On lui a souvent dit que la boxe était un sport pour moldus - sa mère, notamment, son père en avait un peu rien à faire - et qu’il devrait pratiquer autre chose, comme le Quidditch. C’était une bonne idée, c’est sûr, Seamus a toujours adoré monter sur des balais depuis tout petit et s’amuser à voler comme les grands, mais il a surtout eu rapidement besoin de canaliser sa force dans quelque chose. Il y a pensé, pendant une seconde, à se proposer en tant que batteur de l’équipe, le jour où les jumeaux Weasley ont filé de Poudlard, mais l’idée et l’envie lui sont rapidement passés. Il est resté amouraché dans la boxe et, à l’heure actuelle, même si on lui rit au nez quand on pense à Seamus qui fout un poing à un mangemort, il a au moins un moyen de se défendre s’il se retrouve sans sa baguette.
Il a l’impression que les gens n’y pensent pas vraiment, il a l’impression d’être un gamin stupide qui s’accroche à autre chose que ce qu’on leur apprend bêtement dans un château où chaque petit centimètre crie à la magie. Il se rappelle de l’an passé, tout de même, de sa mère qui ne voulait pas le laisser revenir à Poudlard lorsque Dumbledore et Harry affirmait que Voldemort était revenu, qui ne voulait pas se replonger dans l’horreur de sa propre guerre, jusqu’à finalement changé d’avis et capituler au cours d’année avant que Harry ne disparaisse finalement sur la fin. Cette fois encore, sa mère a eu du mal à le laisser revenir mais il n’a pas écouté et il sait qu’avec le temps il ne l’écoutera plus du tout, du moins plus vraiment. Il reviendrait à Poudlard, toujours, qu’importe ce qu’il se passe, et il mènera cette guerre à son tour.

Cette sixième année ne sonne pas des plus agréables, vraiment pas, surtout quand certains d’entre eux ont quittés les rangs de Poudlard en cours de route, suite à des drames. Les jumelles, pour commencer, dont les parents commençaient à s’inquiéter, Hannah Abbott ensuite, dont la mère a été tuée, et tous ces visages qu’il ne croisait plus.
Mais il y a toujours une routine, quelque part, entre les murs du château, une routine étrange que Seamus accueille toujours avec son sourire en coin, lorsqu’il voit la démarche de Bagshot à l’autre bout du couloir. Et après le cours de métamorphose, quand tout le monde tire un peu la tronche, le Gryffondor s’arrête aux côtés de Boris pour lui jeter un coup d’oeil en coin. “Tu me rejoins dans quinze minutes devant la Salle sur Demande ?” il glisse dans un souffle dans sa direction, sourire toujours collé aux lèvres alors qu’il passe son bras autour de ses épaules pendant une seconde avant de disparaître dans les étages.
Seamus a choisi la boxe pour une bonne raison: celle de se défouler et de canaliser sa colère. Et la sixième année débarque avec plus de raisons d’être en colère que les autres, vraiment, et quelque part il se dit que si Boris ne doit pas forcément évacuer sa colère, il doit au moins pouvoir se défouler aussi.

Après un arrêt dans le dortoir des Gryffondors pour enfiler un jogging et un marcel, Seamus redescend devant la Salle sur Demande et passe plusieurs fois devant avant de voir la fameuse porte apparaître, presque en même temps que Boris qui ne semble pas vraiment comprendre où il veut en venir. “Ok babe, j’espère que t’es prêt,” annonce-t-il dans un sourire dans la direction du Poufsouffle et l’entraîne à l’intérieur. La salle ressemble presque à celle qu’ils avaient pendant les entraînements l’an dernier avec l’Armée de Dumbledore sauf qu’à la place, en son centre, il y a plusieurs bancs et objets de boxe, dont des sacs suspendus. Ca mélange un peu le côté moldu et sorcier et Seamus ne peut s’empêcher de sourire un petit peu, c’est comme lui, au final.
“Je te vois venir, laisse-moi juste te dire que la boxe ça ne peut que te faire du bien et que… j’en ai besoin.” C’est un argument valide, il en est sûr, parce qu’il dit rarement ce genre de choses, en général il les garde pour lui mais là il ne tient plus vraiment. D’ailleurs, l’envie le prend d’enfiler de gants et commencer à s’échauffer un peu mais il se retient, attrapant tout de même une paire pour la tendre vers Boris. “Enfile-ça, je vais te montrer quelques trucs.” Seamus pose son regard sur l’autre irlandais, un léger sourire en coin en attendant qu’il s'exécute, pas vraiment sûr de s’il le fera ou pas, avant de venir retirer ses chevalières pour les poser sur le banc à ses côtés, avec précaution - enfiler des gants avec ça c’est pas la chose la plus intelligente à faire.
“T’es prêt ?”, demande-t-il dans sa direction finalement, se tournant vers Boris pour l’observer alors qu’il s’approche de lui, pose une main sur l’un des gants. “Seul moment où tu auras le droit de me frapper en plus, c’est cadeau.” Sans vraiment se douter que ce sera plus son truc à lui, ça, au final.

Des fois, tu essayes de te rappeler comment c’était, quand tu étais un simple sorcier. Tu y réfléchis, longtemps, afin de te souvenir de la vigueur avec laquelle ton palpitant battait, à l’époque, si fort qu’aujourd’hui, tu aurais eu l’impression qu’il aurait fait exploser ta poitrine. Tu tentes de te souvenir de ce que ça faisait, de ne pas tout voir, tout sentir, tout entendre. Ce que ça faisait de pas être un vampire.
Pour ça, tu remontes dans le temps, un peu loin en arrière. Tu remontes il y a dix ans, quand tu faisais presque partie des aînés de Poudlard. Quand tu avais encore une taille un peu juste pour un garçon, quand tu avais des yeux encore trop grands et les joues encore trop rouges.

Pour beaucoup, ça avait été une année compliquée. Pour toi, c’est surtout que ça avait été plus difficile que jamais de ne pas te mêler des mésaventures qui frappaient tes petits camarades. Tu avais le don pour regarder ailleurs, en ces temps difficiles, mais ce talent était mis à rude épreuve, dernièrement.
Tu lèves d’ailleurs un peu le nez, quand tu vois Seamus à l’autre bout du couloir, bien décidé à l’ignorer comme tu le faisais la plupart du temps, sans que ça ne change quoi que ce soit à l’attention excessive qu’il te portait. Cette fois encore, il ne te loupe pas, enroulant son bras autour de tes épaules. Son invitation t’arrache quelques teintes rouges sur les joues. Mais tu hausses quand même un sourcil avec nonchalance. « Je suppose que je n’ai pas le choix » minaudes-tu en dégageant du bout des doigts son bras et sa familiarité encombrants.

Quinze minutes, c’est à peine assez pour retoucher ta coiffure. Et comment aurais-tu pu te douter qu’il n’était pas question là de quelques rendez-vous galants ? Tu le constates, non sans dépit, lorsqu’en arrivant devant la Salle sur Demandes, ton obligé t’y attend, sapé comme un athlète du dimanche, ronflant de satisfaction. Vous vous engouffrez dans la salle et tu le dévisages, baillant aux corneilles. Il te prend de court, t’explique sa nouvelle idée de génie et lubie du moment : un combat de boxe. Il t’avait convié à un combat de boxe.
Tu te sens stupide, le laisses te refourguer une paire de gants, alors que tu n’es clairement pas attiffer pour. C’est qu’il est tellement enjaillé qu’il ne te laisse pas répondre, trépignant autour de toi, prêt à en découdre.

Tu avais beau avoir la langue persiflante, tu n’étais pas d’un naturel combatif. Epais comme un haricot et aussi souple qu’un manche à balai, tu restes figé, le dévisageant avec des yeux aussi gros que des souaffles. Quand enfin il ferme son clapet plus de quelques secondes, tu finis enfin par gémir, sidéré. « Prêt ? » Tu fais un tour sur toi-même, faisant voler ta robe de sorcier. « Est-ce que j’ai l’air prêt ? » Tu roules des yeux, ne sachant par où commencer pour lui expliquer sans trop de sang que de tous les élèves, il n’aura pas pu choisir pire partenaire de jeu.
Mais pour cela, tu préférerais quand même être dans le thème de l’incident. Aussi, dans un soupir, tu vas t’asseoir sur le banc, à côté des chevalières que tu zyeutes un instant, avant de tirer l’une des caisses qui rouillaient en-dessous. Après tout, elle était faite pour ça, aussi, cette pièce. Tu tires de la malle un pantalon de duel (qui pouvait s’apparenter en coupe à une culotte d’équitation). Tu défais ta cravate et ta chemise avec nervosité, fulminant toujours un peu plus. « Franchement, tu aurais pu me prévenir ! Qu’est-ce que tu voulais que j’imagine, moi ? »

Tu gardes ton maillot de corps, défais ta ceinture et passes le pantalon de sport. D’un coup de baguette, tu plies soigneusement tes affaires, mettant la patience de Seamus à mal. Le temps de fixer tes cheveux en arrière magiquement, tu te hisses finalement sur le ring, les gants sous le bras. « Je ne sais même pas comment on y joue, là, à ta… boxe ! » que tu pestes, en lui passant les gants, avant de garder les mains tendues, pour qu’il te les enfile, décidé que tu étais à ne pas faire le moindre effort pour ses beaux yeux.

Seamus s’arrête net de sautiller sur place en entendant la remarque de Boris et lui jette un rapide coup d’oeil, comme pour évaluer sa tenue, avant de hausser des épaules. Est-ce-qu’il a l’air prêt ? Non pas spécialement mais il peut faire avec, ce n’est pas le problème, du moment qu’il accepte d’enfiler ses gants et d’écouter approximativement les directives de Seamus. Ce n’est vraiment pas un problème pour lui, alors quand il voit Boris se diriger d’un pas rapide vers le banc et l’air passablement irrité, il ne peut s’empêcher de hausser un sourcil en se demandant bien d’où ça vient tout ça et pourquoi ça le met dans un tel état.
Il le regarde tirer une  malle un peu rouillée et récupérer des habits dedans, visiblement prêt à enfiler une tenue plus adaptée. Un sourire étire rapidement les lèvres de Seamus qui se rapproche d’un pas, plutôt content de le voir accepter malgré l’ardeur avec laquelle le Poufsouffle défait sa cravate et sa chemise.
Des paroles s’échappent de ses lèvres et le lion fronce un peu ses sourcils en se demandant exactement ce que ça veut dire, le prévenir de quoi au juste ? Et qu’est-ce-qu’il s’imaginait en-dehors de ça ? C’est pourtant assez clair. “Uh…”, commence-t-il alors, un peu pataud en regardant autour de lui pour observer la salle. “Désolé, je suppose ? Tu t’attendais à quoi d’autre ?” Il demande quand même, pour être fixé et ne pas réitérer la même bêtise plus tard.

Mais Seamus se tait finalement en le voyant se changer et décide qu’il est temps pour lui de monter sur le ring, il préfère laisser parler son impatience de là plutôt que d’en bas. Sans plus attendre, il commence un peu à sautiller sur place et à balancer ses poings en avant, le droit puis le gauche, même si les gants qu’il a enfilés ne sont pas les plus recommandés pour ça. Sauf que Boris vient de le rejoindre et semble vouloir rester dans une optique plutôt négative, lui refilant un peu sauvagement les gants, sans doute pour que Seamus l’aide à les passer.
Retenant un petit rire moqueur sans le lâcher du regard, il vient retirer les scratchs de ses propres gants d’un coup de dents avant de les enlever complètement et libérer ses mains pour pouvoir aider Boris. Il récupère le premier gant, hésite une seconde avant de le reposer pour finalement attraper des bandes et venir les passer autour des mains du Poufsouffle, pour une question de sécurité. “Je sais que si tu abîmes tes mains à cause de moi, tu vas me le faire regretter et j’ai pas envie de t’entendre te plaindre pour ce qu’il nous reste à tirer ici.” Seamus reprend dans un souffle, terminant de bander sa main gauche et il flash un sourire vers lui avant de lui faire enfiler les gants et de venir refermer les scratchs. “Ca doit serrer sans non plus que ça te fasse mal.” Il glisse alors un doigt entre le gant et le poignet de Boris et hoche de la tête. “Ca a l’air bon.”

Toujours armé de son sourire, Seamus s’éloigne et ne remet pas tout de suite ses gants plats, il se met en position en levant ses poings face à lui, l’un plus avancé que l’autre. “C’est ta position de garde ça, ok? Après tu frappes, on se contente du direct pour l’instant, si t’es assez doué je te montrerais d’autres trucs.” Un air amusé semble s’étendre sur le visage du Gryffondor alors qu’il récupère finalement ses gants et les enfile en les relevant face à lui, un sourcil haussé dans la direction de Boris. “Oh et puis t’y joues pas à la boxe, c’est un sport, pas un jeu, et ça fait mal. Mais on va faire en sorte de pas trop se blesser aujourd’hui Bagshot, pas vrai ?” Comme s’il allait mesurer la force de ses poings. On peut dire que Boris est chanceux que ce n’est pas lui qui frappe.
Son regard s’arrête une nouvelle fois sur le visage du Poufsouffle et Seamus ne peut s’empêcher de sourire pour la énième fois, bien trop amusé par la situation, bien trop content de pouvoir montrer ça à Bagshot. Il aura quelques bases de défense grâce à lui, ça lui plaît assez, il doit avouer. “T’as l’air légèrement plus prêt que lorsque t’as débarqué avec la bouche en coeur, en tout cas.” Il lui fait savoir, quand même, parce que Seamus sait placer de beaux compliments par moment aussi, la preuve.

Et bientôt il se retrouve à lever ses gants, lui faisant signe de frapper dans l’un tout en se mettant dans une position de défense, prêt à esquiver au cas où Boris trouve ça plus drôle de frapper son visage plutôt que l’endroit désigné. Ca ne serait même pas une surprise.

Tu t’attendais à quoi ? Et bien, premièrement, à à peu près tout sauf ça. Tu avais davantage visualisé quelque chose d’un poil plus romantique, comme une escapade entre deux cours, à l’orée de la forêt interdite (pas trop loin dans la forêt non plus, tu tenais à la vie), ou le tour du lac, qui sait, tu aurais peut-être attendu qu’il insiste suffisamment pour finalement retirer tes mocassins pour faire trempette avec toutes les créatures terrifiantes à quelques mètres de profondeur. Ou pourquoi pas une passade dans la tour d’astronomie, alors ! A l’époque où Umbridge ne sévissait pas encore, beaucoup de couples s’y cachaient pour roucouler en paix.
Bah, pour ça, il aurait tout d’abord fallu que vous soyez un couple. Et pas seulement deux camarades de promotion avec une fâcheuse tendance à se regarder trop longtemps en cours.

Seamus enrubanne tes doigts dans du bandage molletonné, n’y allant pas avec le dos de la cuillère en ce qui concerne les couches de protection. C’est pas ce qu’il y a de plus élégant en terme d’uniforme sportif mais la rigueur avec laquelle il s’attelle à la tâche t’arrache même un soupir pensif. Tu n’es pas vraiment dans de bonnes conditions pour lui servir une excuse digne de ce nom, si bien que tu te contentes de hausser les épaules. « Bah j’sais pas ; pas de la bagarre, en tout cas… » que tu improvises, l’air détaché jurant un peu avec tes joues roses, tandis qu’il enfourne tes paluches dans les gants de boxe. L’émotion te trahissant, tes doigts allaient bien vite faire trempette à l’intérieur du cuir.
Tu tiques un peu lorsqu’il vérifie la fermeté des liens du bout du doigt, craignant qu’il ne surprenne l’intérieur de ton poignet à être trop moite. Tu rabats tes poings contre toi avec agitation. « Oui c’est bon, ça va. »

Tu restes un peu interdit au milieu du ring improvisé, alors que Seamus n’a de cesse de s’agiter. Tu n’essayes même pas de l’imiter, jusqu’à ce qu’il t’y encourage, de peur de te ridiculiser face à un public inexistant. C’était dans ta tête qu’il y avait constamment un audimat ; pas étonnant que tu ne laisses jamais rien dépasser, si ce n’est un air atterré par l’espèce de parade nuptiale à laquelle Seamus à l’air de s’adonner.
Tu lèves vaguement les poings à ton tour, ne faisant ainsi office que de pâle copie à la dégaine de ton obligé Gryffondor. « De garde quoi ? Je dois garder quoi ? » que tu gémis. Soudain, tu as l’air de faire enfin les connexions, et tout ton corps maigrichon se tend. « Attends quoi ??? Tu vas me faire mal ?? » Non vraiment, tu n’écoutais que ce que tu voulais entendre. « J’y comprends rien ; c’est quoi l’intérêt ?? Je vais quand même pas te frapper ? » que tu rouspètes en repoussant ses gants plats de devant sa figure d’un geste mou. « Pour une fois que tu m’as rien fait ! »

Seamus jette un coup d’oeil dans la direction de Boris en se demandant bien ce qu’il avait en tête, comme s’il lui avait déjà proposé des plans plus intéressants pour lui, c’était déjà assez rare qu’il vienne le chercher à la fin d’un cours comme ça. Mais aujourd’hui, c’est différent, aujourd’hui il a eu envie de passer un moment avec Boris, un peu loin des autres, à lui montrer un peu à quoi il tuait son temps perdu. “Pas de la bagarre,” qu’il se retrouve à répéter bêtement, jetant un coup d’oeil autour d’eux pour voir en quoi il s’agit de bagarre exactement, pour lui c’est un sport. “C’est une bagarre seulement si t’as un truc contre moi, Bagshot,” souffle finalement le Gryffondor en plantant son regard dans le sien et il reste quelques secondes comme ça, un sourcil haussé, comme s’il allait lui donner une réponse positive.
La seconde d’après, Seamus est en train de vérifier si les gants sont bien mis et ne peut s’empêcher de hausser un sourcil en sentant Boris récupérer rapidement ses mains contre lui, comme si le toucher lui avait fait mal. Dans un simplement hochement de tête, le Gryffondor se détourne ensuite pour aller récupérer ses propres gants plats, ceux qui servent aux entraînements, et se décide à montrer quelques bases à Boris quand même.

L’air qu’offre Boris est presque un souvenir à garder et Seamus ne peut s’empêcher de pouffer un petit peu en arrêtant de sautiller, relâchant même le mouvement de ses bras en comprenant que le Poufsouffle n’allait pas balancer ses poings contre lui. “Qui a parlé de te faire mal, Bagshot ? A moins que c’est dans ça que tu trempes, pas de problème, mais… Non.” Il rajoute, dans un léger soupir, et secoue légèrement sa tête en se demandant où est-ce-qu’il va trouver toutes ces histoires. Bon, peut-être qu’une ou deux fois les choses se sont légèrement envenimées entre le Poufsouffle et lui, peut-être bien que le ton est monté, peut-être bien, mais ça n’a jamais été très sincère.
Seamus relève ses gants ensuite pour lui faire signe de taper dedans même si Boris trouve encore quelque chose à redire, quelle surprise. “C’est pas moi que tu frappes, c’est dans mes gants, c’est pour t’entraîner, y a personne qui ne sera blessé à la fin…” Enfin. Ca reste à prouver mais c’est un détail qu’il préfère taire face au Bagshot, surtout que ce dernier s’exclame maintenant qu’il ne lui a rien fait.

Si ce n’est que ça.
La seconde d’après Seamus est en train de taper à l’aide de son gant plat dans les flancs de Boris. Ca ne fait pas très mal, après tout ce n’est qu’un coup avec le gant plat, ce n’est pas son poing qui s’écrase contre lui. Ca aurait été plus douloureux ça. Mais il n’empêche que Seamus a mis assez de force pour que Boris se bouge un peu et réagisse, pour qu’il ne reste pas là à se plaindre de devoir le taper, surtout que ce n’est pas vraiment lui.
“Mieux ?” Seamus demande alors qu’il réitère son coup, au cas où il n’avait pas assez d’impact la première fois et que Bagshot ne doute, ça serait bien contraignant. Et le lion se recule d’un pas, un sourcil haussé dans la direction de Boris, prêt à frapper une nouvelle fois si ce n’est pas suffisant et prêt à se protéger aussi au cas où il décide quand même de se mettre à le frapper. Derrière ses gants, en tout cas, Seamus affiche à nouveau son sourire de petit con premier de la classe, c’est sûr que c’est beaucoup moins drôle si Bagshot ne se décide pas à participer et à frapper lui aussi, autant tout arrêter tout de suite.

La seconde que Seamus laisse planer en demandant si tu avais un truc contre lui aurait été l’occasion de lui asséner absolument tout ce que tu lui reprochais. Oh, que des incidents gravissimes à la hauteur d’un gamin pourri gâté de seize ans. Des broutilles, en somme, de l’ordre de la remarque déplacée ou de l’absence d’espace personnel. De l’ordre de familiarité alors que tu étais entouré de la crème de la crème des Serpentards ou d’une brusquerie qui t’avait arraché quelque émoi cutané. Bref, une montagne de reproches à tes yeux, qui te faisait penser que tu étais grand seigneur à continuer d’accepter de lui adresser la parole. Parce qu’il mettait ta patience à rude épreuve, à croire qu’il ne pouvait pas se passer de toi…

« Je ne trempe dans rien du tout ! » que tu couines, le nez levé. Tu ne trempais dans rien hormis dans les lettres d’amour anonymes aux professeurs et autres élèves d’années supérieures, hormis dans l’espionnage fourbe coincé dans les casiers des joueurs de Quidditch, hormis dans quelques baisers échangés aux garçons curieux. Tu trempais dans tout ce que tu pouvais tirer de ta soif d’être adulé par les uns, jalousé par les autres. C’est que maman savait y faire, et t’avait enseigné, malgré elle, l’art de la bouche en coeur et de l’oeil de biche. Autant de douceur qui avait tapé dans l’oeil -trop souvent au beurre noir- de Seamus.

Tu vas même pour lui asséner une petite remarque à double sens de derrière les fagots que le malotrus perd patience et se met à te bourriner gentiment les côtes et le ventre. « Nan mais ça va pas ?! » Tu te rues vers l’arrière, mais il persiste et son allonge vient te picorer de tous les côtés. Tu rouspètes, ta voix encore trop aiguë pour être honnête, le souffle court de l’adolescent qui rechigne à la proximité avec ses petits camarades.
Seamus a à peine effectué un pas en arrière que tu bondis, tu te cabres plus qu’autre chose comme un bouquetin sous firewhisky. Ton bras fait un moulinet et vient taper, pas avec la plus grande des forces, mais certes avec vigueur, dans la mâchoire de ton infortuné obligé. Ta riposte est si imprévisible qu’elle pare la défense de Seamus. Le coup est plus lourd que ce qu’on aurait pu imaginer pour un premier crochet de ta part. Mais, après tout, c’est ce que le Gryffondor recherchait. Et tu es le premier à être surpris par ton coup de poing. Tu portes tes gants à ton visage, les yeux ronds comme des billes. « Oh merde, Finnigan, ça va ??? » C’est que les bagarres, habituellement, tu les observais de loin, aussi, tu n’avais jamais fait de mal à quelqu’un, si ce n’est par ta langue de vipère.

Avec l’adresse douteuse conférée par tes gants, tu te rues sur lui, lui attrapant la figure et collant un baiser sur sa joue endolorie.
Aujourd’hui encore, les chercheurs sorciers se demandent pourquoi tu avais recouru à un tel réflexe. Peut-être qu’il s’agissait là d’une réponse à la douleur que ta mère avait déjà eu à ton égard, quand tu étais enfant. Peut-être même que ce n’était pas toi qui avais agi, mais une Mimi geignarde passant dans le coin et qui voulait coller un bécot à un Seamus Finnigan fort joli pour son âge.
Toujours est-il que le mal est fait et le bisou asséné quand tu réalises ce que tu venais de faire. Tu restes interdit, les poignets au repos sur les épaules de ton camarade, les mains trempées d’émoi dans leurs gants trop lourds.