C'est une feuille séchée. Une simple feuille séchée. Elle n'est même pas plus grande que la paume de sa main. Alors il devrait bien y arriver. Il a envie d'y croire Hannibal. Véritablement envie d'y croire. Il prend une profonde inspiration, se concentre et tend sa baguette magique en direction de la feuille. « Wingardium Leviosa. » qu'il souffle avec une féroce conviction, avec l'envie brûlante de voir la feuille se soulever. Et elle se soulève la feuille, elle commence à flotter légèrement. Alors, l'espace d'un instant, Hannibal se surprend à sourire un peu, soulagé qu'il est. Un soulagement qui est malheureusement de bien courte durée car bien vite, la feuille retombe au sol alors que la baguette magique est toujours brandie dans sa direction, alors que le sort est censé fonctionner. Sa mâchoire se crispe, ses sourcils se froncent à mesure que sa respiration s'accélère sous l'effet de la rage qui s'impose à lui. Il abaisse sa baguette un instant puis, la soulève de nouveau. « Incendio ! » vocifère-t-il sous le coup de la colère en pointant sa baguette en direction de la feuille mais il n'y a que quelques flammèches qui sortent de sa baguette. Rien de bien puissant. Rien qui ne puisse permettre à la feuille de prendre feu. « Damn it ! » jure-t-il entre ses dents avant d'envoyer valser sa baguette un peu plus loin dans l'herbe. Il se laisse finalement tomber contre un arbre, s'adossant au tronc avant de plier ses genoux et de venir y poser son front dans un soupir las. Il a beau essayer, même les plus petits sorts ont du mal à fonctionner. Pourquoi ? Qu'est-ce qui provoque ce problème ? Il sait qu'il n'est pas le seul et imagine que c'est lié à ce qu'ils ont vécu à Gracefield mais pour autant, cela ne rend pas la situation plus facile à accepter. Non, il n'accepte pas, Hannibal, de n'être plus que l'ombre du sorcier qu'il était. Il n'est déjà plus que l'ombre de l'homme qu'il était depuis la mort de Hagen, alors, que ses pouvoirs lui fassent défaut est un coup supplémentaire qu'il a du mal à supporter. Les minutes passent, les pensées se font plus sombres et il finit par se redresser pour aller récupérer sa baguette échouée dans l'herbe un peu plus loin. Il a ce regard pour le lac Hannibal et l'espace d'un instant, il se dit qu'il pourrait y plonger, ne pas nager et se laisser noyer. L'espace d'un instant, il se dit que ce serait plus facile d'abandonner. Mais bien vite, le visage de son jumeau, figé dans la mort, s'impose à lui.

Hagen a donné sa vie pour qu'il s'en sorte.
Il n'a pas le droit d'abandonner.

Le pas lourd, il retourne en direction du manoir, ce chez lui temporaire. Où va-t-il aller après ? Est-ce que l'Ordre va encore vouloir de lui dans leurs rangs s'il n'est plus capable de jeter le moindre sort de façon correcte ? A-t-il seulement envie de continuer à se battre comme il le fait depuis des années ? Le temps passé à Gracefield lui a fait beaucoup de mal, plus mentalement que physiquement et la mort de son jumeau a été le coup de grâce. Il est paumé Hannibal. Véritablement paumé. Perdu dans ses pensées, alors qu'il arrive aux portes du manoir, il n'entend pas qu'on l'appelle. Il faut qu'on vienne se placer à sa hauteur pour qu'il réalise que quelqu'un essaye d'attirer son attention. Il bat des cils, sort de ses pensées et tourne son visage en direction de la silhouette qui vient de le rejoindre. Il est surpris de voir Arthur Wesley à ses côtés, ne l'ayant pas entendu arriver. « Hello Arthur. » qu'il dit finalement en esquissant ce qui ressemble à un sourire mais ce n'est pas un vrai sourire. Il n'est pas véritablement capable d'en avoir un, pas plus qu'il n'est capable de produire un sort convenable. « Sorry, I didn't hear you. » s'excuse-t-il bien vite avant de glisser ses mains dans les poches de son long manteau noir. Malgré le temps clément, Hannibal ne porte que du noir, se cache dans des habits sombres. Aussi sombres que ce qu'il voit dans le regard du Wesley et ce n'est pas nouveau. Il y a ce voile dans le regard d'Arthur, ce voile qui serre le cœur de Hannibal, qui lui a toujours serré le cœur, depuis que l'homme a perdu l'un de ses fils. Qui lui serre encore plus le cœur aujourd'hui parce ce voile, il le voit dans son propre regard lorsqu'il s'observe dans le miroir. Le voile de la mort. D'avoir perdu un être cher.

Hannibal aurait préféré n'avoir jamais à ressentir une pareille douleur.

Hannibal parvient à esquisser l’ombre d’un sourire à la gentille attention d’Arthur lorsque ce dernier emploie la langue natale de Hannibal pour le saluer. Il parlait l’allemand avec son jumeau mais ne l’a plus parlé depuis si longtemps à présent… Y’a cette mélancolie qui serre le coeur du sorcier en y pensant. « No, I just… I was lost in my thoughts. » qu’il précise alors qu’Arthur s’excuse de ne pas avoir parlé plus fort en espérant ne pas avoir effrayé Hannibal. Oui, il était perdu dans ses pensées et ce n’est pas la faute d’Arthur si Hannibal n’a pas percuté tout de suite qu’il s’adressait à lui. Les mots suivants font se crisper Hannibal alors qu’il perd son sourire et que les traits de son visage se tendent. Ainsi, Arthur a entendu parler des problèmes que les sorciers survivants de Gracefield rencontrent. Il baisse le visage, évite le regard du Wesley pour la bonne et simple raison qu’il ressent une forme de honte face à cette magie défectueuse. Il préférerait que tout le monde ne soit pas au courant mais visiblement, l’information a déjà fait le tour de tout l’Ordre. Pendant un instant, il a envie de mentir à Arthur, de lui dire que tout va bien pour lui, qu’il ne rencontre aucun problème avec sa magie. Parce qu’il a peur que le regard de son aîné change sur lui. Alors, sur le moment, il ne répond rien, se fait évasif par son silence. Arthur enchaîne bien vite et a des mots vraiment réconfortants et gentils. Hannibal parvient donc à esquisser de nouveau un petit sourire. « Thank you. » qu’il répond simplement au départ, ses doigts se crispant à l’intérieur des poches de son manteau. Son regard se fait toujours fuyant mais il réalise bien vite qu’il ne peut pas éviter le sujet, que la question d’Arthur a été franche et directe, et qu’il attend probablement une réponse qui y ressemble. Alors il soupire Hannibal. « I haven’t hm... » Les mots sont difficiles à prononcer, plus qu’il ne l’aurait pensé. « I am affected. » qu’il finit par dire, à voix basse, le ton lourd. Il baisse de nouveau le regard, se met à fixer ses pieds. « I haven’t been able to... » Un autre silence, sa gorge se serre, se noue douloureusement. Parce qu’il aimerait tant ne pas être affecté, être capable d’utiliser sa magie comme avant… Comme avant… « It’s not good Arthur. » murmure-t-il avant de relever tout doucement, ce regard toujours honteux vers Arthur. « I know I’m not the only one but it’s hard. Being that… Incapable. » C’est un autre soupir qui s’échappe des lèvres de Hannibal. « You said you want to investigate. Do you think you can find what’s causing this ? » demande-t-il finalement avant d’ajouter : « Can you help me ? » Avec cette petite pointe d’espoir qui naît au creux de son coeur. Peut-être qu’Arthur va pouvoir l’aider, qu’il va trouver des réponses à ces questions qui restent pour le moment malheureusement sans réponses. Il a besoin de ce petit espoir Hannibal. Il a besoin de pouvoir se raccrocher à quelque chose. Même à un tout petit rien.

HJ: