes, mais quand même), des boissons et son petit sourire. Elle accueille tout le monde et s'assure que tout va bien. Idéalement, elle aimerait qu'ils puissent fonctionner comme une véritable association avec un président, un trésorier et un secrétaire général, sauf qu'ils ne sont pas très nombreux et qu'une majorité des adhérents ne veut pas faire plus qu'assister aux réunions. Catherine craint qu'ils aient peur de subir les foudres des autres sang-de-bourbe malheureusement encore perdus, pensant encore que la société est contre eux.

La réunion se déroule bien, ils n'ont pas grand chose à dire alors parfois ils parlent de leur expérience et Catherine les encourage à expliquer comment la société du Lord les aide, comment elle a amélioré leur vie. Elle est toujours contente de voir des nouvelles têtes et essaye de les encourager à prendre la parole également. Elle voudrait que tout le monde se sente à sa place, c'est très important d'avoir sa place quelque part. Sylas fait partie de ces nouveaux curieux qui ont été invités d'office parce que résidant au MOCHE. Elle l'a déjà rencontré avant et elle l'a aussi croisé, il y a très longtemps à Hogwarts. La première fois qu'il est venu à une réunion, c'est-à-dire le mois dernier, elle a fait de son mieux pour l'accueillir chaleureusement. Il est un nouveau réhabilité, avant c'était un vrai traitre, qui fuyait avec les méchants Phénix. Son voyage vers la vérité a du être particulièrement compliqué. Il faut donc lui montrer un soin tout particulier. Ainsi, quand les gâteaux sont mangés, qu'il ne reste plus rien dans les verres et que les gens commencent à partir, elle va s'asseoir à côté de lui avant qu'il ne se lève. “ May I? ” demande-t-elle d'abord poliment avec un petit sourire.  “ It is very nice to see you here again, Sylas. May I call you Sylas? ” Tout le monde leur parle sur un ton très familier au quotidien, sans s'embarrasser de politesse, ce qui est normal, ils sont pas des sorciers après tout. Mais entre eux au moins, ils doivent se respecter.  “ Did you enjoy the meeting? ”

Ses cheveux ont poussé.

Il s'en rend compte ce soir-là, alors qu'il essaye de les coiffer correctement. Ils ont poussé et il n'a pas de peigne, alors il les coiffe en arrière avec ses doigts humides et il finit par faire la moue à son reflet quand ils retombent un peu sur son front. Ils sont encore courts, mais il devrait peut-être les faire couper. Il ne sait pas pourquoi mais il a l'impression que c'est attendu de lui, qu'il garde ses cheveux rasés.
Sauf que Sylas aime bien sentir le vent dans ses cheveux, et il aime bien sentir la mèche rebondir contre sa tempe et son front. C'est agréable.
Lui et les autres membres du MOCHE invités au rendez-vous marchent silencieusement en petits groupes jusqu'à l'endroit où les sessions prennent place. Certains y vont depuis des mois mais pour Sylas, c'est seulement la deuxième fois. Il a été invité de facto, mais c'était sympathique la dernière fois, il y avait des gâteaux et il y avait même du jus de pomme, son préféré. Beaucoup de gens ont parlé mais lui il n'a rien dit.

Sylas a l'impression de redevenir un traître. Il se surprend de plus en plus à caresser la cicatrice sur son pouce et à penser au prénom d'Alexis. Il ne sait pas grand-chose d'autre. Il a des vagues souvenirs, mais ils sont ça justement: vagues. Flous, décousus. Alors il a... il a décidé de ne rien dire.
Mais le mensonge par omission c'est quand même une traîtrise, non?
Il espère secrètement que la session de ce soir va le calmer. Le rassurer. Il n'est pas un traître. Il va tous les jours au travail. Il travaille dur. Et il croit fermement que le Lord a raison. Il construit un monde meilleur, et il en fait partie.
Mais Alexis... Sylas aime bien laisser son pouce courir à la surface de la cicatrice et penser à ce prénom, laisser ses pensées s'enrouler autour. C'est une chimère, peut-être que c'est le Basilik et Penelope qui l'ont créée. Il espère que c'est une chimère. Il parvient à se convaincre que c'est une chimère.

Et en écoutant les autres parler, il se calme.
Il hoche la tête, il murmure des réponses qu'il n'ose jamais prononcer plus haut. Il caresse sa main, toujours, le geste mécanique et rassurant, ses doigts frôlant la cicatrice tout du long, du gras de son pouce jusqu'à sa première phalange. Il reste assis même après ça, perdu dans ses pensées, sans se rendre compte que tout le monde se lève et s'en va.
“ May I? ” Il cligne lentement des yeux et tourne la tête vers la provenance de la voix — Catherine. Un autre chat, comme Cat, comme Francis. Il hoche la tête sans un mot et elle s'assied à côté de lui sur la petite chaise. Il arrête de caresser sa main et, comme c'est une preuve de sa culpabilité, il l'enfonce dans la poche de son pantalon. Il regarde autour d'eux. Ils sont presque seuls, maintenant. Le temps passe trop vite... “ It is very nice to see you here again, Sylas. May I call you Sylas? ” Elle vient de le faire, alors il ne comprend pas pourquoi elle lui demande. “ You can, ” dit-il toutefois, poliment.
Catherine, c'est un peu comme une sang-pure. Sylas a entendu des rumeurs sur elle. Apparemment, elle fait partie d'une famille de nobles, dans leur monde d'origine. Sylas faisait partie d'une famille de riches. Mais tout ça, la noblesse, la fortune, ça n'a plus d'importance.
Mais Catherine, elle a de l'importance. Plus qu'eux.

Et Sylas... Sylas ne lui fait pas confiance. “ Did you enjoy the meeting? ” Il hoche la tête avec lenteur. “ Yes I did. I will be back next month. ” Ça l'apaise. Et puis surtout, ça l'aide. Et aussi, c'est sympathique d'avoir le droit de sortir du MOCHE. Généralement, il faut une bonne raison. Un petit silence s'installe, et Sylas cligne des yeux en se disant que peut-être il devrait dire quelque chose. “ I'm sorry my hair is not combed back, ” fait-il, à côté de la plaque comme toujours. Il porte des jolis vêtements pourtant: une chemise grise délavée, et une cravate en laine qui s'effile un peu. “ Do you need help cleaning up? ” propose-t-il en regardant autour d'eux. “ That's kind of what I do. ”
Et là, pendant un très bref instant, un sourire.

Catherine ne sait pas assez de choses sur Sylas, pas encore. Elle sait l'essentiel : son retour à a société est récent et il a été dûment réhabilité. Elle sait que de ce fait il vit au MOCHE et que ça n'est que la deuxième fois qu'il assiste à une réunion de l'association. Elle croit se souvenir, qu'il y a de ça ce qui lui semble une éternité, il était un Ravenclaw. Il ne semble pas très enclin à s'ouvrir plus que ça, hochant simplement la tête quand elle lui demande si la réunion lui a plu. Il n'a pas parlé et elle trouve ça dommage. Partager son expérience, ça aide à voir que l'on n'est pas tout seul. Tous les sang-de-bourbe ici présents ont erré un jour ou un autre, ils ont cru être des sorciers, ils ont été des voleurs et pourtant tous sont en bonne voie de rédemption. “ Yes I did. I will be back next month. ” Elle hoche la tête doucement avec un air compréhensif. Peut-être qu'il est timide et qu'il a besoin de s'habituer encore un peu à cet environnement avant de s'ouvrir. Elle peut le comprendre, c'est vrai que ça reste impressionnant de s'exprimer devant des inconnus, même si ce sont ses semblables. Il sera le bienvenu en tous cas, à toutes les prochaines séances. “ I'm sorry my hair is not combed back, ” Un pli se forme brièvement entre les sourcils de Catherine avant de se résorber très vite ; elle ne veut pas l'embarrasser. Elle ne comprend pas du tout ce que sa coiffure a à voir avec le sujet. Est-il gêné parce qu'il a l'impression de ne pas être présentable ? On lui a coupé les cheveux à Catherine, elle s'en souvient encore, parfois elle se réveille et elle porte aussitôt la main à ses mèches blondes pour s'assurer qu'elles sont encore là, contre sa nuque, à hauteur de ses épaules désormais. Sylas est libre, loyal, il peut avoir les cheveux longs si ça lui chante. C'est un de leurs privilèges. Et pour voir ses congénères il n'a pas besoin de se mettre sur son trente-et-un. Ceci dit, Catherine soupçonne, un peu tristement, sa cravate effilée et sa chemise délavée d'être précisément ses meilleurs atours. “ That's quite alright Sylas, ” offre-t-elle donc gentiment, hésitant à même lui faire un compliment. Elle ne le connaît pas assez pour savoir si ses cheveux sont mieux ainsi, mais en tous cas, selon elle, ça lui va bien.  “ Do you need help cleaning up? ” La plupart vont et viennent comme dans un moulin, un moulin qui offre nourriture et boissons. Ils ne s'attardent jamais après les réunions, même ceux qui y parlent, soit parce qu'ils doivent vite rentrer au MOCHE et ne veulent pas traîner dans les rues, soit parce que- Catherine ne sait pas trop pourquoi en fait. Est-ce qu'ils l'évitent elle ? Sylas et elles sont presque déjà seuls dans le local, ne restent que trois autres sang-de-bourbes qui ramassent rapidement leurs affaires. “ That's kind of what I do. ” Elle lui adresse un regard curieux quand elle voit passer sur son visage, très rapidement, l'esquisse d'un sourire.

Catherine pense que Sylas est quelqu'un de bien. Enfin, elle le décide, plutôt. Il y a beaucoup de gens bien chez les sang-de-bourbe ; l'un n'empêche pas l'autre. Beaucoup ont volé de la magie sans le savoir, sans le faire exprès. Beaucoup se sont depuis repentis et ont trouvé leur juste place dans la société. Sylas devait simplement être un peu plus perdu que d'autres. Il a juste besoin d'aide. “ Me too. ” répond-elle avec un petit sourire en coin. La plupart d'entre eux sont passés professionnels du nettoyage, sans trop avoir le choix. Il ne faut pas se plaindre bien entendu ! Catherine a beaucoup de chance de travailler pour une bonne famille, dans un beau manoir. Elle contribue à la société en aidant de bons sorciers de sang-purs dans leur quotidien. Sylas, lui, doit plutôt travailler en espace public devine-t-elle, d'où sa place au MOCHE. “ Where do you work? The Ministry? Which floor? ” demande-t-elle, toujours d'une voix douce, rassurante. Elle se lève déjà pour commencer à arranger un peu les chaises et ramasser quelques gobelets laissés par son public. Aucun elfe de maison n'est jamais dépêché pour les évènement de la MFL. Ils sont réservés aux vrais sorciers, naturellement. Pourtant ceux à même de nettoyer toute une pièce d'un coup de baguette. “ You don't have to help me out tonight. Most people don't. ” Cela semble évident puisqu'ils sont désormais seuls. Ça ne ravit pas tout à fait Catherine ces responsabilités en plus, mais elle n'oserait jamais s'en plaindre même simplement à part elle-même. Son rôle est un honneur et si elle doit faire un peu de vaisselle et de ménage en plus après chaque réunion, ça n'est rien. Ça vaut le coup aussi, pour aider les autres sang-de-bourbe et propager la parole du Lord.

“ Me too. ” Catherine aussi elle nettoie derrière les vrais sorciers, et pourtant Sylas ne l’a jamais vue au Ministère et ne l’a jamais vue au MOCHE. Elle n’est pas comme lui, pas tout à fait, elle est mieux, il se demande pourquoi. Il ne se souvient pas si ils sont allés à Hog-- Il n’a pas le droit d’y penser, à ça, parce qu’il n’avait pas vraiment sa place parmi les sorciers allant à l’école. Il n’a pas le droit d’y penser, alors comme d’habitude, il fait: quand elle se lève, Sylas l’imite et se met à rassembler les chaises dispersées dans la pièce. “ Where do you work? The Ministry? ” Il hoche la tête, même si elle ne le voit pas. De toutes façons, elle reprend vite: “ Which floor? ” Sylas finit de plier une chaise et de l’appuyer contre les autres. “ I work on the second floor, on the Magical Law enforcement floor. I mostly take care of the Brigades, ” fait-il d’un ton où se fait entendre sans mal une certaine fierté. Ils sont très peu, des agents d’entretien à travailler parmi la Brigade Magique et la Brigade des moeurs. Et Sylas, lui! A été sélectionné parmi les autres pour l’être. Il est très fier. “ You don't have to help me out tonight. Most people don't. ” Il hausse les épaules en l’entendant, s’occupant d’une autre chaise et lui jetant un regard à travers la pièce. Quand leurs yeux se croisent, il hausse les épaules à son adresse. “ I don’t mind at all, ” lui explique-t-il gentiment. “ You already so much for other people, why shouldn’t other people do things for you? ”

Ils finissent de rassembler les chaises et de mettre les tables dans un coin et ils passent avec une poubelle pour mettre les vestiges de nourriture et de boissons dedans. Sylas la ferme et sort avec dans l’arrière-cour pour la mettre avec les autres déchets. Un sang-de-bourbe comme eux s’en occupera à l’aurore et l’amènera à la plante de recyclage magique.
Il profite pendant un instant de l’air frais, ferme les yeux et lève le menton vers le ciel. Il pourrait se plaindre de l’odeur néfaste des poubelles, ou du bruit ambiant un peu désagréable de Diagon Alley. Il pourrait avouer qu’il a mal au dos et aux épaules à cause de la longue journée qu’il a passé, ou que ses chaussures sont trop petites depuis des mois et que ses orteils commencent à se tordre dans tous les sens. Il pourrait avouer qu’il a du mal à dormir, parfois, et qu’il a des cauchemars tout le temps. Que sa tête lui fait mal, tellement mal, certains jours, et qu’il a du mal à parler à cause de ça.
Mais à la place, il sourit en appréciant silencieusement le vent sur son visage.

Quand il rouvre les yeux, il voit que Catherine le regarde depuis l’encadrement de la porte menant à l’arrière-cour. “ Is that everything? ” demande-t-il, hochant la tête quand elle lui dit que c’est le cas. “Do you have the time by any chance?” Les portes du MOCHE ferment à dix heures: si il n’est pas là avant cette heure, il sera considéré comme un fuyard et sera recherché par les autorités. Et Sylas n’a aucun mal à imaginer où il finira. Il pense au Basilique et frissonne désagréablement. “ I need to get back before curfew. ” Il penche la tête sur le côté. “ Do you have somewhere to be? Should I walk you there? ” demande-t-il, avec courtois et inquiet à la fois, désireux de plaire aussi - c’est plus fort que lui, même face à une autre sang-de-bourbe comme lui.

Sylas a eu l'air très fier de lui annoncer nettoyer l'étage où travaillent les Brigades de la justice magique ; à croire qu'il se sent très honoré d'aider à sa manière les Gardiens de la Paix. Catherine estime qu'il a plutôt raison ; il n'y a pas de petits métiers, c'est ce qu'elle a appris et eux tous les sang-de-bourbe ont une vraie contribution à apporter à la communauté magique. Sa bonne opinion de lui semble donc bien avisée, surtout que Sylas n'attend pas pour l'aider à ranger, même quand elle lui propose de faire comme les autres membres de ce groupe de discussion et de de filer sans demander son reste. “ I don’t mind at all, ” Elle en doute un petit peu malgré la gentillesse de son ton. Elle-même trouve cela fatiguant d'ajouter ces tâches à son travail quotidien — quand on travaille en maison, pour des sang-purs en plus il a de quoi être fier, mais ça veut aussi dire aucun jour de repos. Pour être honnête, elle ignore si elle offrirait son aide à la place de Sylas. “ You already so much for other people, why shouldn’t other people do things for you? ” Elle rosit légèrement, peu habituée à ce que l'on remarque ses efforts et un peu flattée. Elle ne mérite pas vraiment que qui que ce soit fasse des choses pour elle, même ses égaux, les autres sang-de-bourbes. Après tout, Catherine fait ce qu'on lui demande, ni plus ni moins. Elle n'a pas l'impression d'être un modèle, ni une héroïne même si parfois elle aimerait bien l'être. Ils rangent en silence, elle-même trop reconnaissante de son aide pour savoir tout à fait comment l'en remercier et il avancent bien plus vite qu'elle ne l'aurait fait toute seule. Mais pas aussi vite que s'ils avaient eu le droit d'utiliser la magie. Elle apprécie la compagnie, très calme, de Sylas et espère qu'il viendra aux prochaines réunions. Elle lui offre un joli sourire quand il sort pour elle la poubelle dans l'arrière-cour, mais comme il tarde un peu à revenir, elle s'inquiète — il y a parfois des gens qui s'infiltrent dans ce local après tout, avec de fort mauvaises intentions — et finit par l'y rejoindre, s'arrêtant timidement sur le pas de la porte quand elle le voit, le nez levé vers le ciel, les yeux fermés. Ça ne sent pas très bon ici, comme dans le reste de Knockturn Alley, pour être honnête, et l'arrière-cour est surtout encombrée par les poubelles. Il n'y a rien de beau, pas même dans le ciel ce soir sans étoile et nuageux. Il y a quelque chose d'innocent sur le visage de Sylas, quelque chose de doux qui la rend curieuse et jalouse à la fois.

Finalement quand il rouvre les yeux et la découvre là, elle est un peu embarrassée de son voyeurisme. “ Is that everything? — Yes, thank you very much Sylas. ”  Elle sourit de nouveau, joue avec les clés qui sont encore dans le fond de sa poche. Grâce à lui elle va pouvoir rentrer plus tôt et si les Maîtres n'ont pas trop de choses à lui demander ce soir, peut-être saura-t-elle se voler une véritable nuit de sommeil. “  Do you have the time by any chance? ” Elle hoche la tête, remontant sa manche pour jeter un œil à sa petite montre toute cabossée, avec une grosse fêlure sur le cadran, un cadeau très précieux offert par sa maîtresse. “ I need to get back before curfew. ” Elle hoche lentement la tête, comprenant bien ce genre d'obligations. Elle ignore à quelle heure est le couvre-feu au MOCHE, mais nul doute qu'il est strictement imposé.  “ Do you have somewhere to be? Should I walk you there? ” Sa sollicitude la touche beaucoup, même si elle imagine sans mal que ça n'a rien de personnel et que c'est simplement qui il est. “ Yes I have to go back to my Masters' manor. I will have to take the Knightbus. ” Ce n'est jamais très bien fréquenté et c'est encore pire la nuit évidemment, mais elle n'a pas trop le choix puisque les Gore vivent en dehors de Londres. Et bien sûr ils ne vont pas perdre leur temps à venir la chercher en transplanant. Au moins, elle a suffisamment de pièces sur elle pour payer son chemin du retour. “ Will you be alright? We can walk together to the MOCHE and I will take the Knightbus from there. ” Il a quelques arrêts fixes pour ceux qui ne peuvent agiter de baguettes pour l'appeler — c'est-à-dire la majorité de ses usagers désormais — et il y en a un à quelques pas de la résidence d'État des sang-de-bourbe. “ It is half past nine. Is that alright? When is your curfew? ” Peut-être est-ce aussi pour cela que beaucoup ne prennent jamais le temps de l'aider à la fin des réunions, nombreux sont les membres du MFL à résider au MOCHE. Elle espère que Sylas ne s'est pas mis en danger à cause d'elle — les punitions sont certainement sévères lorsqu'on ne respecte pas le couvre-feu. Peut-être qu'elle pourrait expliquer au responsable qu'il aidait le MFL, peut-être que cela pourrait avoir un petit poids sur la balance, si jamais ils arrivent en retard. Catherine ne se considère pas comme quelqu'un d'important mais il est vrai que sa parole semble compter un petit peu plus que celle d'autres nés moldus — sauf que, ça, c'est surtout quand les mots qu'elles prononcent lui ont été soufflés — elle ne croit pas que cela soit très juste, mais qui est-elle pour contester le choix de sang-purs de la faire porte-parole de l'association ? Et puis, qui est-elle pour se plaindre des petits privilèges que cela lui apporte ? Ses lèvres se tordent d'une petite moue inquiète : “ I didn't put you in any trouble, did I? ”

“ Yes I have to go back to my Masters' manor. I will have to take the Knightbus. ” Sylas hoche la tête, gardant un visage impassible même si en son for intérieur s’agitent des sentiments qu’il n’a pas eu ressenti depuis très longtemps: un mélange de jalousie et de curiosité. De la vraie curiosité, le genre de curiosité qui l’a envoyé sur les bancs de Ravenclaw à Hogwart, quand il était un voleur. Une curiosité énorme. Elle ne dort pas au MOCHE - ça, il le savait déjà - mais travaille au service d’une famille de sang-purs. Dans un manoir… Sylas se demande à quoi ressemble le manoir. A-t-elle sa propre chambre? Sa propre salle de bains? Sylas a de la chance: il ne partage pas sa chambre. La salle de bains, en revanche, est partagée avec une quinzaine d’autres sang-de-bourbe et c’est parfois un peu embarrassant, surtout qu’ils se douchent tous en même temps.
Et puis il n’y a jamais de silence au MOCHE. Il y a toujours quelqu’un qui fait un cauchemar, quelqu’un d’autre qui se taper pendant la nuit, ou alors quelqu’un qui disparaît du jour au lendemain après que des employés du Basilique soient venus le chercher au milieu de la nuit. Même après le couvre-feu, Sylas peut entendre un de ses voisins se masturber et l’autre se parler tout seul toute la nuit.
Ce qu’il ferait pour un peu de quiétude…

Il ravale bien vite son amertume, parce qu’il sait qu’il devrait être reconnaissant d’avoir déjà accès à ça: un lit (miteux, avec des punaises et des draps qui ne sont lavés qu’une fois tous les trois mois), un bureau (branlant, plein d’échardes), une petite fenêtre (qui donne sur l’arrière d’un autre immeuble, et qu’il ne peut pas ouvrir) et quelques vêtements (la plupart délavés et pas du tout à sa taille). C’est énorme.
Il doit être reconnaissant. Et même si il ne l’est pas, il ne doit surtout pas surtout pas surtout pas le montrer à Catherine, sinon elle le dira à ses maîtres et ils appelleront le Basilique...
“ Will you be alright? We can walk together to the MOCHE and I will take the Knightbus from there. ” Il hoche la tête, assentiment silencieux. Il n’a pas pris le Knightbus depuis bien longtemps, la dernière fois c’était il y a quelques mois quand Penelope voulait le voir à l’autre bout de la ville. Elle avait été horrifiée d’apprendre qu’il avait dépensé la plupart de ses économies pour un ticket et avait décidé de le revoir plus près du MOCHE. “ It is half past nine. Is that alright? When is your curfew? — It’s okay, Catherine, ” dit-il d’une voix calme et rassurante. “ I didn't put you in any trouble, did I? — Don’t worry about me. The curfew is at ten. ” Il lui offre un léger sourire et fait un mouvement de tête en direction de la porte. “ Let’s get our coats and go. ”

La veste de Sylas est plutôt fine, élimée aux manches et a vu de meilleurs jours, et même si elle le protège à peine du vent et du froid, il est quand même content de l’avoir quand ils ressortent du petit local. Il attend que Catherine ait fini d’éteindre les lumières et de fermer les portes avant de s’engager, après elle, sur la chaussée. Il a les bras croisés sur son torse, les mains cachées sous les aisselles, pour préserver un peu de sa chaleur corporelle.
Ils marchent sans parler, dans un silence bizarrement confortable et complice. La sérénité de l’instant ne dure que quelques minutes. “ Hey. HEY! Mubloods, I’m talking to you! ” Sylas frissonne et s’arrête. Il a envie de s’enfuir en courant, ou alors de se retourner et de sauter au cou de la voix hostile derrière eux. Il jette un regard en coin à Catherine avant de se détourner pour faire face à trois sorciers, hilares et visiblement imbibés, qui les ont vus sortir du local des MFL et ont décidé que les tourmenter serait une manière excellente de bien finir leur soirée. Sylas s’approche machinalement un peu plus pour se placer entre eux et Catherine. Les brimades ne sont pas rares, les insultes et les rapides violences physiques non plus. Il y est habitué, surtout au travail.

L’un des sorciers, celui qui vient de leur crier après, s’approche et claque des doigts sous les yeux de Sylas qui ne recule pas. “ Merlin, you were right, Jonas, they really are dead inside. ” Sylas sent un sourire crispé s’étirer sur ses lèvres. “ Can I help you with anything. ” Sa question tombe un peu à plat, et son manque d’entrain est immédiatement noté par son interlocuteur qui fronce les sourcils. “ What’s that attitude, now? ”
Sylas entend immédiatement dans sa voix quelque chose qui lui rappelle Hogwarts. Il sait que quoiqu’il fasse, le sorcier en fasse de lui aucune idée et qu’il va réaliser cette idée. Cette idée, c’est lui faire du mal. A Hogwarts, c’était des trucs d’adolescents: des encriers qui explosent, des lanières de sac qui se cassent, des conneries écrites sur les murs des toilettes à la baguette, des insultes travaillées et répétées des dizaines de fois. Là, c’est plus dangereux.
Alors Sylas baisse les yeux et marmonne quelques excuses en baissant la tête et en reculant, mal à l’aise. “ That’s what I thought. ”

L’aventure ne doit pas être aussi amusante qu’elle semblait l’être puisque les trois sorciers finissent par rouler des yeux et par soupirer en passant leur chemin. Sylas garde les poings fermés le long de son corps et tremble un peu jusqu’à ce que le bruit de leurs pas s’estompe.
Cette colère encore. Cette colère qui l’a rarement quitté à Hogwarts quand il était soumis au même comportement. Cette colère qui a été extraite par le Basilique, mais qui trouve toujours sa place au plus profond de son estomac, le tordant dans tous les sens jusqu’à le laisser tremblant et aveuglé.
Sylas finit par se redresser et par regarder Catherine, qui n’a pas bougé. “ We should go. Now. ” Sa voix, toujours un peu éteinte, est tranchante pendant un bref instant. “ You don’t want to miss your bus, and I need to get back soon. ” Ses lèvres sont sèches, presque douloureuses dans le froid. Il offre un sourire à Catherine qui n’atteint pas ses yeux. “ Are you cold? Do you want my jacket? ”

“Don’t worry about me. The curfew is at ten. ” La moue que Catherine offre à Sylas en échange de son petit sourire rassurant n'est pas très convaincue, mais elle hoche doucement la tête. “ Let’s get our coats and go. ” Elle hoche la tête de nouveau et ils retournent à l'intérieur pour mettre leurs vestes. Celle de Catherine est en bien meilleur état que celle de Sylas, le pauvre. Elle éteint les lumières et ferme toutes les portes à double tour avec précaution avant de le rejoindre dans la rue. Il est évident qu'il a froid et elle aimerait pouvoir faire quelque chose pour lui. Au lieu de ça, ils se mettent simplement à marcher vers l'arrêt du bus, en silence, sans pour autant que ce ne soit gênant. “ Hey. HEY! Mubloods, I’m talking to you! ” Elle sursaute, habituée aux dénigrements, mais pas nécessairement à être interpellée comme ça dans la rue. Elle l'a été parfois, mais plus à titre personnel à cause de son rôle dans la MFL. Comme Sylas elle marque l'arrêt, n'étant pas du genre à désobéir ou manquer de respect à de vrais sorciers. Mudblood n'est pas une insulte quand c'est la vérité. Elle préfèrerait pouvoir éviter la confrontation, mais ce n'est pas à elle de décider alors qu'elle se retourne lentement pour faire face à un groupe de trois sorciers visiblement saouls. Ça ne promet rien de bon et elle se tend un peu, surtout lorsque Sylas s’approche d'eux comme pour faire barrage. Elle tend vaguement la main pour l'en empêcher, elle ne sait pas comment il compte réagir et elle a un peu peur qu'il envenime les choses, mais elle a peur que son geste soit mal pris par les sorciers aussi donc elle se rétracte avant de l'avoir effleuré. L’un des sorciers, s’approche et claque des doigts sous les yeux de Sylas. Shit. “ Merlin, you were right, Jonas, they really are dead inside. ” Catherine frissonne un peu, mais ne bouge toujours pas et ne dit rien. “ Can I help you with anything. ” Elle se crispe, sachant d'avance que les sorciers comme ça sautent souvent sur la moindre petite marque de manque de respect. Le ton de Sylas n'est pas irrespectueux en soi, mais il risque fort d'être interprété comme tel, malheureusement. “ What’s that attitude, now? ” Catherine devrait certainement intervenir, s'écraser mielleusement et leur faire comprendre la vérité : ils sont tout à fait prêts à les aider, ne cherchent aucun ennui et sont simplement fatigués. Heureusement, Sylas réagit lui-même correctement en s'excusant et en baissant les yeux alors qu'il recule vers elle. “ That’s what I thought. ” Finalement ils ne semblent pas avoir besoin d'eux puisqu'ils finissent par passer leur chemin après avoir roulés des yeux exagérément en direction des sangs-de-bourbe. Catherine s'approche un peu de Sylas, mais n'ose pas le toucher, effleurer ses poings fermés. Elle pense savoir ce qu'il ressent, même si elle-même ne ressent plus grand chose face à ce genre de situation. À part de la peur bien entendu. Elle a toujours peur face aux sorciers, peur de faire une erreur même quand elle fait de son mieux, peur d'être punie, non sans mérité cependant.

“ We should go. Now. ” Sa voix est tranchante, mais elle ne relève pas, hoche simplement la tête prête à reprendre la route. “ You don’t want to miss your bus, and I need to get back soon. ” Il devrait peut-être rentrer tout de suite, elle ne veut vraiment pas le mettre en retard et lui apporter des problèmes. Le sourire sans vie qu'il lui offre la rend pourtant très silencieuse et elle n'ose rien proposer. “ Are you cold? Do you want my jacket? ” Elle secoue vivement la tête, presque choquée par sa proposition. Il a très clairement froid, lui et c'en est presque indécent qu'il se montre aussi généreux. C'est elle qui devrait lui proposer sa veste. “ I'm alright. Are you okay? ” Elle sait que non. Il a froid, il est énervée, peut-être humilié un peu aussi. “ It's okay if you don't walk me back all the way Sylas. I know my way and I don't want you to be late. ” Il n'a pas besoin de ça pour avoir des ennuis malheureusement. Leur simple condition d'erreur de la nature suffit. Timidement elle effleure son bras avant de poser une main sur son épaule. Elle aimerait savoir quoi dire, mais pour toute porte-parole des nés-moldus qu'elle est, elle est à court de mot et finit par retirer sa main et se remettre à marcher. “ You should go home and rest. I hope to see you at the next meeting though, right? Your presence was very much appreciated tonight and so was your kind help. ” Elle lui offre un sourire, sincère quoique timide et baisse un peu la voix comme si elle craignait qu'on ne les entende : “ What's your favourite treat - either sweet or savory? I can make sure we have some for you next time. ” Son sourire devient complice. Catherine fait toujours un effort avec les snacks pour les réunions de la MFL, déjà parce que ça fait venir plus de monde et ensuite parce qu'elle sait que beaucoup n'ont pas les moyens de toujours se nourrir correctement et encore moins de se faire plaisir. Et même les mudbloods comme eux méritent de se faire plaisir de temps à autres.

Sylas aimerait bien courir. Il aimerait bien courir, très loin, de préférence sous la pluie. Laisser les gouttes ruisseler dans ses cheveux et sur son visage, s'infiltrer dans son col, serrer ses vêtements contre sa peau. Il aimerait voler, comme un oiseau, et il aimerait hurler, très fort. Il aimerait hurler jusqu'à vouloir s'arracher la gorge, jusqu'à ne plus pouvoir parler. Il aimerait que cette sensation désagréable et pesante qui s'est infiltrée dans sa poitrine le laisse tranquille. Il aimerait que ce soit quelque chose de physique et d'existant, qu'il pourrait prendre dans ses mains et détruire.

“ I'm alright. Are you okay? ” Clignement de yeux; il se reconnecte. Sylas hoche la tête aussitôt, même si c'est un mensonge et qu'ils le savent tous les deux. Il ne se rappelle pas de la dernière fois qu'on lui ait posé la question. “ It's okay if you don't walk me back all the way Sylas. I know my way and I don't want you to be late. ” Il secoue sa tête légèrement en l'entendant. Ce n'est jamais une question d'envie mais une question de devoir.

Il s'immobilise, glacé sur place, quand elle effleure son bras. Il la regarde avec de grands yeux alors que les doigts de Catherine remontent jusqu'à son épaule et s'y posent. “ You should go home and rest. I hope to see you at the next meeting though, right? Your presence was very much appreciated tonight and so was your kind help. ” Il tourne la tête pour regarder sa main. Il aime beaucoup ce contact. Il aimerait qu'elle touche sa peau. “ What's your favourite treat - either sweet or savory? I can make sure we have some for you next time. ” Catherine sourit doucement et Sylas essaye aussi, mais ça n'atteint toujours pas ses yeux. “ I don't know, ” dit-il lentement. “ I like cheese and crackers I guess. ” La nourriture au MOCHE est un peu toujours la même chose et lui-même a perdu un peu de son appétit et de son plaisir des bonnes choses.

“ You know, I can still walk you... ” Il s'interrompt lui-même. Peut-être qu'elle lui dit gentiment de rentrer chez lui parce qu'il la met mal à l'aise — elle ne serait pas la première... “ As you wish, ” finit-il par conclure, laissant son sourire s'approfondir un peu, rassurant. “ I will see you next month then. You take care, Catherine, and thanks for having me tonight... it was very nice. ” Lentement, il se recule et la main de Catherine retombe. Sylas se sent très petit et très léger, comme si il allait s'envoler, sans ce poids sur son épaule.

Mais malheureusement, il a toujours les pieds sur terre et après l'avoir suivie du regard pendant quelques secondes, il tourne les talons et se hâte pour rentrer avant le couvre-feu.