Au petit déjeuner il savait mieux qu’il valait mieux ne pas lire les journaux people, parce qu’il risquait de se retrouver dedans et que ça le foutait toujours de mauvaise humeur. Alors il lisait la gazette en diagonale, écumant distraitement les pages. Des histoires sans intérêt, des attentats, tout plein de propagande. Comme d’habitude quoi. Finalement ça le déprimait presque moins que de voir des idioties étalées sur sa vie privée et celle de gens qu’il connaît. Moira, elle, préfère ne pas entendre les mauvaises nouvelles avant son café. Alors c’est bien dans les tabloïds qu’elle se plongeait, avec une espèce de devoir citoyen. (‘si tu es dedans tu voudras savoir, il faut bien se tenir au courant’ qu'elle se plaît à répéter). Heureusement, cela faisait des mois que le Daily Prophet et surtout Skeeter s’étaient tus à son propos, passant sans doute à une autre victime pendant ce temps-là. C’était le Gossip Elf (‘au service de vos besoins de rumeurs’), que sa cousine feuilletait en fredonnant une des dernières chansons des Bizarr’ sisters. « Ah tiens c’est toi ça ! » Il soupira profondément sans lever les yeux de sa page. « Est-ce que c’est moi qui poireaute devant le stade pour le match des Puddlemere ? » Les quarante-cinq minutes les plus frustrantes de la semaine. « Dans le mille. » Il l’avait bien prévu que quelqu’un supposerait qu’il s’était fait poser un lapin et préviendrait ces harpies de journalistes. Ceci dit ce n’était pas faux il s’était bien fait poser ledit lapin, ce n’avait juste pas été pour un rendez-vous romantique. Non, il était bien trop extraordinaire pour que qui ce soit manque l’occasion de passer un moment en tête-à-tête avec lui s’il y avait à la clé une possibilité d’être chanceux. Jusqu’à ce jour personne ne lui avait encore fait le coup.

Il n’avait pas encore fini son bol de céréales que sa cousine avait quitté l’appartement comme une tornade, disant être en retard, comme tous les matins. Le joueur de quidditch avait, lui, encore quelques heures de libres devant lui qu’il comptait bien occuper à répéter son texte pour sa prochaine apparition de propagande. On ne chôme pas quand on est un Fawley, il ne pouvait se laisser aller à rien faire, même pour le maigre espace d’une matinée. Sa troisième relecture du chef-d’œuvre de littérature qu’on lui avait écrit fut interrompue par le tintement de la sonnette. Il n’attendait personne. Curieux, il prit juste le temps d’enfiler un T-shirt pendant que la porte sonnait à nouveau. « J’arrive, j’arrive ! » Dans le doute il prépara un sourire poli avant de déverrouiller l’entrée et d’ouvrir le battant, si c’était quelqu’un d’important il valait mieux avoir l’air aimable. Le sourire fondit comme plongé dans l’acide quand il fit face à celui de la sorcière en vert. « Skeeter. » Le ton n’aurait pu être plus glacial. Il aurait dû se douter que ces mois sans un mot d’elle n’étaient qu’une accalmie passagère et que cela ne présageait rien de bon. S’il n’avait qu’une envie, lui fermer la porte au nez, il préférait ne pas jouer avec une femme capable de ruiner sa réputation et l’envoyer en prison d’un coup de plume. « Vous avez une mine horrible, rentrez donc. » L’air plus fade qu’avant, plus fatiguée, même si elle piquait moins les yeux du coup. Mécaniquement il s’écarte pour la laisser passer, ne cachant pas son mécontentement. « Qu’est-ce que vous voulez ? » Il savait à vrai dire très bien ce qu’elle voulait. Des informations, des rumeurs. Ou bien elle révélerait à tous son homosexualité.