2007 - MADONNA
Parfait.Voilà le terme exact qui caractérisait le membre le plus éminent et le plus important de ta famille. Marlon. Ton très cher cousin. Ton pilier. L’ancre qui te permettait de garder pied et de ne pas chavirer lorsque tes ténèbres t’assaillaient. Tu avais beau y penser, ressasser la chose, tu ne voyais aucun autre terme capable de si bien le caractériser et d’englober si parfaitement le millier de qualités qu’il possédait. Il symbolisait cet idéal que tu souhaitais plus que tout atteindre, ou simplement effleurer, si Merlin te le permettait. Ni ton père, ni ton frère, ni Myrthild, et encore moins Louis, n’était capable de surpasser ce parangon de perfection. Parfois, il t’arrivait de te demander comment il ne pouvait n’être qu’à la tête de la brigade de police magique. Quelle hérésie. Il méritait tous les honneurs. Il méritait de diriger la vaste île britannique et d’ouvrir un nouvel âge d’or.
La poupée, que tu étais, se trouvait savamment installée sur le sofa, ton très cher cousin à tes côtés. Les minutes s’écoulaient avec rapidité, comme chaque fois que vous vous retrouviez.
« Tu te souviens de cette photo Marlon ? Elle n’aurait jamais été possible sans toi… » Années après années, vous aviez entassé nombre de photographies familiales et voilà qu’en cette journée, vous vous perdiez dans la contemplation de l’un de vos albums. Les images se mouvaient et faisaient joyeusement danser vos réminiscences. Celle qui venait d’accrocher votre regard était spéciale et tu savais la chérir comme il se devait. Elle donnait à voir Marlon, plus fringuant que jamais, tenant dans ses bras ta poupée, ta chère Anne. Enfant d’un amour proscrit qu’il t’avait aidé à garder à tes côtés, te soutenant corps et âme face au scandale, t’aidant à te relever après que tu te sois lourdement fracassée contre le sol des préjugés. Grâce à lui, tu avais pu sauvegarder le plus précieux des trésors. Que se serait-il passé sans son entremise ? Des années de misère au parfum de l’enfer. Tes doigts se perdirent un instant sur le papier glacé alors qu’un sourire vint orner tes lippes.
« Jamais je n’aurai supporté d’être séparé de mes enfants. J’ai fait ce que j’ai jugé nécessaire. » Un père accompli qui excellait aussi dans le rôle d’oncle. Tes doigts continuèrent de feuilleter le recueil de vos souvenirs, avant que tu ne t’arrêtes sur un nouveau cliché.
« C’était juste après l’attaque… » Cruelle débâcle qui avait entaché son union avec la douce Freya de carmin. Lorsque tu pensais que ta destinée allait se briser, lorsque tu croyais que la faucheuse allait t’emporter, il t’avait arraché aux griffes de l’enfer, te volant à l’étreinte d’Hadès. Il t’avait sauvé. Il était ton héros.
« Et dire que j’ai faillis y perdre ma cousine préférée. Comment aurais-je fait sans toi ? » Un léger rire secoua ta carcasse, avant que tu ne lui murmures avec complicité.
« Je ne sais pas, mais ce dont je suis sûre, c’est que sans toi je serais plus que perdue. » Tu ne pouvais imaginer un univers où il n’était pas, c’était simplement inconcevable.
Impensable. Voulant balayer ces douloureux souvenirs, tu repris ton aventureuse redécouverte, avant de retomber sur un cliché qui avait orné des dizaines de journaux.
« Oh et celle-ci ! C’est le jour où tu as sauvé un orphelinat de la ruine. Tu es un homme tellement généreux Marlon… » Bien qu’il avait tenté d’agir dans l’ombre, humble qui l’était, les journalistes s’étaient rapidement emparés de l’affaire, dévoilant au monde comment le Travers avait sauvé des dizaines de pauvres orphelins. Il en avait même adopté un. Quel salvateur.
« J’aime tellement les enfants, il me paraissait évident qu’il fallait les aider. » Tes opalescences se perdirent dans le regard brillant de ton parent, alors que le fil de ton histoire, de la vôtre, noyait tes pensées. Ta main trouva la sienne pour la serrer brièvement.
« Je te serais toujours reconnaissante pour ce que tu as fait pour moi. Sans toi… Je ne sais pas ce qu’il serait advenu… Tu es parfait Marlon. Parfait. » Vraiment. Pour toi, personne n’était aussi parfait que l’était le grand Marlon Travers.