A la fin du repas, ils s'étaient quittés avec des embrassades, Romilda et Blaise leur promettant de les contacter rapidement pour le détective privé que Mikhail avait mentionné. L'homme d'affaires ne savait pas si tel serait le cas et si cela les mènerait vers une découverte intéressante concernant leur mission top secrète, mais il l'espérait. Et en même temps pas vraiment. Pour toute une floppée de raisons qu'il avait tentées de mettre de côté durant tous ces mois. Mikhail avait fait une promesse à l'enterrement de son meilleur ami, et s'il la tiendrait coûte que coûte ; il n'avait cependant pas penser que cela entraînerait autant de surprises et de déconvenues (qui n'en étaient pas tant).

Une fois rentrés dans leur maison, les deux hommes se sont dirigés vers la chambre. Ils vont refaire le cours de la soirée, c'est devenu une habitude entre eux. Dans son bas de pantalon en flanelle, Misha s'est installé sous les couvertures, il attend qu'Anthony le rejoigne en tentant de réfléchir aux hypothèses qui se déroulent lentement dans son esprit. Il n'a pas sommeil. “Do you really think it’s something?” lui demande son mari en le rejoignant finalement, Misha se décale inconsciemment pour lui laisser de la place dans le lit. Le leur. Leur lit. il prend son temps pour lui répondre, doit organiser ses pensées, il n'a jamais été un homme très impulsif. Avant qu'il ne puisse formuler à voix haute les nombreuses idées qui l'assaillent, Anthony reprend : “And what if it is? What do we do then?”. Les sourcils de Russe se froncent, il a l'impression que dans cette phrase son comparse ne s'enquiert pas seulement de leur mission, mais de leur relation également. Misha n'est pas aveugle, et malgré les nombreuses tentatives pour tenir à distance les émotions qu'il ressent quand il pense au brun, il sent que quelque chose de plus existe entre eux. Et que ce n'est pas simplement la résultante naturelle de tout ce temps passé ensemble. Il ne sait juste pas quoi en faire ni quoi en penser. "I think it's something yes." Répond-il au final, d'une voix douce et lente, à peine plus haut qu'un soupir. La lumière discrète de la chambre et la proximité physique entre eux deux semblent être propices aux confidences. C'est un terrain dangereux mais inévitable. "If it's something shady, I'll deal with it. Don't think too much about it Anthony. You won't have to do anything, the less you'll know the better." La conversation prend un tournant des plus sombres en cet instant, Mikhail laisse un sourire décorer ses lèvres pour adoucir la menace qui vit dans ses propos. "If it's not well, we'll stop. It's what we said right? This is our last try..." Il sent la déception dans ses propos et celle-ci n'est pas entièrement dûe à l'idée de décevoir la mémoire de Riv, mais aussi à la possibilité de ne plus voir cet homme qui en quelques mois est devenu une constante dans sa vie.

Après de courtes secondes - qui semblent durer une éternité - sa main s'approche du bras de son fake husband et s'y dépose doucement, presque invisible. "But, that won't mean we'll have to stop seeing each other. If you want to that is... Sa langue glisse sur sa lippe inférieure alors qu'il prend une légère inspiration de quoi contenir les prochains mots qui peinent à sortit. What do you want?" C'est peut-être la fatigue qui lui fait prononcer cette question, ou bien l'imminence d'une séparation possible et peu appréciable, ou bien une poussée de courage. Ou bien tout cela à la fois. Mikhail ne le sait, mais les mots sont bien là dans l'air, une question en suspend entre eux. Un nouveau chemin qui s'ouvre .... ou se referme.

Le temps que prend Anthony pour lui répondre lui paraît interminable alors qu’en réalité il ne doit pas s’écouler plus de quelques secondes. Pourtant c’est la réponse qui lui coupe le souffle, plus que l’attente. « Too much. » Too much, too much. Not enough. Un mélange de soulagement et d’excitation s’empare du brun à l’idée qu’il ne s’est pas tout inventé, que la proximité ne lui a pas fait voir des choses qui n’avaient pas lieu d’être. « I want this. » Mikhail reprend le contrôle de sa respiration en un léger fil tremblant alors que sa main se referme involontairement sur le bras qu’elle ne faisait que toucher. He has always wanted too much. Everything. Tout le verre ou rien du tout. Ayant grandi dans une famille où tous ses désirs lui étaient accordés, même les plus extravagants, Misha n’a jamais appris à patienter ou à accepter les refus. Pour la première fois de sa vie, il s’est fait violence. Pendant des mois, il a combattu contre ses propres pensées et envie par respect pour la mémoire de son meilleur ami mais par une peur inconnue également. Celle de se confronter à un mur et de ne pas savoir comment réagir. Il semblerait que ses inquiétudes aient été infondées au vu des paroles qui suivent. « You, me, together, the house, the … I mean, this is almost perfect and I know it sounds insane and I never thought I’d want the white-picket fence suburban life but … I do, I want it … I want it with you. » I can give it to you, I can give you everything you want, anything. Les pensées s’enchaînent à toute allure dans son esprit, Mikhail n’a pas appris à montrer son affection autrement que par des grands gestes souvent matériels. Tout le verre, en Crystal de préférence.

C’est tout ce qu’il souhaitait entendre, et peut-être plus encore que ce à quoi il s’attendait, pourquoi alors n’arrive-t-il pas à répondre, à rompre la distance. Sa main sur le bras une marque de plus qu’il y a trop d’espace entre eux, que d’autres parties de leurs corps pourraient se joindre. Il veut, Anthony le veut également. Il a posé la question bon sang ! Mais voilà qu’une culpabilité familière lui glace les muscles, fige ses mots dans sa gorge. Il a la nette impression que Riv n’est pas loin, qu’il les regarde avec mécontentement, serait déçu de son comportement, de son cœur qui bat à tout rompre, de son souffle qui s’accélère, de ce point de non-retour que Mikhail s’apprête à franchir.  

Heureusement, Mikhail se rappelle au dernier moment qu’il n’y a rien de bon en lui, que l’égoïsme a toujours fait partie de sa nature, que les ténèbres l’accompagnent plus que la lumière. Que ce n’était qu’une question de temps sans doute avant qu’il ne trahisse son ami, comme toutes les promesses brisées auparavant et les liens rompus. Sa main remonte le long du bras d’Anthony et tout du long le Russe se convainc qu’il ne ressent plus rien, qu’il n’a jamais été une personne honorable et qu’ils sont idiots ce qui ont pu voir autre chose en lui. Que c’est leur faute pour lui avoir fait confiance. Sa main glisse contre son cou et s’arrête sur sa joue et il approche son visage en se tournant un peu dans le lit, he’s not a good man. Never was. He takes and he takes and he takes. « I want this too, » murmure-t-il aussi doucement que les mots de son fake-husband. « I want you, » ajoute-t-il contre ses lèvres avant de les embrasser en relâchant un soupir qui contient ses doutes et cette culpabilité qu’il rejette, un peu de honte et énormément de désir.

Si Anthony a vu quelque chose en lui, quelque chose que lui-même ne comprendra jamais, il ne peut pas le laisser partir. Distrait par la lumière tamisée, berné par ses illusions, bercé par le vin, Mikhail embrasse Anthony jusqu’à ce que leurs souffles se mêlent, jusqu’à oublier où lui-même finit et ou l’autre homme commence. Until he can forget that it’s all wrong and twisted. They’re not really married, it’s all fake. Le mirage d’une vie parfaite à laquelle il ne devrait pas prétendre qui ne tiendra jamais la route une fois que la lumière du soleil reviendra les éclairer.