Disclaimer : Nous sommes en 2020 mais Jean Michel Blanquer et Najat Vallaud-Belkacem n'ont pas été ministre de l'éducation nationale et les programmes sont les mêmes que pré-2016 As a treat. (Pas de pandémie non plus, toujours as a treat)

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Le mercredi après-midi au lycée Simone Veil, dans le dix-huitième arrondissement de Paris, était toujours un moment qui paraissait hors du temps. Les couloirs s’étaient vidés de la grande majorité de la population estudiantine pour n’y laisser qu’une poignée de terminales stressés en quête de cours de soutien pour décrocher la mention TB au bac, les agents d’entretien qui profitaient du vide pour nettoyer salles et tables et ceux que les non-concernés appellent, avec un certain mépris les artistes. À comprendre par là les options facultatives musique, art-plastique et théâtre qui, pour des raisons de compatibilité d’edt, se retrouvaient à devoir hanter les salles de l’établissement alors que la plupart de leurs camarades profitaient de la demi-journée de libre pour aller se poser à Montmartre.
Océan.e faisait partie de ces heureux élus ; élève de TL option lourde théâtre et facultative musique, iel était même l’archétype de l’artiste et se trimballait presque tous les jours (et pas uniquement le mercredi) avec l’étui de sa flûte traversière sur le dos, profitant de n’importe quel moment de pause pour en jouer un morceau,  sur les marches de l’aile A, en compagnie de Lo, sa bff. Il fallait bien qu’elle puisse en profiter à un moment sa besta, parce que Lottie ne venait pas au lycée le mercredi aprèm — c’était le créneau de son entraînement ou de ses compets de judo.
Les heures sans Lo auraient pu être chiantes à crever — Océan.e passait quasi chaque heure de cours collé.e à la rouquine, jouaient aux cartes plutôt que d’écouter le prof de philo parler de Spinoza et imaginaient mille scénarios de first date entre M. Travers un de leur CPE et Mlle Abbott la psy scolaire (depuis que l’année dernière un groupe de seconde les avaient remarqués près de la station de métro à se frôler la main, les rumeurs allaient bon train) mais fort heureusement pour ellui le cours de musique de treize-trente à quinze-trente était bien trop prenant pour qu’on y trouve du temps pour s’y ennuyer. Iel avait choisi L’éléphant du Carnaval des Animaux de Saint Saens comme un des morceaux à présenter le jour de l’oral du bac et la professeure était au moins aussi exigeante que ceux du conservatoire.
Après ça, au lieu de remballer ses affaires pour fuir jusqu’à l’appartement où l’attendait son père (ugh) Océan.e préférait monter les trois étages qui séparaient la salle de musique du foyer des élèves où se tenait, de seize à dix-huit, le club théâtre. Ce n’était pas un cours noté avec feuille d’appel, mais simplement un groupe que M. Williams, le prof de théâtre, avait décidé de mettre en place pour les passionnés et ceux qui n’auraient pas eu l’occasion de caser le théâtre dans leur curriculum mais qui voudrait tout de même goûter aux feux de la rampe quelques instants. La production qu’ils parviendraient à monter dans le cadre de ce petit club pourra être jouée en mai, juste avant celle des théâtreux option lourdes. Autant dire que ça mettait la pression ; sauf à Océan.e qui allait jouer dans les deux en raison de son choix d’option. Iel pouvait donc parfaitement mesurer le taux d’avancement des deux productions et s’amuser du stress grandissant de M. Williams qui suait sang et eau pour tirer quelque chose de potable de ce club composé d’amateurs enthousiastes mais pas vraiment entraînés à suivre les instructions une fois sur scène.
On était début décembre et les gens du club n’étaient toujours pas d’accord sur la pièce à adapter. On s’échauffait en impro et quelques déclamations depuis septembre mais maintenant qu’il fallait vraiment trouver une œuvre, la couper et l’adapter pour l’apprendre c’était une autre histoire. M. Williams avait même invité le comédien intervenant sur les cours de l’option lourde (que tout le monde appelait Herbert et qui avait joué dans plusieurs productions à l’Odéon et même une web série !) à venir au club pour tenter de mettre un peu d’ordre. Mais d’expérience, Herbert apportait plus de chaos que de calme…
Le club avait commencé depuis un quart d’heure, plus ou moins (il manquait d’ailleurs Nahel) et ils étaient plusieurs à grogner qu’ils n’arriveront jamais à trouver quoi que ce soit et qu’ils voulaient juste faire de l’impro et apprendre à parler correctement sans bafouiller et non pas se lancer dans une super-production hollywoodienne, au grand dam de M. Williams et Herbert qui voulaient les motiver pour une sympathique adaptation de Dom Juan, quand on frappa à la porte.
C’était le retardataire qui entrouvrit la porte avec un petit sourire plat avant de s’excuser et de lâcher, en ouvrant un peu plus grand la porte : « J’amène un nouveau, M. Williams ? Je peux ? Je me disais comme on avait encore rien décidé… » Et M. Williams de soupirer qu’on souligne un peu plus son échec de cette manière avant de lui faire signe de la main d’entrer : « Non, bien sûr… fais-le entrer. Plus on est de fous comme on dit… » Il avait bien l’air de vouloir se coller au fond d’un lit, M. Williams, et de ne plus jamais avoir à en sortir.

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Dan ne devrait pas être ici. Il le sait. Il l’a dit, d’ailleurs, à Nahel. C’est une super mauvaise idée. Il devrait être en train de réviser ses maths. Oui, même s’il sort tout juste d’un cours de soutien en physique, ce n’est pas assez, jamais assez, surtout s’il doit ramener ses notes à son père. Et son père, il comprend pas que M. Szopen est le pire prof’ de math que le monde ai jamais créé, qu’il est d’une insensibilité rare, qu’il oublie parfois qu’il est pas en cours avec ses maths sup. Dan tremble vraiment à l’idée de le retrouver l’année prochaine s’il rentre dans la prépa Simone Veil.
Bien sûr, comme tout le monde, il rêve d’Henri IV mais comme lui dit si bien Mordred « C’est pas avec tes notes en trigo que tu vas aller dans une vraie prépa, Marsh ». Dan n’apprécie pas vraiment Mordred et il se demande souvent pourquoi il se retrouve assis pas loin de lui, avec lui dans les heures de trou, ou dans le même groupe de travail pour les révisions de physique-chimie. Heureusement, Nahel n’a pas invité Mordred au club de théâtre, il a invité Dan, et de toute manière Mordred aurait sûrement dit un truc du genre « Ça donne pas de points au bac et ça fait même pas bien sur le dossier ». Mordred aurait, aussi, sûrement eu quelque chose à dire sur la présence de saon demi-adelphe mais ça, Dan n’en sait encore rien.
Il sait juste que son Mordred imaginaire a un peu raison.
— Non mais je devrais pas venir, et si mon père apprend que je révise pas ? En plus, ça donne même pas de points pour le bac…
Ce à quoi on lui répond que son père n’a aucun moyen de le savoir. Ce qui est vrai. Et que tout n’est pas à propos du bac. Ce qui n’est pas si vrai. Et puis ça le détendra, et il en a besoin, ce qui est un peu vrai. En plus, c’est une façon pour Nahel et Dan de passer du temps « de cours » ensemble (ils sont ce genre de garçons pour qui c’est important). Séparés depuis que Nahel a dramatiquement décidé de rejoindre les L, ils ne se retrouvent même pas en option facultative : Dan est en art et Nahel en musique. En première ils avaient le sport du jeudi midi en commun, mais avec l’emploi du temps de Dan c’est juste impossible et ça passe par une vraie inscription validée par son père, qui doit payer. Et là, là son père il lui dirait que cette année, il n’y a vraiment que le bac qui compte.
Et surtout, ses deux premiers trimestres pour son dossier de prépa.
Tout ça pour dire que, vraiment, vrai de vrai, Dan ne devrait pas être là.
La seule raison qui tienne vraiment la route, dans toute cette histoire, c’est le prof’ du club. Numa. Que tout le monde appelle M. Williams même si Dan galère complètement, d’avoir quasiment grandi avec. Jusqu’à ses sept ans. Jusqu’au divorce de ses parents, du départ de sa mère et que tout, absolument tout parte en vrille. En arrivant au lycée Veil, Dan a bien espéré retrouver le lien vers sa mère à travers Numa mais il ne l’a jamais eu en prof’ de français. Abonné à Mme Travers. Et maintenant qu’il n’a plus de français (Dieu merci) il n’a jamais vraiment réussi à réaborder l’homme de son enfance.
Ce club, c’est un peu le moyen de lui reparler.
Savoir comment va sa mère.
Si elle pense encore à lui ou si, vraiment, elle s’en fout.
Et puis on a toujours dit à Dan qu’il serait super sur scène alors… Pourquoi pas ?

Quand ils arrivent en retard, Dan a envie de se rendre invisible derrière le dos de Nahel qui gère la discussion. Dan sourit, fait un petit signe de la main, et Numa a l’air un peu étonné de le voir, après avoir dit oui sans le remarquer. Ils s’échangent un long regard alors que Nahel le guide dans le groupe d’élèves assis par terre dans une logique clairement sociale.
— On va se mettre avec Océan.e, décrète-t-il à Dan qui accepte juste.
Il ne lui a jamais vraiment parlé, à Océan.e mais bien sûr qu’il sait qui c’est. Mordred s’est moqué de ses pronoms, de cette drôle de mode, ce qui a créé tout un débat et qui n’a fait qu’accentuer les différents entre les deux adolescents. Mais à part ça… ok il aime bien ses cheveux, il trouve ça super joli, toutes ces couleurs, et il a un peu l’impression de se mettre à côté d’un.e instagrammeur.se connu.e en s’installant à côté d’ellui mais sinon…
— Salut, lâche-t-il un peu bêtement mais avec un grand sourire. Désolé pour le retard.
Pourquoi il s’excuse à ellui pour ça ? Il ne sait pas, mais il se sait intimidé et après une remarque de Nahel que ça fait rire, remonte ses lunettes avant de se concentrer vers Numa pour voir ce qu’il va se passer. Il s’attend à un cours de théâtre et, clairement, n'est pas prêt pour ce qui va lui tomber dessus.

Océan.e lance juste un regard vers Nahel qui s’est décidé, de nulle part, à ramener un de ses copains. C’était pas quelqu’un de sa classe, parce qu’iel connaissait très bien tous les gens de L et que le garçon qui passe la porte avec un petit air timide derrière ses grandes lunettes n’est clairement pas un camarade littéraire. Sa tête lui revient finalement assez vite, le lycée avait beau être plutôt grand, cela restait un microcosme où les mêmes têtes finissaient par se répéter, et s’iel ne connaissait pas son prénom, iel avait au moins conscience que c’était un terminale, un S qui traînait souvent au foyer. Nahel et son pote vinrent s’installer à côté d’ellui et Océan.e les salua d’un geste de la main et d’un haussement de sourcils en direction de Nahel, l’air de dire : c’est le bordel, comme toujours. Il fallait bien dire que tant que M. Williams ne prendra pas de décision ferme, les élèves ne le suivront pas. Iel n’était pas pour l’autoritarisme professoral, mais même ellui se rendait bien compte que c’était parfois la seule chose qui pouvait fonctionner.
Le nouveau s’assit à côté d’ellui : « Salut. — Hi, » qu’iel répond, seulement, un peu étonné qu’il veuille lui faire la conversation. De le voir de plus près encore, ça lui revient un peu plus. C’est le genre de garçon mignon, assez popu mais discret. Le nez dans les bouquins sans doute s’il se retrouvait au lycée un mercredi après-midi. « Désolé pour le retard. » Iel lui répond par une moue étonnée, l’air de dire que ce n’était pas ellui qui gérait les retards ici. Avant de se retourner vers M. Williams qui appelait au calme en tapant dans ses mains, avant de se racler la gorge et de dire qu’ils allaient faire quelques exercices d’échauffement avant de finalement se mettre une bonne fois pour toute sur le projet de fin d’année. « Et si nous avons une nouvelle recrue nous allons peut-être pouvoir enfin nous mettre d’accord. » Tout le monde se tourna comme un seul homme vers le nouvel arrivant, les yeux plissés, ce qui fit rire Océan.e : « Woups, with great power comes great responsibility hein ? » iel lui fait, dans un murmure. Puis Herbert leur demande de se lever, avant de commencer à circuler entre eux pour les coller par deux, en faisant ses grands gestes volatiles habituels — aléatoirement évidemment, pour casser les groupes et la routine, disait-il. Sa main vint attraper l’épaule d’Océan.e puis celle du nouveau pour les coller l’un contre l’autre. Ah ben, il n’avait pas été cherché loin le Bébert. Pas le genre d’Océan.e de protester cependant, toujours prêt.e à faire avec ce qu’on lui donnait, que ce soit un.e futur.e oscarisé.e ou bien un.e débutant.e totalement perdu.e.
Iel lance une moue un peu souriante en direction du garçon et l’entraîne vers un coin de la salle : « Ouais viens, par-là on risque pas de se faire emmerder par les autres groupes. Faut souvent de la place avec l’échauffement. » Iel connaissait bien Herbert, et savait qu’il fallait prévoir de l’espace pour tomber par terre, ce genre de chose. « C’est quoi ton p’tit nom à toi ? Moi c’est Océan. » Avant de le scruter un peu plus et de hausser un sourcil. Là, iel se souvenait d’où iel l’avait vu. « Mmh, tu serais pas un copain de Mordred des fois ? Tu vois lequel ? » Pas comme s’il y avait plusieurs gars avec ce prénom stupide. « S, spé math option golf ? Je t’ai vu plusieurs fois avec lui. » C’était un rempart pour repérer les cons, de savoir qui pouvait bien être pote avec Mordred. Un peu dommage parce qu’il avait l’air sympa, le nouveau.

Il n’a jamais fait ça, qu’il dit le nouveau, et ça lea fait un peu sourire parce que ouais, clairement ça se voit que c’est pas le genre de garçon à être totalement à l’aise dans un groupe de théâtre. Il a des grandes jambes, des grands bras et comme beaucoup de mec du lycée semblait parfois encombré par tous ces centimètres qu’ils se traînaient. La poussée de croissance datait souvent un peu, et si certains ne s’en sortaient pas trop mal, d’autres gardaient cette gêne jusqu’au bac. « Moi c’est Dan, je suis en TS2. » Ça lea fait un peu hausser les sourcils : genre il était du style à claquer sa classe quand il se présentait ? Iel aurait dû donner la sienne aussi ? « Ok Dan de TS2, » qu’iel répond, un peu moqueur.se avant d’évoquer le sujet Mordred.
Et là, comme pour la classe, il répète le prénom avant de rajouter le nom de famille de son demi-frère. Il était un peu à cheval sur les manières le Dan. « Ouais Eguchi, y a pas trente Mordred dans ce bahut hein. » Et on n’était pas en Angleterre, où ils s’appelaient tous par leur nom de famille, comme dans Harry Potter. Ça donnait du style, y avait pas à dire, mais c’était pas très pratique. De toute manière Océan.e était on a first-name basis avec tout le monde, sauf les profs et le proviseur. Mais lui, iel n’arrivait même pas à prononcer où écrire son nom de famille correctement, même si c’était rédigé à la fin de tous les bulletins qu’ils recevaient. Von Bäume ? Von Baüme ? Iel faisait espagnol, pas allemand après tout.
Pour en revenir à Mordred, Dan se défendit d’être un de ses copains. Ouais, iel aurait mieux fait de dire pote, parce que ça prêtait à confusion. S’il y avait bien un truc qui lea dérangeait pas chez Mordred, c’était qu’il embrasse des mecs à la sortie du bahut. Mais Dan sembla comprendre tout de même l’objectif de sa demande puisqu’il précisa qu’il ne faisait que traîner avec lui parfois. Ok… Iel pince un peu les lèvres, tout à fait franc.he sur ce qu’iel pensait de cette relation. « T’es un spé maths option golf toi aussi ? » qu’iel ricane, sans cacher son mépris pour la chose. La hate des golfeur était très répandue parmi les L et ES et plusieurs classes de S (surtout les spé bio qui étaient traités comme les des scientifiques low-cost), iel n’avait pas franchement besoin de faire semblant d’apprécier ces péteux. Mais Numa les interrompit dans leur petite discussion pour donner les consignes de l’exercice.
Dan avait l’air un peu surpris, alors qu’Océan.e bougeait légèrement ses pieds, comme s’iel se gardait échauffé.e avant un marathon. Les bouteilles ivres, c’est le grand classique. Une histoire de lâcher prise et de confiance en l’autre, de se dévoiler et de se rendre vulnérable, tout ça. Océan.e y avait le droit très régulièrement, en option lourde. Et si la première fois un camarade l’avait laissé tout bonnement tombé, il n’avait pas recommencé après que Lottie lui avait collé un coup de genou dans les dents. « Tu veux commencer ? Pour me montrer ? » Lui montrer ? Iel sourit et passe une main dans ses cheveux aux mèches colorés : « T’as peur de pas avoir pigé la consigne ? Hey, les S c’est censé être l’élite de la nation, faut suivre le mouvement Dan ! » C’est pas franchement méchant, peut-être un peu moqueur encore mais Océan.e ne se voit pas totalement lâcher les basques d’un follower de Mordred. Iel ne va pas croire non plus qu’il serait capable de lea laisser tomber juste par méchanceté.
Il n’a pas l’air méchant, juste un peu perdu. Océan.e sait qu’iel est overwhelming comme disent certains, c’est p’tet pour ça. Et c’est l’effet club de théâtre aussi, ça a une ambiance particulière.
« Mais ouais, té-ka-té je te montre. Vas-y tends les bras. Comme ça… » Iel lui montre en tendant les siens, devant ellui, sans les écarter de côté. « Et tu me récupères sous les bras, tranquille. » Et de le regarder avant de bien se mettre devant lui : « Et j’te fais confiance hein, littéralement me laisse pas tomber Dan. » Puis iel se positionne bien, avant de se laisser tomber en arrière, sans tenter de se rattraper avec les pieds comme cela arrivait beaucoup dans les débuts. Iel sent les bras lea réceptionner, puis… plus rien ne bouge. Dan semble bloqué. « Hey… » iel souffle « Soit tu m’amènes doucement par terre, soit tu me redresses, mais là avec ma position c’est pas moi qui vais faire grand-chose, champion. » Fallait vraiment tout leur expliquer à ces scientifiques really…

Il finit par l’aider à se redresser, avec un petit rire gêné. Vraiment, ce n’était pas quelques exercices de confiance qui allait totalement le détendre lui, iel songea en se remettant sur ses jambes. « Ça va, ça a pas l’air dur. — Non, c’est pas fait pour être dur justement. Il suffit simplement de se laisser tomber. » Comme si c’était faisable en un claquement de doigt, mais Océan.e ne laisserait pas l’occasion de souligner la simplicité du geste. Même si ce n’était peut-être pas très sympa de mettre la pression à un garçon déjà un peu transpirant. Allez, c’était de bonne guerre. Et puis, c’était fait gentiment, s’il n’était pas en option golf, comme il le disait, c’était qu’il n’était pas irrattrapable. « Allez, si c’est pas dur on s’y met ! » qu’iel fait en le voyant regarder autour d’eux, comme un réflexe d’anxieux qui préférait voir ce qui se passait autour de lui pour prendre la température de la pièce et peut-être un peu copier sur le voisin. Mais il se reprend avec entrain, et tandis qu’Océan.e se positionne il se tourne et commence à se laisser tomber.
Océan.e n’a même pas le temps de recevoir quoi que ce soit qu’il s’était déjà reprit pour s’empêcher de tomber un peu plus, les yeux un peu surpris. Ce n’était pas franchement étonnant mais bon… « J’étais aussi bas quand je t’ai attrapé c’est… c’est vachement… » Iel a un sourire un peu plat, comme évident. « P’tet pas si bas puisque t’es plus grand mais bon… T’as de la marge encore avant de te vautrer. — Je dis pas que je te fais pas confiance hein, juste que… enfin… — Ben t’as peur de quoi ? Regarde mes mains sont là. T’as pas l’air bien lourd. Et puis je fais ça tout le temps en théâtre alors… » Iel lève même les mains pour venir prendre ses épaules, pour lui montrer qu’iel pouvait bien le tenir, les masser même un peu pour le détendre : « Et puis même si tu tombes ça fera pas si mal. Juste un petit caramel quoi. » Il avait un côté filiforme qui donnait l’impression qu’il pourrait se briser s’il venait à s’éclater au sol, mais bon ce n’était qu’une impression.
Océan.e finit par une tape dans le dos : « Tu sais quoi, faut libérer un peu ta tête, arrêter de trop réfléchir. Comme Zaheer, tu sais dans Korra ? Let go of your earthly tether. Enter the void. Empty, and become wind. C’est ça que tu devrais faire. Allez ! » Avant de se dire que si, comme il le disait si bien, son prof d’anglais était nul, il n’avait peut-être pas tout capté à ce qu’iel avait dit. « En gros… c’est laissez couler un peu. » En très gros. « T’as un air… tu connais Legend of Korra au moins non ? Avatar ? » Olala…

Il tombe de plus haut qu’il lui dit, ce petit malin. Ça lea fait un peu sourire, une petite moue à demi ironique à demi amusée avant qu’iel ne soit finalement totalement diverti.e par son air en l’entendant parler anglais. Pour finalement résumé le motto du bag guy de la saison trois de Korra en un motto un peu plus connu : « Ouais c’est ça, un peu ! » Mais bon, ce n’est pas ça qui le fera sauter dans ses bras apparemment, il a l’air un peu trop stressé par l’idée. Océan.e croise les bras pour arrêter de lui mettre la pression, à les garder tendu comme pour lui ordonner de se laisser aller.
Au moins il connait la référence. « Oow sweet ! Oui c’est ça. C’est pas aussi bien mais bon, y a des trucs bien, et puis l’animation ! Enfin et sans spoiler la fin… bref c’est cool, faudrait que tu regardes ! » Iel n’a aucune idée que le fait qu’il ait vu ça avec sa mère n’était peut-être pas que sweet comme Océan.e le disait mais que cela pouvait également cacher un blocage inattendu. Iel ne sait rien de la vie du jeune Dan, l’a juste croisé de temps en temps dans les couloirs et à la cantine, auprès de Mordred et de Nahel mais sans plus. Les méandres de sa vie familiale sont à mille lieux de sa connaissance. Et s’il se renfrogne un peu, Océan.e imagine que ce n’est peut-être que dû à son niveau en anglais qui semble le chiffonner. « Tu parles vachement bien anglais par contre ! » Iel hausse les épaules, avec une certaine forme de désinvolture, l’air de dire que ce n’était pas grand-chose. De fait, iel n’était pas non plus lea meilleur.e possible dans cette langue. À l’écrit, les fautes de construction lui résistaient, du lexique utilisé de façon impropre… mais iel pouvait comprendre les fanfictions, les séries en anglais et causer avec des copaines à l’internationale alors le reste lui importait peu. « Je galère trop moi, j’ai Macmillan en prof et on avance que dalle c’est effarant. » Iel pince un peu les lèvres, gonfle ses joues : « Ouais, on est dans la salle à côté, avec Nott, on entend parfois. Ça a l’air d’être pas facile tout ça. Nous… eh ça rigole pas. » Nott, en effet, n’était pas du genre à laisser quelqu’un parler en même temps que lui, tu le saoules, tu dégages, point barre. Alors ça ils avançaient, y avait pas à dire. Une idée lui vient : « Ben tu sais quoi ! On se trouve un aprem où on quitte un peu tôt et tu passes à la maison ? Je te ferais un peu bosser si t’as envie, je pourrais te photocopier mes fiches de cours. Et puis je pourrais p’tet te montrer le début de Korra, si ça te tente ? »
Océan.e n’invitait pas grand monde chez ellui, Lottie, de temps en temps y avait le droit, mais iel n’était pas assez proche d’autres camarades pour les faire venir dans l’appartement un peu particulier qu’iel partageait avec son père.
Mais c’était également l’âge où on agissait sur des coups de tête, où on invitait des garçons mignons à la maison sous prétexte de bosser la LV1.

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Sur le parvis du lycée Océan.e attendait que Dan sorte de son cours. Iels avaient réussi à se trouver un créneau après que le garçon a accepté son invitation, et le couperet était tombé sur le mardi, où les deux avaient l’heur de terminer à seize heures. Lottie était à côté d’ellui, les deux en tailleurs par terre. « Pff, il a intérêt à être sympa en tout cas sinon… » Lo avait été un peu surprise qu’Océan.e d’un seul coup s’intéresse à un gamin tout propret et en S comme Dan et était prête à réitérer sa promesse que si Dan faisait le bouffon, elle irait tester une nouvelle prise de judo sur lui. « Meuh non, il est cute vraiment. — Mouais… » Ah ben on se sentait soutenu.e. Iel lui donna un petit coup de coude. « Hey, lui fais pas peur stp. Je le trouve cute, ok ? » Au moins Lottie, même si elle n’était pas totalement emballée par l’affaire, promis de ne pas terrifier le damoiseau et se contenta de checker Océan.e et de lui dire à demain quand Dan sortit du lycée.
Iel lui fit un signe de la main pour le faire venir de son côté : « Ben vous traînez bien pour sortir vous. Votre prof vous a retenu ? » Avant de reprendre son sac qu’iel avait laissé par terre et de passer l’anse à l’épaule. « J’habite pas loin. Pas besoin de prendre le métro. T’es prêt ? Ça a été ta journée ? J’ai préparé des trucs d’anglais, genre du lexique pour les réponses argumentées que tu pourras apprendre pour t’aider un peu. Et des phrases toutes faites aussi. » Océan.e avait un débit de parole assez élevé quand iel le voulait, surtout quand iel était en face de quelqu’un qui lui plaisait un peu. Sinon, on pouvait vite lea prendre pour une tombe. Mordred en savait quelque chose.