Le printemps commençait à pointer le bout de son nez. Sur la pelouse de la Fawkes, on apercevait çà et là les premières marguerittes sortir de terre. Les journées se faisaient plus longues et le soleil moins rare. Tu avais toujours apprécié cette atmosphère si particulière, qui sentait bon le renouveau. Et cette année encore, tu éprouvais un irrépressible besoin de faire table rase du passé, afin de pouvoir avancer vers des jours meilleurs. La capture de Neville avait été un sacré coup dur pour l’Ordre, et encore plus particulièrement pour tes enfants. Et dire que Ronald était lui aussi présent ce soir-là, et que ces lâches l’avaient soumis au sortilège de l’Imperium…

Deux petits coups fermes résonnent soudain contre la porte de ton bureau. Tu es pratiquement persuadé de savoir qui se trouve de l’autre côté. Et alors que tu pousses la poignée, ton visage s’éclaire à la vue de Ginny. Comme toujours, lorsque tu es en présence de tes enfants, tu t’efforces de ne rien laisser paraître des troubles qui t’animent. “J’ai trouvé ça lors de ma dernière sortie. Je me suis dit que tu saurais sûrement en faire bon usage.” Un air espiègle juché sur le visage, Ginny te tend une petite boîte à musique ensorcelée. Dès lors que tu tournes la manivelle, les premières notes de l’un des plus grands succès de Célestina Moldubec résonnent sur le seuil de ton bureau. Un rire franc s’échappe alors d’entre tes lippes. Cela faisait des années que tu n’avais plus entendu la moindre chanson de la fameuse Sorcière Chantante. Tu en viens presque à te demander si Ginny avait véritablement trouvé la boîte à musique, où si elle ne l’avait pas elle-même ensorcelée à des fins obscures. “Ah au fait, Percy nous a fait parvenir quelques boîtes de ces sablés que tu aimes tant. Ils sont dans la cuisine, si jamais tu veux descendre et en récupérer avant que Ron ne les trouve.” Avant même que tu n’aies eu le temps de la remercier, Ginevra avait déjà tourné les talons. Ces jeunes, toujours de plus en plus pressés… Mais son précieux conseil n’étant pas passé inaperçu pour autant, tu verrouillas la porte de ton bureau et descendis vers le réfectoire. La petite boîte à musique rebondissant contre ton flanc à l’intérieur de la poche de ta veste, t’arrachait encore un sourire béat lorsque tu arrivas finalement à destination.

A ton plus grand étonnement, les longues tables, qui occupaient habituellement la pièce, avaient été repoussées contre les murs, pour ne laisser plus qu’une petite table ronde trôner au milieu de la salle. Sur une nappe blanche, on avait dressé le couvert pour deux personnes. D’un air perplexe, tu t'avances prudemment vers le centre de la cuisine. Pourquoi Ginny t’aurait-elle incité à venir ici, alors que quelqu’un avait visiblement prévu un repas en tête à tête et n’apprécierait certainement pas d'être dérangé ? Soudain, la porte de la cuisine s’ouvre derrière toi, et Molly apparaît sur le seuil. Tu la gratifies d’un sourire, avant de jeter un coup d'œil au calendrier accroché sur le mur à quelques centimètres de l’entrée. Et tout devient alors beaucoup plus limpide. “Joyeux anniversaire de mariage, Molly.” Malgré tout ce qui avait bien pu se passer ces derniers mois, les enfants, eux, n’avaient visiblement pas oublié cette date si symbolique pour votre famille.

C’est un sourire franc et sincère qui vient étirer tes lèvres alors que Molly franchit la porte de la cuisine avec cette énergie redoutable, que tu lui connais. "Laisse-moi deviner, les enfants t’ont raconté que quelqu’un avait mis la pagaille dans la cuisine ?” A en juger par l’expression furibonde qui s’était glissée sur son visage, tu étais à peu près certain qu’elle s'attendait à mettre la main sur quelques garnements qui auraient mis les lieux sans dessus dessous. Tu te rappelais encore comme si c’était hier, de ces soirées d’été où tu arrivais au Terrier après le travail, et où tu voyais les jumeaux faire enrager leur mère pour un oui pour un non. Mais avant que tu n’aies le temps de te replonger plus longuement dans tes souvenirs, la voix de Molly retentit à nouveau. “La tenue que tu portes te va à ravir.” C’est un regard tendre et bienveillant que tu poses alors sur elle. Molly a toujours été la seule femme à faire vibrer ton coeur, peu importe les vêtements qu’elle portrait ou la coiffure qu’elle arborait. Tu n’avais jamais aimé qui que ce soit d’autre en dehors de ton épouse. Elle avait été ton âme sœur dès le premier jour où vos chemins s’étaient croisés. Et rares étaient les couples dont on pouvait en dire autant, surtout dans l’univers carnassier des mariages arrangés entre sorciers de sang-pur.

Un rire s’échappe d’entre tes lippes alors que Molly extirpe une bouteille de firewishky de ce qui semblait être une cachette tout à fait audacieuse. Même après toutes ces années, ton épouse parvenait encore à te surprendre. “Avec grand plaisir.” Bien sûr que tu allais te joindre à elle pour célébrer l’occasion. Et alors que tu viens t’asseoir auprès d’elle, tu sens les contours de la boîte à musique dans la poche intérieure de ta veste. “Et puisque Ginny a pensé à tout… que dirais-tu d’écouter l’une de tes chansons préférées ?” Tu sors le petit objet de et le poses sur la table, après avoir tourné la manivelle. Les premières notes de la chanson résonnent alors que Molly se replonge dans vos souvenirs communs.  “Il faut croire que l’on était plus discrets que nos enfants, lorsque l’on enfreignait le règlement.” Oh bien sûr, vos excursions nocturnes dans les cuisines étaient alors bien plus innocentes que les petites affaires de Fred et George, où les aventures de Ronald en compagnie de Harry et Hermione. Mais si Minerva avait eu le malheur de surprendre l’un de vos rendez-vous secrets, il y a fort à parier qu’elle se serait mise sérieusement en colère. Rien qu’en pensant à la tête qu’elle aurait fait, tu glousses comme l’adolescent que tu avais été il y a fort longtemps. Décidément, la soirée s'annonçait tout à fait distrayante.  “Je suis content d’être là, rien qu’avec toi. Cela m’avait manqué.” Cela paraissait irréel, tout simplement hors du temps, de passer un moment ainsi en tête à tête avec ton épouse, alors qu’au dehors, le monde était encore et toujours déchiré en deux. Et cela te rappelait à quel point tu pouvais parfois envier celles et ceux qui jouissaient pleinement de leur liberté aux côtés de cet odieux gouvernement.

Molly avait toujours été une femme incroyablement forte et courageuse. Elle affrontait les défis de la vie avec une détermination sans faille. Qu’importe les drames qui pouvaient s’abattre sur votre vie, elle ne se laissait jamais abattre et trouvait toujours le moyen de surmonter tous les obstacles. Elle était un modèle d'inspiration pour tous ceux qui la connaissaient, et plus particulièrement pour les jeunes recrues de l’Ordre, qui ne croyaient plus en rien. “Sans moi, tu aurais accompli les mêmes exploits, sinon plus.” À ses côtés, il t’avait toujours été aisé de te livrer tel que tu étais, sans artifice ni apparat. Tu pouvais lui dévoiler tes sentiments les plus profonds sans ressentir ne serait-ce qu’une once de gêne. Tu refermes finalement ta main sur la sienne alors qu’elle poursuit sa diatribe passionnée à ton égard. Molly était également une mère et une épouse incroyablement généreuse et attentionnée. “Ces derniers mois n’ont pas été des plus aisés. Mais je suis plus que reconnaissant que tu aies insisté pour que je continue à me battre aux côtés de l’Ordre. Tu m’as donné la force de continuer, de ne pas renoncer.” Tu ne la quittes pas du regard, tes yeux sont plongés dans les siens. Cet instant n’appartient qu’à vous. Et il était grand temps que vous vous retrouviez. Sa main posée sur ton cœur fait résonner les émotions les plus profondes et sincères dans ta poitrine. Molly avait été ton âme sœur dès le jour où vos chemins s’étaient croisés. Molly et Arthur, voilà un duo qui résonnait à l’unisson, qui avait toujours été une évidence. Le silence qui s’installe finalement entre vous semble bien trop précieux pour être brisé. Tu serais bien capable de passer les prochaines heures ainsi, relié à ton épouse par le contact de ta main sur la sienne. Mais puisque la soirée ne fait que commencer, autant en profiter pour en faire un dîner plus que parfait. “On cuisine ensemble ?” Tu quittes ta chaise sans pour autant relâcher la main de Molly, que tu attends quelques instants avant de l’entraîner à ta suite derrière l'îlot de la cuisine. Tu te détaches brièvement de ton épouse pour ouvrir le garde-manger et en inspecter le contenu. Bien que tu aies dans l’idée de concocter un repas réconfortant, tu ne tenais pas pour autant à vider les stocks de nourriture du Fawkes Learning Center. Ton choix se porte finalement sur des filets de poulet que tu comptais faire mariner avec du citron et quelques herbes. D’un coup de baguette magique, tu fais léviter les ingrédients vers le plan de travail, avant de ramener la bouteille de firewhisky jusqu’à vous. Tu remplis deux verres du liquide ambré, et en tends un à Molly. “A cette soirée, à nous.” Une fois le toast porté, tu sirotes une mince gorgée d’alcool, puis, le verre toujours dans une main, tu te rapproches de Molly et viens déposer un léger baiser sur ses lèvres.