| | | Les bons jours Valeria arrive à se regarder dans le miroir sans regrets, sans s’attarder sur la laideur de ce qu’elle voit, sans y voir de la faiblesse plus que de la force. Les bons jours elle arrive à se reconnaître dans la glace, à accepter la blessure comme une part d’elle-même. Les bons jours sont rares. Aujourd’hui n’est pas un bon jour. Elle fixe la rougeur sans arriver à en détacher les yeux, entraînée dans la spirale de la honte. Depuis l’accident la plaie a toujours été trop à vif pour qu’elle la masque mais aujourd’hui elle semble plus pâle, moins enflammée. Alors pour la première fois, elle fouille dans son tiroir pour en sortir du fond de teint, espérant cacher un peu des dégâts. Trois couches la satisfont un peu. Bien sûr ça ne recrée pas une peau mais la coloration agresse moins l’œil, pour une fois elle se dit que si on la voyait de loin on ne remarquerait pas immédiatement. L’illusion est faible mais ça la rassure, elle se sent mieux un instant. Elle voit bien que Daizo ne sait pas quoi dire, se demande s’il devrait encourager ça ou la pousser à ne pas en avoir besoin. Finalement il lui dit juste qu’elle est belle et à elle ça lui suffit, elle part avec l’air un peu plus heureux.
Lorsqu’elle arrive aux bureaux de la boîte au cœur de Londres elle ignore la sensation de chaleur qui commence à lui démanger le visage. Une heure passe, la température semble grimper mais elle prétend que c’est juste le soleil qui frappe un peu fort à travers la vitre. Une employée qui vient déposer un dossier à examiner pour les designs de la prochaine ligne la dévisage bizarrement. Finalement c’est Mihail qui rentre dans son bureau deux heures après son arrivée, lorsque la douleur commence à ne plus pouvoir être ignorée mais qu’elle fait encore comme si de rien n’était. « Je pensais pas que tu serais là aujourd’hui y a pas des trucs à faire à l’entrepôt C ? » Il reste dans l’embrasure de la porte, sans doute qu’il passe juste la saluer avant d’aller terroriser quelques salariés. « Non j’ai envoyé… Wow ça va ? » Il s’est interrompu au milieu de sa phrase, avec des yeux ronds comme des soucoupes, faisant un pas vers le milieu de la pièce. « Oui ça va de quoi tu parles ? » Elle a souvent mal ce n’est rien d’inhabituel, pas de quoi en faire tout un plat et puis comment il sait ? « Par Raspoutine mais tu t’es pas regardée ? Ton visage fait trois fois sa taille habituelle ! » Peut-être que c’était pas normal cette chaleur finalement oui. Elle se lève brusquement pour se diriger vers un miroir et titube en chemin, plus sonnée qu’elle ne le pensait par la douleur et cette chaleur insoutenable qui pulse. La rousse a un haut-le-cœur face à son reflet. La blessure est rouge comme si elle venait d’être faite et prend un volume impressionnant. Au milieu des replis de chair on devine encore des miettes de fond de teint plus claires. C’est lorsqu’elle remarque la présence d’un étrange liquide qu’elle détourne le regard, plutôt que de rendre son petit-déjeuner sur le tapis.
« Je t’emmène à Sainte Mangouste. » Elle ne proteste pas et le laisse la prendre par le bras pour transplaner. A l’issue du tourbillon elle s’effondre à genoux, vomissant sur le carrelage de l’hôpital. Au moins c’est une arrivée en beauté. A l’accueil elle fait juste un vague signe en direction des secrétaires, de toute façon ils savent bien où elle va, et elle fonce vers le service des pathologies magiques, laissant derrière elle Mihail qui n’aime pas les hôpitaux. A la réception du service elle prend par le bras un infirmier qui passe. « I need to see mage Woolridge, now. » Un seul regard vers elle étouffe les protestation de l’homme qui s’empresse de filer le chercher, alors qu’elle attend, adossée au mur, essayant de penser à autre chose que cette brûlure qu’elle sent chauffer à blanc. C’est un soulagement de voir apparaître le médicomage au détour du couloir. « Hi, I… I think I may have had an allergic reaction to makeup. » Parce que tartiner une plaie magique de fond de teint c’était clairement la meilleure idée du siècle. |
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